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Mort aux mythes !

mardi 3 juillet 2012, par Robert Paris

J.-R., le méchant capitaliste mythique

Mort aux mythes !

« Le roi est nu », criait un enfant, et chacun reconnaissait enfin qu’il disait vrai, alors que jusque là le peuple n’osait même pas admettre que le roi pouvait être nu et refusait de croire ce qu’il voyait de ses propres yeux.

Les mythes sont trompeurs, donnent de faux espoirs, mais ils semblent adoucir les duretés de la vie et les peuples s’accrochent fermement à leurs mythes, qu’ils soient religieux ou pas. L’un de ces mythes est la durabilité du système social.

Un mythe hante le capitalisme, celui de l’éternité. Prétendu dernier horizon, indépassable, considéré comme la « fin de l’Histoire », ce système économique et social a prétendument détruit définitivement son adversaire qui était, paraît-il, le système des régimes de l’Est et de la Russie, qualifiés de communistes. Il s’agit bien entendu d’un « communisme » qui n’avait plus rien à avoir avec la lutte de libération du prolétariat international des chaînes de l’exploitation, dont Marx et Lénine se revendiquaient.

Quant au capitalisme, sa fin n’aurait risqué d’arriver que du fait de l’agression extérieure de la deuxième grande puissance mondiale ? Pourtant, il semble bien que les impérialismes anglais et américain, à la fin de la deuxième guerre mondiale, aient plutôt eu besoin de la deuxième grande puissance pour étayer leur pouvoir social sur le monde, confiant volontairement et non de manière forcée, la moitié de l’Europe et de l’Asie au deuxième grand. Et cet édifice, l’opposition des deux Grands, a perduré longtemps après 1943. Il a tenu le coup, même après que la vague révolutionnaire éclate dans les pays colonisés et soit détournée et écrasée conjointement par les deux Grands.

Par contre, depuis la « chute du mur de Berlin », le capitalisme devenu officiellement le seul système au monde connaît des difficultés qui remettent en question sa pérennité de l’aveu même de ses plus grands adeptes et des grands propriétaires de capitaux privés. En se détournant massivement des investissements productifs, les capitalistes ne se contentent pas de jeter le monde dans une récession. Ils détiennent une masse de capitaux privés plus grande que dans toute l’Histoire et ils spéculent contre l’économie. Ils sont passés de « conserver » à « vendre », sur toutes les valeurs capitalistes, y compris les trusts les plus importants, les monnaies, les banques, les dettes souveraines… Ils sont devenus nocifs au système au point de le mener en 2008 au bord du gouffre.

Depuis, malgré l’intervention massive et générale de tous les Etats de la planète qui a permis de ne pas laisser le système s’effondrer brutalement, jamais le grand capital privé international n’a cessé de miser à la chute. Les Etats ne sont jamais parvenus à ramener les capitaux privés vers l’investissement. Le grand capital a ramassé une galette extraordinaire à ce jeu, les Etats fournissant à ce dragon financier, des sommes sans cesse plus énormes. L’enjeu de ce chantage à grande échelle n’a cessé d’augmenter, rendant inéluctable un effondrement massif à venir même si personne ne peut prédire son moment exact ni sa forme.

Le seul moyen de ne pas aller jusqu’à la chute économique et financière finale, et aux guerres civiles et sociales que cela ne manquera pas de produire, sera certainement de lancer le monde dans la guerre.

Bien sûr, même si le fonctionnement capitaliste, le profit privé par accumulation de la plus-value extraite de l’exploitation des prolétaires, est décédé en 2008, cela ne signifie pas que la classe capitaliste va reconnaître que l’Histoire a signé son arrêt de mort. Elle continue à détenir le pouvoir et maintient plus que jamais la fiction de son éternité.

Il est, plus que jamais, indispensable aux classes dirigeantes de convaincre les prolétaires qu’ils ne sont porteurs d’aucun avenir, d’aucune société alternative.

Et c’est le deuxième mythe de notre époque : les capitalistes pourraient se passer des prolétaires mais les exploités, eux, ne pourraient pas se passer des exploiteurs ! Le Travail ne serait pas indispensable alors que le Capital, lui, le serait… Les travailleurs ne seraient plus porteurs d’un idéal, d’un socialisme ou d’un communisme dont ils seraient orphelins depuis la chute du mur…

Et, dans ce domaine, le mythe consiste plutôt dans la phase triomphante, social-démocrate, stalinienne et syndicale, qui représenterait soi-disant l’époque où le prolétariat était sûr de lui et fier de ses perspectives !

Ce serait cela le glorieux passé du prolétariat ? Pas du tout ! Ce sont les pires ennemis du prolétariat révolutionnaire, ceux qui ont le sang des révolutions sur leurs mains qui ont été baptisés par la société bourgeoise comme représentants de l’avenir des exploités, comme défenseurs du socialisme, du communisme et du syndicalisme ouvrier !

Quand la prolétaires sont partis à l’assaut du monde capitaliste de 1848 à nos jours, ce sont ces prétendus avocats des ouvriers, ces réformistes, ces dictateurs du mouvement ouvrier qui ont détourné, trompé et assassiné les prolétaires. De la Commune de Paris aux soviets d’Espagne en passant par la révolution russe et européenne de 1917-1923, l’ennemi direct des travailleurs était drapé dans le socialisme, le communisme et le syndicalisme.

Cela ne signifie pas que les idées de Marx, Engels, Lénine et Trotsky soient à jeter aux chiens et que le prolétariat ne dispose plus d’aucune boussole. Car ce n’est pas ces idées que défendaient la social-démocratie, le stalinisme ni les dirigeants collaborationnistes du mouvement syndical.

Un autre mythe parcourt le mouvement ouvrier : celui de la politique, domaine prétendu inabordable pour les prolétaires qui devraient se contenter, en guise de participation politique, à voter de temps en temps aux élections organisées par les classes dirigeantes…

S’il est vrai que les prolétaires ne participent massivement à la vie politique qu’au cours d’épisodes révolutionnaires, ils peuvent devenir les vrais décideurs de la société et c’est exactement ce que craignent les classes dirigeantes.

Les Communes, les conseils, les soviets, les comités, les coordinations, les assemblées générales, etc., sont les multiples noms d’une seule réalité qui fait partie de l’Histoire : la participation politique et révolutionnaire des masses travailleuses à la direction politique de la société.

Les grandes révolutions sociales, avant même la grande vague de révolutions bourgeoises, ont toujours amené les masses à faire elles-mêmes de la politique. Aujourd’hui encore, la première idée qui distingue les révolutionnaires et les faux radicaux, c’est justement cette participation politique des masses à la politique par le biais d’organisations autonomes des prolétaires et pas seulement par la voie des institutions de la vieille société qui ne permet nullement aux opprimés d’exprimer véritablement leurs perspectives propres.

Il n’existe pas de programme politique s’adressant véritablement aux travailleurs qui ne consiste pas d’abord dans l’affirmation de cette capacité des travailleurs de mettre en place ces organisations de masse, dans les quartiers et les entreprises, par delà les divisions de catégories, de professions, d’entreprise ou de site, de nationalité, d’origine, de sexe, de papiers, d’emploi ou de chômage, de CDD ou de CDI…

Quant au programme révolutionnaire vivant, ce que nous appelons le parti révolutionnaire, il n’est pas un but en soi et ne peut développer ses perspectives que si les prolétaires redonnent naissance à leurs propres organisations de classe, comités ou conseils de travailleurs et de chômeurs. C’est au sein de ces organisations que peuvent se discuter l’état de la société, les tâches immédiates, les objectifs de lutte des prolétaires et les perspectives de la société d’avenir.

Tant que les travailleurs se confieront d’une part aux centrales syndicales, pour la défense de leurs intérêts quotidiens, d’un côté, et de l’autre aux élections mises en place dans le cadre des institutions bourgeoises, il n’y a pas d’avenir pour les exploités. Les centrales syndicales et les partis politiques de gauche (parmi lesquels certains sont la gauche de la gauche) peuvent radicaliser leurs mots d’ordre, leurs revendications ou leurs actions, mais ils ne se transformeront jamais en véritables adversaires du système d’exploitation.

Tout cet édifice mensonger des classes dirigeantes est fondé sur un mythe selon lequel les peuples seraient des moutons destinés à suivre leur berger qui les sauverait de la menace des loups. Mais tous les bergers n’ont-ils pas comme objectif final d’amener les peuples-moutons à l’abattoir.

La grande capacité des classes dirigeantes consiste à inventer de faux ennemis, pour que les prolétaires ne voient pas qui sont leurs vrais ennemis.

Plus la société s’enfonce, plus ces faux ennemis sont mis en avant. De plus en plus, la société bourgeoise pousse à la violence contre des faux adversaires qu’il s’agisse, en Occident, des Musulmans, des pays « émergents » comme la Chine ou des jeunes des banlieues.

La violence sociale, la bourgeoisie et l’Etat ont toujours choisi de la canaliser contre une fraction des opprimés eux-mêmes. Ils prétendent avoir combattu les pogromes, les génocides alors que c’est eux qui les ont organisé !

Plus le système se révèlera incapable de maintenir la fiction de sa pérennité, plus il va préparer de tels avenirs barbares.

Le dernier mythe fondateur de cette société est celui d’un intérêt général planant au-dessus des classes sociales, mettant les institutions étatiques au service de tous, permettant des transformations décidées en commun de manière démocratique, des réformes progressives, des intérêts collectifs communs aux exploiteurs et aux exploités et qui permettraient d’éviter les révolutions sociales et les guerres civiles. Le caractère de classe de l’Etat est l’objet des plus grands mensonges de la société capitaliste. Jamais l’intérêt d’une poignée de profiteurs, avec un organisme centralisateur oppressif et assassin, n’a autant été transfiguré en défenseur d’un soi-disant intérêt général, qui serait commun à toutes les classes sociales. Jamais l’hypocrisie sociale n’aura été portée à un tel extrême : les pires assassins transformés en défenseurs des droits de l’homme, les pires contre-révolutionnaires de l’impérialisme allant jusqu’à se revendiquer des révolutions du monde arabe, les Etats qui massacrent les peuples prétendant mener des guerres pour défendre les peuples…

Bien sûr, la société actuelle peut prétendre avoir pourfendu le « mythe du communisme », pour éradiquer le risque de son propre renversement. Mais elle s’est bien gardée d’affronter la réalité de sa propre situation. Il est toujours interdit de dire où en sont réellement les finances des Etats, des banques centrales, des grandes banques et des grands trusts. Les capitalistes, eux-mêmes, parlent de l’opacité actuelle du système et de l’absence de vision au long terme, manière douce de dire qu’ils ne croient nullement en l’avenir de leur propre système. Le voilà le véritable mythe social. Quant au communisme, cela n’a jamais été, dans sa version marxiste et non utopiste, non stalinienne par conséquent, l’image d’une société idéale modélisée par avance. Le communisme n’a jamais que l’étude des combats de classe et de leurs leçons historiques menant à une compréhension des étapes des rapports de classe et de leur transformation du mode d’appropriation sociale des moyens de production. Le mythe pseudo-communiste n’a été inventé que par des forces hostiles au prolétariat comme la bureaucratie stalinienne. Ce qui est tombé n’est donc rien d’autre qu’une figure grimaçante qui n’a jamais rien eu à voir avec la conception révolutionnaire de Marx à Lénine et Trotsky.

Nous n’avons pas besoin de mythifier ni le communisme, ni les révolutionnaires, ni la classe révolutionnaire elle-même. Nous sommes les partisans de l’idée que seule la vérité est révolutionnaire. Les militants révolutionnaires n’ont rien à perdre à affronter la vérité en face, même si celle-ci leur présente un mur dur à escalader et que leurs petites compétences semblent bien insuffisantes pour une telle difficulté. Nous n’avons, comme richesses, comme force, que notre confiance dans l’avenir de l’humanité et notre enthousiasme à œuvrer pour cet avenir, mais c’est déjà bien assez.

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  • Nous n’avons pas besoin de mythifier ni le communisme, ni les révolutionnaires, ni la classe révolutionnaire elle-même. Nous sommes les partisans de l’idée que seule la vérité est révolutionnaire. Les militants révolutionnaires n’ont rien à perdre à affronter la vérité en face, même si celle-ci leur présente un mur dur à escalader et que leurs petites compétences semblent bien insuffisantes pour une telle difficulté. Nous n’avons, comme richesses, comme force, que notre confiance dans l’avenir de l’humanité et notre enthousiasme à œuvrer pour cet avenir, mais c’est déjà bien assez.

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