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L’effondrement du système exacerbe les rivalités inter-impérialistes

mercredi 12 octobre 2011, par Robert Paris

USA/Europe

Barack Obama a exhorté jeudi les responsables européens à « agir vite » contre la crise de la dette qui pourrait avoir un impact « très réel » sur les États-Unis, et estimé qu’il était d’autant plus urgent que le Congrès adopte son vaste plan pour l’emploi.

Les Européens « doivent agir vite » face au risque de contagion de la crise grecque, a observé le président américain lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche, largement consacrée aux difficultés de l’économie américaine.

« Il y a un sommet du G20 qui arrive en novembre » en France, a indiqué M. Obama. « J’espère vraiment que d’ici au sommet, ils auront un plan d’action très clair et concret qui sera à la hauteur », a-t-il poursuivi, après avoir prévenu que « les problèmes que l’Europe traverse aujourd’hui pourraient avoir un effet très réel sur notre économie, au moment où elle est déjà fragilisée ».

M. Obama a de nouveau défendu les mesures de relance qu’il a présentées au Congrès il y a un mois, assurant que ce plan « nous aidera à nous prémunir contre un nouveau repli de l’activité si la situation en Europe devait s’aggraver ».

Les Européens parlent volontiers de dette américaine et les Américains de dette européenne...

La banque centrale américaine assèche-t-elle le financement des banques européennes en dollars ? Très inquiète de l’évolution de la crise de la dette souveraine sur le Vieux Continent et de ses conséquences sur les établissements financiers, la Réserve fédérale (Fed) a pris, il y a plusieurs semaines, des mesures restrictives à l’égard du système financier européen.

"Elle a exigé que des banques non américaines déposent des actifs en garantie à l’avance, même pour celles qui ne lui empruntent pas d’argent, confie une source proche de la Fed. C’est surtout pour la Fed une façon de se protéger au cas où les banques viendraient chercher un prêt d’urgence", d’aller plus vite en cas de tension.

En temps normal, les établissements déposent des actifs en dollars à la Fed (bons du Trésor américain, prêts hypothécaires...), lorsqu’ils lui demandent de l’argent, en garantie du prêt accordé par la banque centrale américaine.

La mesure prise par la Fed a bloqué des titres que les banques utilisent habituellement comme caution pour obtenir des dollars auprès d’autres établissements financiers (banques, fonds d’investissements). Accentuant le mouvement, les fonds monétaires américains, pourvoyeurs de dollars, ont durci leurs conditions de prêts aux banques européennes.

Certains parlent même de complot, arguant que les Etats-Unis, qui ont perdu leur triple A en août, ont intérêt à peser sur le cours de l’euro pour garder la suprématie du dollar. Ainsi Laurence Parisot, la présidente du Medef, a récemmlent évoqué récemment "un tam-tam très organisé" Outre-Atlantique.

Face aux signes de renchérissement du financement en dollars, la Banque centrale européenne (BCE) a ouvert les vannes. Elle a annoncé le 15 septembre qu’avec l’aide d’autres banques centrales - Fed, Banque d’Angleterre, Banque du Japon et Banque nationale suisse qui lui prêteront des dollars -, elle accorderait, à partir du mois d’octobre, des prêts à trois mois en billet vert, en contrepartie d’actifs en euros, non pas en dollars.

Cette mesure vient compléter un financement hebdomadaire en devise américaine accordé par la BCE, auquel les banques ont accès depuis mai 2010. Celui-ci n’a jusqu’à présent servi que trois fois depuis mi-août. Les banques hésitent en effet à solliciter les instituts d’émission, de peur d’être stigmatisées comme traversant une crise de liquidités.

Il s’était passé la même chose en en 2007 lors de la crise des "subprimes" et en 2008, au moment de la faillite de Lehman Brothers. Les établissements n’osaient pas se présenter au guichet d’urgence de la Fed, celle-ci assimilant cette démarche à de la mauvaise gestion. Pour contourner le problème, "les banques françaises pourraient faire une démarche collective", confie une source bancaire.

Le changement des conditions de prêts - plus chers et plus courts - a touché certaines de leurs activités, par ailleurs déjà pénalisées par la future réglementation dite de Bâle 3. La Société générale et BNP Paribas ont prévu de réduire leur dépendance au dollar, essentiellement dans leurs départements de financement et d’investissement.

Dans ce contexte, elles comptent en priorité s’attaquer aux activités de prêts qu’elles doivent financer en dollar, alors que leurs dépôts en billet vert étant insuffisants : les exportations d’avions, les flottes de bateaux, les projets d’infrastructure, le commerce international ou encore l’immobilier commercial aux Etats-Unis.

Les répercussions se font déjà sentir dans l’industrie aéronautique dont les banques françaises sont d’importants pourvoyeurs de fonds. Les marchés redoutent que les compagnies aériennes, en mal de crédits, annulent des commandes. ce qui a fait chuter en Bourse EADS, la maison mère d’Airbus, de 7,91 % jeudi 22 septembre.

"Les compagnies aériennes vont aller chercher les dollars là où ils se trouvent : aux Etats-Unis ou en Chine" relativise un expert du secteur Le directeur financier d’EADS, Hans -Peter Ring, précisait jeudi que bon nombre de nouvelles banques, notamment asiatiques, étaient arrivées sur le marché du financement d’avions.

"C’est finalement plus une mauvaise nouvelle pour les banques françaises que pour le secteur aéronautique", expliquait un analyste financier "car elles se voient exclues d’un marché juteux dont elles se sont faits une spécialité".

Le président américain Barack Obama et son secrétaire au Trésor Timothy Geithner ont pressé les Européens de résoudre une crise de la dette qui menace de contaminer l’économie réelle.

Les dirigeants européens auront vendredi des occasions de répondre, par exemple lors de la rencontre à Berlin de la chancelière allemande Angela Merkel et du Premier ministre néerlandais Mark Rutte.

Ce dernier devrait profiter de l’occasion pour promouvoir un agenda économique européen qu’il a conçu avec ses homologues de Finlande et de Suède, ce dernier pays n’étant pas membre de la zone euro, et rendu public vendredi.

Ce programme réclame "de hauts niveaux d’ambition pour des marchés ouverts et compétitifs, l’innovation, l’accès aux financements, une régulation intelligente et un marché unique fort".

Mme Merkel sera elle attendue au tournant sur la question du soutien aux banques de la zone euro.

Jeudi, elle a déclaré qu’il ne "fallait pas hésiter" à les renflouer, mais que l’aide publique ne devait être utilisée qu’exceptionnellement si les établissements échouent à se renforcer par leurs propres moyens, par exemple en augmentant leur capital.

A en croire la presse allemande, il s’agissait d’un avertissement adressé à la France. Berlin soupçonnerait Paris de vouloir utiliser le mécanisme de secours européen FESF pour aider son secteur bancaire.

Le FESF, dont les responsables européens ont décidé de renforcer les moyens, n’attend plus que la ratification de la Slovaquie, qui traîne des pieds.

Mme Merkel et le président français Nicolas Sarkozy auront l’occasion de confronter leurs vues dimanche lors d’un entretien à Berlin.

Un renforcement des banques européennes est une étape préliminaire à un nouveau sauvetage de la Grèce, qui devrait passer par une forte décote des titres de dette du pays.

En clair, les banques de la zone euro devraient accepter de soulager Athènes en renonçant à une grande partie de leurs créances, ce qui signifierait de lourdes pertes pour elles.

Le ministre allemand de l’Economie, Philipp Rösler, a appelé vendredi à Athènes les entreprises allemandes à investir en Grèce "avec dynamisme et élan créateur". Il doit encore s’entretenir dans la journée avec le Premier ministre Georges Papandréou.

Cette visite est l’un des rares déplacements effectués par un dirigeant allemand en Grèce depuis le début de le crise de la dette en zone euro, sur fond de relations tendues entre Athènes et son principal donateur.

53% des Allemands refusent d’aider encore davantage la Grèce, 6% de plus qu’il y a un mois, selon un sondage diffusé vendredi par la chaîne télévisée ARD.

La crise de la dette américaine exacerbe les tensions politiques

10/08/2011

La crise de la dette publique américaine a été traitée en France comme un blocage politique provoqué par des républicains radicaux et faisant obstacle à une solution technique simple. Si le blocage est réel, la solution n’est pas simple ; et le blocage n’est pas de ceux qui pourront se résoudre rapidement.

La situation de la dette publique américaine est beaucoup plus sérieuse que celle des grands pays européens : le déficit reste considérable cette année, à près de 9 % du produit national brut (PNB), soit près d’un tiers des dépenses fédérales. Si l’on ajoute à la dette fédérale les dettes des Etats et des collectivités locales (comme on le fait en Europe dans la dette au sens du traité de Maastricht), on dépasse désormais largement les 100 % du PNB, avec une tendance rapidement croissante.

Mais il y a plus grave : la structure de la dette et le niveau actuel des taux d’intérêt masquent des coûts qui risquent d’exploser. Les taux d’intérêt sur la dette publique américaine sont les plus bas jamais enregistrés pour aucun emprunteur à aucun moment de l’histoire : jamais les taux à court terme n’étaient descendus en dessous de 1 %, ce qui est le cas constamment depuis trois ans, et ce jusqu’à des maturités proches de cinq ans.

La maturité moyenne de la dette américaine étant courte - environ cinq ans en théorie, quatre si l’on considère la dette à long terme rachetée par la Banque centrale des Etats-Unis (Fed) dans le cadre du programme " Quantitative Easing 2 " ou " QE2 " - second plan monétaire de relance, de 600 milliards de dollars (413 milliards d’euros) - -, le budget profite pleinement désormais d’une dette presque gratuite. Le revers de la chose est que le service des intérêts explosera dès que les taux remonteront, ce qui affecterait significativement le budget.

La brièveté de la maturité de la dette présente un autre inconvénient majeur : il met les Etats-Unis à la merci d’une crise de confiance. En cas de blocage du débat budgétaire ou plus largement de crise politique, qu’elle soit interne ou internationale, la simple absence de renouvellement des bons du Trésor peut conduire à une crise de trésorerie.

Cette situation peut en particulier se présenter si la Fed continuait de racheter massivement de la dette publique au-delà de ce que la situation économique requiert, et donc était soupçonnée de monétiser volontairement la dette.

Les anticipations d’inflation (actuellement minimes, en tout cas telles que mesurées par les obligations indexées qui les évaluent à 2,2 % par an pour les dix prochaines années) et les anticipations de dépréciation du dollar pourraient alors augmenter brutalement, et les créanciers (spécialement étrangers) refuser de renouveler les bons du Trésor, sauf à des taux prohibitifs.

Les rentiers américains auraient alors sans doute le choix entre une taxe inflationniste et une augmentation des impôts. Cette situation a été connue dans beaucoup de pays très endettés au lendemain des deux guerres mondiales, et ces expériences montrent qu’il est difficile de stabiliser une situation d’emballement inflationniste dans des situations de conflit politique interne aigu.

Or les tensions politiques exacerbées par le Tea Party sont susceptibles de durer, car elles ont des racines profondes et pas de solution simple. Selon nombre d’analystes, la division politique des Etats-Unis n’a pas été si forte depuis la fin de la guerre de Sécession, en 1865. Celle-ci, qui commençait voici juste cent cinquante ans, opposait deux sociétés qui avaient peu à peu divergé. L’esclavage constituait évidemment le principal motif du conflit, mais il n’était qu’un révélateur.

Au Nord, une alliance entre industriels et fermiers individuels reposait sur des hauts salaires permis par l’investissement industriel, l’éducation de masse et la distribution des terres " vierges " de l’Ouest aux pionniers. L’industrialisation s’appuyait sur le progrès technique, les ressources naturelles et le protectionnisme.

Au Sud, une société dominée par des aristocrates esclavagistes refusait l’éducation et le soutien à l’industrialisation au profit d’une agriculture dont la profitabilité dépendait de l’esclavage et du libre-échange.

Dans une économie mondialisée, le poids de l’économie dite "transatlantique" est dominant : les pays membres de l’Union européenne et les Etats-Unis produisent ensemble 60% du PIB (produit intérieur brut) mondial, assurent 40% du commerce mondial et 62% du stock des investissements directs.
Malgré les tensions périodiques, la relation transatlantique reste l’un des principaux axes des relations extérieures de l’Union. Les flux commerciaux entre l’Union et les Etats-Unis s’élèvent à environ 1,7 milliard d’euros par jour, chacun étant le premier partenaire commercial de l’autre. L’Union européenne est la cible privilégiée des investissements directs américains, mais également le premier investisseur aux Etats Unis.

« Il est certain que les relations économiques transatlantiques entre l’Europe et les Etats-Unis sont, de manière récurrente, marquées par des tensions, essentiellement dans trois domaines :

 En premier lieu, de vives controverses persistent de part et d’autre de l’Atlantique sur la conduite des politiques économiques, les Américains critiquant la frilosité de la banque centrale européenne et le carcan qu’imposerait le pacte de stabilité, les Européens, d’ailleurs suivis par le FMI, mettant leur partenaire en garde contre ses dérapages budgétaires et le niveau historiquement bas atteint par l’épargne des ménages aux Etats-Unis (0,4% en 2004 !).

 En deuxième lieu, les négociations commerciales transatlantiques restent un terrain d’affrontements privilégié, même s’il faut admettre qu’après Seattle, à Doha, puis à nouveau à Cancun, les efforts conjugués du représentant américain au commerce et du commissaire européen au commerce ont évité une crise profonde des négociations commerciales internationales en cours.

Organismes génétiquement modifiés, avances remboursables pour Airbus, mesures fiscales américaines condamnées par l’Organisation mondiale du commerce comme étant des subventions déguisées, les sujets de crises se succèdent, révélateurs, avant toute chose, qu’en ce domaine, Européens et Américains sont deux géants qui parlent d’égal à égal.

 Le déficit de la balance courante américaine et ses conséquences potentielles pour l’euro représente le troisième point noir de la relation euro-américaine. Les Américains peuvent stigmatiser la faible croissance européenne mais le fait est qu’ils financent la leur avec l’épargne des pays pauvres. C’est aujourd’hui le paysan chinois qui finance le déficit américain - c’est-à-dire la consommation des ménages américains ou les dépenses militaires des Etats-Unis - du fait du niveau dramatiquement bas de l’épargne des ménages américains. (...)

A l’évidence, la relation économique transatlantique est porteuse de nombreux conflits, déclarés ou potentiels. Le calendrier contentieux transatlantique devrait rester chargé dans les mois et années qui viennent :

 plusieurs affaires sont actuellement à un stade pré-contentieux ou bien à un stade très précoce de la procédure contentieuse et sont susceptibles de connaître des développements dans les mois qui viennent. C’est le cas notamment du dossier relatif aux Foreign Sales Corporations(FSC) : la loi fiscale américaine autorisant les entreprises qui exportent des marchandises produites aux Etats-Unis à exclure de leur base imposable une partie de leurs revenus en faisant passer leurs marchandises par des sociétés de vente à l’étranger (Foreign Sales Corporations) a été analysée par l’OMC comme assimilable à une subvention à l’exportation et, à ce titre, condamnée en janvier 2002. Bien que le Congrès ait adopté un texte abrogeant la mesure condamnée, l’Union européenne doute de la conformité de ce nouveau texte avec les règles de l’OMC ;

 à plus long terme, c’est dans le domaine des règlements anti-dumping et anti-subventions en matière de biens industriels que les probabilités de contentieux transatlantiques sont les plus fortes. Les Etats-Unis pourraient par exemple être tentés de contester la réglementation communautaire sur l’interdiction en Europe de produits cosmétiques testés sur les animaux ou la réglementation sur la mise sur le marché de produits chimiques ;

 la question agricole demeure source de multiples contentieux, d’autant que, dans ce domaine, les enjeux transatlantiques peuvent être instrumentalisés au profit d’autres objectifs de politique étrangère (liens avec les pays en développement notamment). Malgré leurs divergences structurelles, l’Union européenne et les Etats-Unis parvenaient traditionnellement à rapprocher leurs positions en fin de négociations, et à aboutir à un accord qui était ensuite repris par le reste des membres de l’OMC. Or l’échec du sommet de Cancun a montré les limites de cette pratique, à laquelle s’opposent les pays en voie de développement. Désormais, l’intérêt des Européens comme des Etats-Unis est de rechercher des alliances avec les pays émergents (G 20) ou les pays en voie de développement (G 90). Cet exercice est cependant plus facile pour les Etats-Unis que pour l’Europe, qui occupe dans la négociation la position de l’accusé. En effet, si, aux termes de l’estimation de l’OCDE, le farmer américain est plus subventionné que le paysan européen (20 000 dollars contre 16 000 en 2001), la structure tarifaire de l’Europe expose particulièrement celle-ci aux attaques, comportant davantage de secteurs très protégés.

Les marchés rebondissent en ce début de semaine. Pour autant, la nervosité reste de mise face à cette crise que les non-spécialistes ont bien du mal à comprendre. D’autant que les commentaires sont différents selon le côté de l’Atlantique où l’on se trouve : “L’Europe traverse une crise financière qui effraye le monde, et ils essaient de prendre des initiatives responsables, mais ces initiatives ne sont pas prises aussi rapidement qu’il le faudrait”, commentait récemment Barack Obama.

Le président américain considère et évoque la crise à travers le prisme de sa campagne électorale. C’est de bonne guerre. L’Espagne, la France, l’Italie et l’Allemagne s’apprêtent à prendre le même chemin. Et face à la grogne des populations, personne ne veut le faire avec le handicap d’une part de responsabilité assumée.

Europe et Etats-Unis sont pourtant dans le même bateau et font face au même problème : le poids de leur dette publique détenue par des banques étrangères. Le cas de la Grèce par exemple montre que ce n’est pas le montant global qui inquiète, mais plutôt le risque de contagion, le fameux effet domino. La relation créanciers-débiteurs entre les Etats-Unis et l’Europe est encore plus parlante.

On parle ici des dettes des Etats détenues par des banques. Rien d‘étonnant, donc, que le secteur bancaire soit le premier à subir la pression spéculative des marchés financiers. Une pression parfois accrue par les agences de notation. Ce qui contribue à entretenir la nervosité des marchés, et donc celle des politiques. Récemment, les Européens ont accusé les agences de notation américaines de délibérément favoriser le dollar.

De l’autre côté de l’Atlantique, c’est la crise de la zone euro dans son ensemble qui préoccupe le plus Washington. Les Etats-Unis parlent d’un manque de courage européen. Ils agissent pourtant de la même manière estime le prix Nobel de d‘économie Paul Krugman : “Si vous regardez les actions menées, par opposition à la rhétorique, il n’y a pas tant de différence entre les Etats-Unis et l’Europe. Et donc en terme de politique réelle, cette convergence est malheureusement une convergence sur les mauvais aspects. Austérité fiscale, les devises, mais le résultat sera le même des deux côtés : un désastre.”

Même problème, même approche, mais chacun semble se renvoyer la balle. “Ce ne sont pas les chômeurs grecs qui ont causé la faillite de Lehman Brothers”, a répondu le président de l’Eurogroup Jean-Claude Juncker à Barack Obama. Le débat se poursuit, et ce n’est pas de nature à rassurer les marchés.

USA / Chine / Japon

Les Etats-Unis ont échoué à désamorcer "la bombe de leur dette", a jugé l’agence officielle Chine nouvelle et la Banque centrale chinoise continuera à diversifier ses investissements en devises étrangères face aux menaces qui pèsent encore sur le dollar.

"Les réserves de change de la Chine vont continuer à suivre les principes de la diversification des investissements et de la gestion des risques", a indiqué dans un communiqué Zhou Xiaochuan, le gouverneur de la Banque centrale. Les réserves de change de la Chine, les plus importantes au monde, ont atteint 3197,5 milliards de dollars fin juin, en augmentation de 30,3% sur un an, selon la banque centrale chinoise. Mais la Chine est préoccupée car elle est de loin le plus grand créancier des Etats-Unis, et détenait en mai 2011 quelque 1160 milliards de dollars de bons du Trésor américains, selon des chiffres de Washington.

"Même si les Etats-Unis ont fondamentalement évité le défaut de paiement, les problèmes de leur dette souveraine demeurent non résolus", a ainsi jugé le Quotidien du peuple, organe officiel du Parti communiste. "Ceux-ci sont simplement reportés et la tendance est qu’ils empirent. Cela jette une ombre sur le rétablissement de l’économie américaine et est porteur de risques et de préoccupations encore plus importants pour l’économie mondiale", a poursuivi le journal. La télévision d’Etat chinoise avait elle aussi critiqué l’accord de dernière minute conclu entre le président Obama et le Congrès. "Il s’agit d’un spectacle politique qui est plus un effet d’annonce qu’(un accord de) fond", avait-elle estimé.

L’agence de notation chinoise Dagong a de son côté abaissé la note des Etats-Unis après l’adoption par le Congrès américain du texte permettant d’éviter un défaut de paiement des Etats-Unis, a aussi annoncé Chine nouvelle. La note des Etats-Unis passe de A+ à A avec une perspective négative, a précisé Dagong, qui assure être indépendante mais qui doit encore prouver dans le temps une réelle crédibilité. Le 14 juillet, Dagong avait assorti d’une perspective négative son évaluation de la dette souveraine des Etats-Unis, qu’elle avait déjà abaissée d’un cran au mois de novembre. L’agence de notation chinoise suit une méthodologie distincte de celle des agences américaines Moody’s, Fitch ou Standard & Poor’s. Contrairement aux trois agences américaines qui accordent aux Etats-Unis le sésame Aaa, Dagong n’accorde pas à Washington cette note maximale, et l’avait abaissée en novembre de AA à A+.

La Maison Blanche a une nouvelle fois appelé Pékin mardi à en faire davantage pour renforcer la flexibilité du taux de change du yuan, quelques heures avant l’arrivée du président chinois Hu Jintao aux Etats-Unis pour une visite d’Etat.

"Sur la question de leur monnaie, nous pensons qu’ils doivent en faire plus", a déclaré le porte-parole de la présidence américaine, Robert Gibbs. "Ils ont pris quelques mesures limitées. Nous pensons que davantage doit être fait", a-t-il insisté. "C’est une opinion qui est celle de ce pays, mais aussi de nombreux pays dans le monde", a encore dit M. Gibbs, alors que M. Hu est attendu dans l’après-midi de mardi à Washington, avant d’être reçu en grande pompe mercredi à la Maison Blanche.

Accusant la politique de change chinoise d’être responsable du déficit commercial colossal des Etats-Unis, Washington ne cesse d’exhorter Pékin à accélérer le mouvement d’appréciation du yuan entamé en juin, date à laquelle les autorités chinoises ont décidé d’autoriser leur monnaie à flotter un peu plus librement.

La Chine et les Etats-Unis sous tension. En cause : le yuan, la monnaie chinoise. Le Sénat américain a approuvé mardi un projet de loi visant à pénaliser la Chine, soupçonnée de manipuler sa monnaie afin de gonfler ses exportations. L’adoption de ce projet de loi est une "entorse grave" aux règles de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) susceptible de provoquer une "guerre commerciale", a réagi mercredi le ministère chinois des Affaires étrangères. La semaine dernière, Pékin s’était déclaré "fermement opposé" à la proposition de loi américaine qui "nuit gravement aux relations commerciales sino-américaines".

Les élus du Sénat, à majorité démocrate, ont adopté ce texte par 63 voix contre 35. Mais la Chambre des représentants n’a pas prévu de se prononcer sur le texte, car les chefs de la majorité républicaine craignent cette guerre commerciale avec Pékin. Le président de la Chambre, John Boehner, a déjà affirmé récemment qu’un tel projet était "dangereux". Le secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, a estimé mardi soir que les sénateurs "n’avaient pas" déclenché de guerre commerciale avec la Chine en adoptant ce texte. Mais il a répété que l’administration Obama ne soutenait pas le projet de loi dans son ébauche actuelle, dont plusieurs dispositions seraient selon lui "en contradiction" avec les obligations des Etats-Unis à (OMC).

A l’approche de la présidentielle de novembre 2012, les partisans du texte soutiennent que l’économie américaine, avec son taux de chômage à 9,1%, souffre d’une sous-évaluation de la monnaie chinoise. Avec ce projet de loi, les sénateurs cherchent à pousser le Trésor à accuser formellement Pékin de manipuler sa monnaie. Ils prévoient des sanctions le cas échéant. Les règles de l’OMC prévoient pour les Etats membres la possibilité de sanctionner un partenaire commercial dont les exportations sont subventionnées. Mais ces statuts ne mentionnent pas explicitement la sous-évaluation d’une monnaie et les interprétations divergent pour savoir si le taux de change entre dans ce cadre juridique ou non. La semaine dernière, le président avait toutefois accusé la Chine de "fausser" les échanges commerciaux mondiaux en intervenant pour faire baisser la valeur du yuan. Les accusations visant le yuan et sa position très faible face au dollar - donnant un avantage à des marchandises chinoises pouvant aller jusqu’à 30% face aux produits équivalents américains - sont peu disputées à Washington.

Messages

  • Même problème, même approche, mais chacun semble se renvoyer la balle. “Ce ne sont pas les chômeurs grecs qui ont causé la faillite de Lehman Brothers”, a répondu le président de l’Eurogroup Jean-Claude Juncker à Barack Obama.

  • le capitalisme d’Etat aspire à arracher l’économie à la division internationale du travail, à adapter les forces productives au lit de Procuste de l’Etat national, à réduire artificiellement l’économie dans certaines branches et à créer artificiellement d’autres branches à l’aide d’immenses faux frais La politique économique de l’Etat actuel, en commençant par des douanes du type de celles de l’ancienne Chine et en finissant aux épisodes d’interdiction de machines dans l’" économie planifiée " de Hitler, parvient à une régularisation instable au prix de l’abaissement de l’économie nationale, de l’introduction du chaos dans les relations mondiales et d’un désarroi complet du système monétaire, dont on aura bien besoin pour la planification socialiste. Le capitalisme d’Etat actuel ne prépare pas et ne facilite pas le futur travail de l’Etat socialiste ; au contraire, il crée pour ce travail de colossales difficultés supplémentaires. Le prolétariat a laissé échapper un certain nombre de moments pour prendre le pouvoir. Ainsi, il a créé les conditions dans la politique — pour la barbarie fasciste, dans l’économie — pour le travail destructeur du " capitalisme d’Etat ". Après la conquête du pouvoir, le prolétariat aura à s’acquitter économiquement de ses manquements politiques.

    Extraits de l’article : "La nature de classe de l’Etat stalinien, d’après Léon Trotsky".

  • Lors de son tête-à-tête avec le président chinois, Hu Jintao, Barack Obama n’a pas caché « l’énervement » des entrepreneurs américains face aux pratiques monétaires et commerciales déloyales et « inacceptables » de la Chine. Le président américain a expliqué que Pékin devait respecter la protection de la propriété intellectuelle et laisser le yuan s’apprécier face au dollar. Le contexte de morosité économique de l’Amérique et l’échéance électorale de 2012 expliquent le ton musclé d’Obama, jadis plus diplomate. Ses rivaux républicains multiplient les critiques à l’endroit de la Chine, menaçant sur un ton guerrier d’établir des taxes aux frontières si Pékin s’obstine à ne pas réévaluer le yuan. « Le déficit commercial et les problèmes de chômage », de l’Amérique « ne sont pas la conséquence du taux de change du yuan, et même une forte appréciation du yuan ne réglerait pas les problèmes des États-Unis », a répliqué Hu, se gardant d’annoncer une future réévaluation de sa monnaie et appelant de son côté l’Amérique et l’Europe à céder du pouvoir aux grands pays émergents au FMI.

    Les aspects militaires de la tournée d’Obama, qui est en train de renforcer ses accords de défense avec plusieurs pays inquiets de l’agressivité de Pékin en mer de Chine méridionale, ne devraient pas apaiser le climat. Barack Obama doit se rendre en Australie pour y annoncer la création d’une base militaire américaine. Tout en dialoguant avec la Chine, les Américains veulent favoriser l’émergence d’alliances économiques et militaires permettant de contenir leur partenaire-adversaire en attendant de l’amener à respecter les règles du jeu, explique le professeur australien Geoffrey Garrett.

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