Accueil > 13- ART ET REVOLUTION - ART AND REVOLUTION > Discussion sur l’art

Discussion sur l’art

mardi 16 octobre 2012, par Robert Paris

Discussion sur l’art

Samuel

Je ne comprends bien pas la notion qui est actuellement employée pour parler d’art comme d’un domaine bien particulier qui englobe des objets aussi différents dans leur mode d’expression, dans leur but de fabrication, dans leur style et dans l’effet qu’ils suscitent. Pourquoi s’extasier par exemple, pourquoi s’agenouiller avec émotion devant des « objets d’arts » issus d’une exploitation cruelle des exploités et opprimés de la part des classes dirigeantes il y a souvent 1000 ans, 2000 ans ou 3000 mille ans ? Par exemple, les monuments dans le monde entier, des pyramides aux têtes de chefs olmèques, des immenses Bouddhas aux grandes cathédrales et aux peintures naïves de la « vierge », etc, etc… Ces monuments à la gloire du dictateur et des classes dirigeantes que ce chef d’Etat représente sont-ils des chefs d’œuvre d’art ? Ils n’avaient souvent comme fonction que de susciter le respect et la peur de la part des classes opprimées dont les classes dirigeantes craignaient les explosions de colère. Et les « œuvres » religieuses cherchaient à cultiver le fatalisme et à donner aux opprimés un peu d’opium. Quelle raison devrait nous pousser à entrer en admiration devant ces temples dédiés à la tromperie et ces monuments à la gloire des grands exploiteurs et des grands assassins ? Et quel est le point commun entre ces chefs d’œuvres et un objet d’art tel qu’une peinture de Chagall, de Picasso, etc, etc...

Robert

Tu abordes la question de l’art par les buts de ceux qui ont commandé les œuvres en question et les ont éventuellement payées. Mais il conviendrait d’abord de noter que, si ces dictateurs ou exploiteurs divers l’ont fait, c’est qu’ils comptaient sur l’émotion que l’œuvre en question suscite auprès d’un large public. Et justement on commence là à toucher la notion d’art. Il faudrait aussi noter que très peu d’autres personnes seraient capables de concevoir et de créer quelque chose d’équivalent et que c’est très difficilement imitable et on commence à entrevoir la notion d’artiste, notion issue de celle d’artisan. L’œuvre d’art est d’une grande beauté aux yeux d’un grand nombre de gens. Elle passe même les époques. Elle fait impression sur des gens qui n’ont même plus la moindre idée des buts pour lesquels ces œuvres avaient été réalisées. Elle fait donc appel largement à un sentiment humain qui dépasse les époques, les styles, les régimes et les systèmes sociaux, les idéologies et les croyances, les modes de vie et les mœurs. Il y a là dedans une admiration pour des objets mais ce n’est pas l’admiration que cause un milieu naturel. Il s’agit de l’homme et de propre œuvre, de sa propre imagination, qui n’est pas seulement la répétition de l’œuvre de la nature mais le produit de son bras et également de son cerveau. Il y trouve l’idée de création et il en est touché. Ce n’est pas un sentiment qui se restreint à la religion même si elle s’en est bien servi. Cela dépasse largement cette question. En reproduisant ce qu’il voit et ce qu’il sent, l’homme crée d’autres mondes et il le fait spontanément, dans ses rêves, dans ses récits, dans sa vision de l’histoire : il reconstruit, il arrange, il bricole, il invente. L’art, c’est la même chose mais perfectionné jusqu’à atteindre le niveau professionnel supérieur, celui de l’inimitable. Bien sûr les églises de Venise cultivaient la grandeur de l’oppression des classes dirigeantes de l’empire vénitien et elles s’appuyaient pour cette oppression d’une oligarchie bourgeoise sur l’emprise idéologique du christianisme et toutes les œuvres qui couvent la ville de Venise représentent en partie ce besoin social. Mais, pour y parvenir, les classes dirigeantes et les Doges ont fait appel aux meilleurs des artisans de tous les domaines, leur ont demandé de se surpasser dans leur art, de toucher le public par la beauté, par la grandeur, par l’émotion que leur œuvre suscite. Du coup, on peut se moquer complètement de la thèse chrétienne de la vierge et être touché profondément par un tableau qui représente la naïveté, la douceur ou la générosité de cette femme. L’art a alors dépassé l’artiste et dépassé encore plus largement ceux qui en étaient les mécènes ou les ordonnateurs.

Samuel

L’« homme de cavernes » dessine sur les parois des grottes et on ne sait même pas qui il est ni ce qu’il veut en dessinant, c’est de l’art. L’exposition universelle se déroule à Paris pour glorifier l’industrie capitaliste naissante et construit la tour Eiffel : c’est de l’art. Le centre Pompidou, avec la raffinerie sans pétrole, c’est de l’art. Le Paris Haussmann qui a détruit le Paris médiéval et bâti les immeubles de la bourgeoisie avec des grandes travées pour éviter les insurrections et les barricades, c’est de l’art. Et c’est tout juste si on ne dit pas que l’avion rafale, c’est de l’art ! N’est-ce pas une notion un peu exploitée en tous sens au point que le gouvernement de gauche a déclaré que les propriétaires capitalistes pourraient retirer de leur déclaration de fortune les œuvres d’art ! La politique de tromperie des gauches au pouvoir, j’estime aussi quand c’est bien ciselé et ordonnancé, que cela devient une vraie œuvre d’art…

Robert

Tu vois que tu as assez bien compris la notion d’art puisque tu l’emploies dans des domaines qui pourraient sembler éloignés mais qui font appel à la même admiration pour l’imagination créatrice et à la même capacité très professionnelle, très perfectionnée, capable d’entraîner les autres hommes vers de fortes impressions, vers des sentiments profonds. On peut parler d’art politique. Lénine ne parlait-il pas de l’art de l’insurrection. Il y a un art militaire. Ce n’est pas Trotsky qui dirait le contraire. Il y a de l’art dans la science et on y trouve même dans des formules très abstraites une certaine émotion. Comment comprendre autrement que le monde, non scientifique, s’extasie devant la formule E = m c² sans savoir vraiment à quels problèmes physiques elle fait référence. La beauté de la formule ou du raisonnement est évoquée par des scientifiques et des mathématiciens ! Peintres, architectes, poètes, écrivains, sculpteurs ne sont pas les seuls à réaliser de l’art. Un objet qui n’avait pas pour but d’être de l’art peut en être finalement s’il évoque chez celui qui le regarde un sentiment fort et dévoile des capacités chez son producteur qui nécessitent un artisanat porté à son extrême dans l’effort, dans la compétence, dans le sentiment, dans la traduction de l’émotion, de la pensée, de l’effroi ou de l’amour. L’art s’appuie sur la réalité naturelle et humaine, mais il nous sort aussi de cette réalité par l’imaginaire. Il est objet mais pas seulement objet. Il est aussi dans le sujet qui le regarde. C’est ce regard de l’observateur qui produit le sentiment par l’évocation et qui construit l’œuvre d’art.

Samuel

Tu dis que l’œuvre d’art se détache de la société et des classes qui l’ont produit, mais ce n’est pas si simple. Bien sûr, la musique classique d’époques anciennes touche encore aujourd’hui alors qu’on est loin des sociétés féodales et moyennageuses. Mais elles ne touchent pas de la même manière tous les peuples, suivant les cultures musicales qui ont été les leurs. Il y a une éducation à l’art et, du coup, il y a une société derrière qui pousse à un type ou un autre d’émotion artistique. Il y a des classes dirigeantes qui orientent cet art. Ce n’est pas simplement des sentiments humains purement spontanés. Une culture, ce n’est pas individuel même si l’artiste cultive sa propre individualité.

Robert

Tu soulignes là les multiples contradictions dialectiques de l’art (social et pas social, individuel et pas individuel, économique et pas économique, religieux et pas religieux, etc) et je te suis entièrement dans tes remarques. Cependant, tu remarqueras aussi que les arts dépassent les cultures, pénètrent des sociétés ayant des cultures tout à fait différentes et touchent des peuples qui n’ont pas eu accès au type de conception et de mœurs de ces cultures. Nous pouvons être saisis par l’émotion d’un ancien tableau des aborigènes d’Australie sans avoir rien lu sur leur mode de vie, sans rien savoir sur leur époque et leur société. Il peut y avoir en nous une émotion humaine d’être en contact indirect avec des hommes d’il y a si longtemps. Mais il est aussi possible que nous ressentions le même sentiment que ces hommes. Par exemple, en voyant un morceau de corne dans lequel est sculptée une biche léchant son faon. L’œuvre d’art dépasse les siècles. Eugénie Grandet ne fait pas que retracer une classe sociale bourgeoise comme le reste de l’œuvre de Balzac. Il y a là une grandeur artistique, une grandeur des sentiments humains donc, qui dépasse la description sociale. Je ne renonce pas du tout, en disant cela, à l’idée que toute l’histoire des hommes a pour locomotive la lutte des classes. Seulement dans le train, il n’y a pas que la locomotive…

Samuel

Cependant, pour reprendre ton image de la locomotive, pour le spécialiste de trains, une locomotive d’un genre particulier peut être une œuvre d’art et que cela ne soit nullement le cas aux yeux du grand public. Le mathématicien voit une beauté et un art dans sa matière qui n’est pas nécessairement concevable pour le grand public.

Robert

Là, tu abordes en fait l’art vu par l’artiste ou l’artisan qui n’est pas nécessairement défini ou conçu de la même manière que par le public. Ce n’est pas seulement vrai du spécialiste de trains ou de maths, mais de tous les spécialistes qui font de leur profession un art. Concevoir une activité comme un art, c’est la peaufiner à l’extrême, rechercher une précision folle du détail et un professionnalisme quasi spectaculaire, ce qui nécessite un investissement complet de l’individu dans son activité. L’art s’oppose en la matière à l’amateurisme. Alors que l’art du spectateur ou de l’amateur éclairé est justement de l’amateurisme. Il y a donc à la fois dualité de l’objet et du sujet, dualité de l’objet et du sentiment, de l’idée et de l’œuvre, de l’artiste et du spectateur, etc… Toutes ces dualités sont à la fois des contraires mais indissociables et c’est donc là que réside la dialectique de l’art, dialogue entre l’artiste et la société, entre l’artiste et son œuvre, entre le réel et l’imaginaire.

Samuel

Je pense qu’on ne va pas se comprendre si on dit sans cesse l’art, l’art, l’art sans jamais expliquer ce que c’est. Si on donnait une petite définition de l’art, on ne s’en porterait pas plus mal, même si la dialectique va en faire une définition comprenant son propre opposé !

Robert

Il y a bien entendu, dans une conception dialectique, une grande difficulté à définir car la définition doit comprendre une opposition. Quel serait le contraire de l’œuvre d’art ? ce serait l’œuvre réalisée en grand nombre pour un usage pratique quotidien et sans rechercher une beauté très particulière. C’est donc l’objet courant qui s’oppose à l’objet d’art. En ce qui concerne le métier, artiste fait partie à mon sens du métier d’artisan. Cela suppose une dextérité manuelle spécifique et très spécialisée et que le professionnel a porté à son maximum par un exercice et une recherche permanentes qui supposent qu’il recherche un mode d’expression très personnel et non à faire des œuvres un peu comme tout le monde. Cela donne à l’œuvre un caractère d’unicité et de particularité qui fait qu’on peut distinguer l’œuvre et reconnaître l’auteur si on découvre une de ses œuvres qui n’était pas connue et qui était cachée. Cela n’est pas le cas dans un bon travail très honnête mais qui ne porte pas la signature claire de l’artiste du fait de ses particularités. On peut contrefaire une signature, normalement on ne peut pas vraiment singer réellement un artiste. Un spécialiste reconnaît normalement une œuvre d’une copie. Tout cela est spécifique de l’art. Il y a un style, il y a des couleurs, des détails, des manières qui permettent de s’y retrouver sans aucun doute possible.

Comme je te l’avais dit précédemment l’art est une œuvre individuelle hautement perfectionnée et faisant appel aux sentiments de beauté et d’émotion de celui qui la regarde.

Samuel

Ta définition de l’art n’est sans doute pas pire qu’une autre, mais j’en ai entendu bien d’autres et je me demande comment choisir. Et aussi comment distinguer des autres activités puisqu’on parle d’art culinaire, d’art de la guerre, d’art de l’insurrection, d’art appliqué en physique, d’art de la politique, d’art de la diplomatie, d’art décoratif, d’art publicitaire et j’en passe. Je vois cependant des défauts dans ta définition. L’artiste peut très bien avoir des buts tout à fait différents qu’artistiques. Il se peut même qu’il ait fait une œuvre tout ce qu’il y a de classique et d’utilitaire à son époque et qui, du fait que c’est une époque ancienne dont il reste peu d’objets, soit devenue un objet d’art. Donc le caractère artistiques quasi unique, spécial, se soit perdu ou se soit construit. Ce qui veut dire que l’objet d’art est dans l’œil de celui qui considère que c’est de l’art. Qu’est-ce qui empêche un jour des hommes d’une civilisation supérieure à la nôtre de regarder les restes d’automobiles comme des vieilles statues représentant un ancien dieu comme l’avait imaginé un auteur de science fiction ?

Robert

Tout d’abord, le domaine d’activité n’est pas une frontière étanche, éternelle et inchangée, certes ! D’ailleurs aucune définition ne peut produire ce type de frontière anti-historique, séparant définitivement et de manière infranchissable des domaines. La science, elle-même, n’est pas définissable totalement séparément de la technique, de l’art, de la philosophie pour ne citer que ces domaines proches. Ensuite, il y a les buts de l’artiste qui peuvent être tout autres effectivement. Mais c’est vrai aussi dans d’autres domaines. Darwin avait d’abord un but philosophique et social. Leibniz avait d’abord un but religieux. Imotep a produit la première petite pyramide (un petit temple ayant cette forme) pour inhumer sa femme qu’il adorait et c’est pas hasard que le pharaon en a entendu parler et a repris le thème. Un guerrier peut être spécialiste dans cet art et en même temps rechercher tout autre chose dans la vie. Bien des artistes ne sont nullement des gens branchés par l’histoire de l’art et se moquent même de l’art en général. Ils ont seulement envie, besoin ou le moyen de s’exprimer de cette manière là. C’est souvent un simple moyen matériel d’existence comme un autre. Et ils pensent qu’ils ont eu très tôt ce don et tiennent à le mettre le plus possible en pratique. S’en empêcher serait même une grande souffrance souvent. Mais là, c’est comme pour d’autres sortes d’activité. L’art comme la science ou d’autres domaines peut être guidé par l’intérêt matériel (l’art pour le lard comme on dit), autant que les sciences, la philosophie, la technique ou la production de biens. Cela peut être un moyen entre les mains des classes dirigeantes, des Etats, des villes, des financiers. Cela ne juge pas du résultat. On peut mettre beaucoup d’argent dans une œuvre sans qualité et disposer de peu de moyens et en tirer une véritable œuvre durable.

Samuel

Je voudrais revenir sur ce que tu as appelé l’une des contradictions dialectiques de l’art, celle entre la matière et l’imagination. Selon toi, l’œuvre d’art, si j’ai bien compris, est un mixage de ces deux éléments contradictoires, de la matière et des idées, de la réalité et de l’imagination, des choses réelles et des constructions virtuelles.

Robert

Tu m’as bien compris, mais quelle est ta question ?

Samuel

Je tenais à le vérifier car tu te dis matérialiste et je ne comprends pas comment tu pourrais opposer la matière de l’œuvre et l’idée de l’artiste. Est-ce que tu ne serais finalement pas dualiste, concevant deux mondes, celui de la matière et celui des idées.

Robert
Tu peux effectivement trouver une opposition entre matière et idées, mais ensuite cela se complexifie : tu trouve, en un sens, des idées dans la matière et de la matière dans les idées.

Samuel

J’avoue ne pas te suivre du tout. Quelles idées vois-tu dans la matière ? Et quelle matière dans les idées ?

Robert

Tout d’abord, je suis matérialiste car je pense que la pensée humaine est un sous-produit direct du fonctionnement neuronal et de l’auto-organisation des neurones du cerveau. Il n’y a pas deux mondes, l’un réel, l’autre produit par le cerveau, mais un seul. Mais le cerveau est capable de suppléer aux sens qui interagissent entre le cerveau et le monde extérieur. Pallier, c’est-à-dire connaitre du potentiel. Le potentiel intellectuel n’est pas tout à fait de l’irréel, mais pas non plus de l’actuel. Mais cela n’est pas propre à la pensée. Le monde réel n’est pas seulement le monde actuel auquel on ajouterait le monde passé et, éventuellement, le monde futur. Le réel de la matière, ce sont toutes les potentialités. L’imaginaire peut permettre au cerveau d’accéder à des potentialités que le commun des hommes ne voyait pas. Ce n’est pas de l’idéalisme. Ce n’est pas de la magie. Ce n’est pas une pensée religieuse. C’est un constat continuel de la physique : la particule réelle n’est pas seulement celle que nous pouvons capter mais aussi tous les états potentiels qui l’entourent et ne s’expriment pas encore et, peut-être, ne s’exprimeront pas. Ce n’est pas vrai seulement de la particule mais de toute matière. Le virtuel, le potentiel, sont des états qui n’ont pas lieu actuellement mais existent réellement et sont évocables par la pensée. Sur ce point philosophique, l’art rejoint la science. L’art n’est pas irréel, il est évocation d’une potentialité du réel. Et c’est ainsi que l’idée appartient à la matière et la matière aussi à l’idée, même s’il existe un seul monde qui est la matière (à condition de considérer que c’est la matière… virtuelle du vide !).

Samuel

Oulala ! Cela empire considérablement et nous sommes de plus en plus loin de comprendre si l’art découle de la représentation du réel ou de la représentation des pensées de l’artiste.

Robert

Certes, on ne risque pas de te répondre par oui ou par non. Car les deux ne sont pas diamétralement opposés mais complètement imbriqués. Le réel n’est rien d’autre que le monde dont nous faisons partie et dont nous sommes, en même temps, les observateurs via nos sens. Apparemment, nulle contradiction là dedans puisque nos sens, notre cerveau et le monde, c’est de la matière et des interactions entre éléments matériels. Ce n’est pas aussi simple ! C’est notre cerveau certes qui reconstitue ce que serait cette matière observée, sentie, perçue, mais il le fait à partir d’un mode de construction/reconstruction et non d’un mode simple d’observation directe. Donc, en résumé, nous ne pouvons connaitre le réel qu’à l’aide de notre capacité d’imaginaire, c’est-à-dire de reconstruction pensée du monde réel. En somme, il n’existe qu’un monde, mais il est fait aussi de virtuel (comme on l’a dit précédemment pour la matière et comme on peut le dire aussi pour la pensée). Du coup, l’artiste est bel et bien dans un entremêlement de la matière et du virtuel imaginaire mais ainsi il est comme tous les hommes, comme tous les êtres et même comme toute matière !

Samuel

Je n’obtiendrais pas une réponse simple par oui ou par non, avais tu dit et pour cela tu as tenu parole ! Je ne pourrais donc pas dire que l’art est tout imagination ni dire que c’est une représentation du monde matériel, ni même un peu des deux, mais une espèce de dialectique des contraires : quand l’art imite le réel, il le transforme et quand il cherche à s’en éloigner, il construit du réel. On ne sort donc pas des contradictions, on change seulement de forme de celles-ci dirais-tu….

Robert

N’ironise pas ! Cela ne signifie pas que l’on ne dit rien, qu’on tourne autour du pot. Cela signifie que le complexe existe d’emblée et qu’il change de forme. On ne peut pas avoir une définition sans complexité et ensuite en déduire des théorèmes qui, eux, seront complexes. La définition contient toute la complexité des interactions et des rétroactions, c’est-à-dire toutes les contradictions, mais la dialectique, au lieu d’y voir de l’obscurité, conçoit que c’est là le caractère dynamique du monde.

Samuel

Pourquoi l’art aurait-il besoin de la dialectique ?

Robert

D’abord parce que les contraires sont la palette proposée à son pinceau : contraires des couleurs, contraires des courants artistiques, contraires des paysages, des odeurs, des saveurs, des clairs/obscurs, contraires des sentiments humains, contraires des climats, contraires des moments de la vie, contraires des attractions/répulsions, … Le plein a besoin pour s’exprimer du sentiment du vide, la joie de la tristesse, la lumière de l’obscurité, la jeunesse de la vieillesse et ainsi de suite… Pas de tableau sans ces contrastes. Pas de proportions sans des lignes dans des directions opposées. Sans cesse, l’art se joue des rapports dialectiques de la quantité et de la qualité, des formes et des matières, du mouvement et de l’immobilité. Et aussi du réel et de l’imaginaire. Il imagine un autre réel et ainsi le rend, en un sens réel. Il transfigure le réel et lui donne un sens nouveau. Le spectateur ne voit plus Venise mais il voit le tableau de Canaletto ou, s’il a déjà été à Venise, il ne voit plus le tableau de Canaletto, il se sent à Venise, il sent les odeurs, il sent l’air, il sent les couleurs pastels, il sent les personnes avec lesquelles il y a vécu. Le spectacle qui est devant nous est transformé par le peintre en couleurs, mouvements, profondeurs, douceur, tristesse, parce qu’il est vécu ainsi ou parce que c’est ainsi que l’artiste a voulu le rendre. Il a produit une réalité qui était potentielle. Même s’il n’a rien représenté du tout, si l’art n’est plus du tout figuratif, c’était peut-être les sensations de la visite de Venise qui sont représentées. Chaque être humain fait de même que l’artiste dans sa vie ou dans ses rêves : il construit un monde réel bien à lui.

Samuel

Donc, si je te comprends bien, les artistes ne sont nullement différents de tous les hommes : ils reconstruisent le monde dans leur cerveau, qu’ils soient réveillés ou endormis. Les artistes sont seulement ceux qui ont la capacité de rendre visible leur monde reconstruit aux autres hommes.

Robert

Exactement. Et ils n’ont nullement un fonctionnement différent des autres hommes en ce qui concerne la contradiction dialectique du réel et de l’imaginaire. Ils produisent un monde des possibles. La particularité du rêve est que leur machine à supprimer ce qui ne semble pas rationnel est endormie et que le rêve est particulièrement désordonné et contraire à la logique parfois sans forcément qu’au sein du rêve cela semble absurde. L’artiste dispose des émotions comme des connaissances de la vie du jour mais aussi du rêve, de la divagation, éventuellement du délire personnel qui lui permet d’aller chercher encore plus loin les mondes virtuels que ce cerveau à la dérive est capable de trouver.

Samuel

Là, je suis d’accord que cela est propre à l’art. Mais c’est aussi proche de la psychologie de celui qui est en train de sortir des clous.

Robert

Nous sommes tous des êtres, à la frontière du chaos, proches de nous inventer des histoires irrationnelles. C’est ce qui rend les êtres humains aussi dynamiques et constructifs, même s’ils en semblent plus bizarres et plus délirants. L’art n’est pas loin du délire car l’artiste doit laisser ses sentiments l’emporter et il ne peut en même temps vouloir rester parfaitement rationnel. Dans quel état peut bien être un Bach pensant entendre du ciel les voix de dieu sous forme de partitions musicales qui vont être jouées pendant ensuite des années y compris à des auditeurs complètement étrangers à la croyance religieuse. Il s’abandonne aux imageries musicales que lui lance sont cerveau complètement pris par sa rêverie mystique. Plus Bach part dans les cieux de sa pensée religieuse, plus il parvient à toucher des être humains en chairs et en os qui n’ont même pas nécessairement cette préoccupation ni même la connaissance de la religion qu’il veut exprimer. L’innovation artistique qu’il réalise a complètement besoin du transport mystique pour l’auteur et nullement pour l’auditeur. Il révolutionne la musique tout en défendant l’idéologie d’un conservatisme absolu. Il emmène les êtres humains dans des rèves dont il n’a pas idée car sa musique n’est pas attachée à une réalité matérielle donnée, ni celle de son époque, de ses propres sentiments, de sa religion. Chacun peut ressentir des émotions différentes et être autant transporté par ces airs.

Samuel

Pourtant le matérialisme marxiste n’a-t-il pas affirmé que les pensées sont du domaine du reflet de la réalité matérielle et de ses lois absolument nécessaires et ne peuvent rien créer en dehors de cette réalité matérielle et de ses lois ?

Robert

C’est effectivement une version du marxisme à la mode de Staline. Mais ni Marx, ni Lénine ni Trotsky n’ont jamais rien défendu de pareil. Il ne s’agit pas de nier que le monde soit matériel et obéisse à des lois. Mais ces lois ont besoin pour s’exprimer et pour se révéler du hasard des interactions, du hasard des processus individuels de l’échelon inférieur de cette réalité. Par exemple, l’histoire des sociétés a besoin des histoires au hasard des individus. L’histoire des sciences a besoin des démarches bizarres, étonnantes, curieuses de chaque scientifique mu par des buts aussi étranges et inattendus. La compréhension du monde par l’homme et sa propre compréhension a un besoin pressant d’art.
Le matérialisme du marxisme n’a rien à craindre de notions comme celles d’intuition, de création intellectuelle, d’inspiration, d’imagination, de sensibilité, d’inventivité qui ne vont nullement à l’encontre de l’idée qu’il existe un seul monde et que c’est un monde matériel car ce monde matériel n’est pas un monde figé, toujours égal à lui-même, fondé seulement sur l’actuel, incapable de sauter d’un état à un autre.

Trotsky écrivait dans « Pour un art révolutionnaire indépendant » :

« L’analyse des superstructures idéologiques, qui permet, en dernière instance, de ne voir dans certaines d’entre elles (la religion, la morale) que le reflet pur et simple des conditions économiques de la vie, laisse subsister comme partiellement irréductibles à cette dernière donnée trois facteurs, qui contribuent pour une part autonome à la modification progressive de la société. Il s’agit de l’art, de la science et de la poursuite de l’idéal social sous sa forme la plus élevée. Certes ces trois domaines ne peuvent aucunement prétendre se soustraire à l’emprise de la puissance prépondérante qui revient, en fin de compte, au développement économique. Mais en eux trouvent à se traduire des aspirations distinctes, fondamentales, capables de réagir sur la base de la nécessité matérielle et de fournir certains éléments complémentaires d’appréciation. Toute autre conception historique verserait inévitablement dans le fatalisme. (…) La révolution communiste n’a pas la crainte de l’art. (…) La vocation artistique fait de l’artiste son allié prédisposé. Le mécanisme de sublimation, qui intervient en pareil cas, et que la psychanalyse a mis en évidence, a pour objet de rétablir l’équilibre rompu entre le « moi » cohérent et les éléments refoulés. Ce rétablissement s’opère au profit de l’ « idéal du moi » qui dresse contre la réalité présente, insupportable, les puissances du monde intérieur, du « soi », communes à tous les hommes et constamment en voie d’épanouissement dans le devenir. Le besoin d’émancipation de l’esprit n’a qu’à suivre son cours naturel pour être amené à se fondre et à se retremper dans cette nécessité primordiale : le besoin d’émancipation de l’homme. Il s’ensuit que l’art ne peut consentir sans déchéance (cesser d’être lui même) à se plier à aucune directive étrangère et à venir docilement remplir les cadres que certains croient pouvoir lui assigner, à des fins pragmatiques, extrêmement courtes. Mieux vaut se fier au don de préfiguration qui est l’apanage de tout artiste authentique, qui implique un commencement de résolution virtuel de résolution des contradictions les plus graves de son temps et oriente la pensée de ses contemporains vers l’urgence de l’établissement d’un ordre nouveau. Pour l’art, dit Marx, on sait que des périodes de floraison déterminées ne sont aucunement en rapport avec le développement général de la société, ni, par conséquent, avec la base matérielle, l’ossature, en quelque sorte, de son organisation. L’idée que Marx s’est faite du rôle de l’écrivain exige, de nos jours, un rappel rigoureux. Il est clair que cette idée doit être étendue, sur le plan artistique et scientifique, aux diverses catégories de producteurs et de chercheurs. « L’écrivain, dit il, doit naturellement gagner de l’argent pour pouvoir vivre et écrire, mais il ne doit en aucun cas vivre et écrire pour gagner de l’argent... L’écrivain ne considère aucunement ses travaux comme un moyen. Ils sont des buts en soi, ils sont si peu un moyen pour lui-même et pour les autres qu’il sacrifie au besoin son existence à leur existence... La première condition de la liberté de la presse consiste à ne pas être un métier. » Il est plus que jamais de circonstance de brandir cette déclaration contre ceux qui prétendent assujettir l’activité intellectuelle à des fins extérieures à elle-même et, au mépris de toutes les déterminations historiques qui lui sont propres, régenter, en fonction de prétendues raisons d’Etat, les thèmes de l’art. Le libre choix de ces thèmes et la non restriction absolue en ce qui concerne le champ de son exploration constituent pour l’artiste un bien qu’il est en droit de revendiquer comme inaliénable. Hors évidemment, le cas où son œuvre prendrait un sens hostile à la cause de l’émancipation humaine, ou entrerait en contradiction avec le matérialisme dialectique qui en est la clé, il ne doit avoir à répondre que devant son propre tribunal des formes de tentation variables qu’il subit. En matière de création artistique, il importe essentiellement que l’imagination échappe à toute contrainte, ne se laisse sous aucun prétexte imposer de filière. »

Puisqu’on est partis à donner la parole aux anciens dans notre débat, j’y rajouterais une autre citation de Trotsky dans un courrier de juin 1938 intitulé « L’art et la révolution » :

« De façon générale, l’homme exprime dans l’art son exigence de l’harmonie et de ta plénitude de l’existence c’est à dire du bien suprême dont le prive justement la société de classe. C’est pourquoi la création artistique est toujours un acte de protestation contre la réalité, conscient ou inconscient, actif ou passif, optimiste ou pessimiste. Tout nouveau courant en art a commencé par la révolte. La force de la société bourgeoise a été, pendant de longues périodes historiques, de se montrer capable de discipliner et d’assimiler tout mouvement « subversif » en art et de l’amener jusqu’à la « reconnaissance » officielle, en combinant pressions et exhortations, boycottages et flatteries. Mais une telle reconnaissance signifiait au bout du compte l’approche de l’agonie. Alors, de l’aile gauche de l’école légalisée ou de la base, des rangs de la nouvelle génération de la bohème artistique, s’élevaient de nouveaux courants subversifs qui, après quelque temps, gravissaient à leur tour les degrés de l’académie.

C’est par de telles étapes que sont passés le classicisme, le romantisme, le réalisme, le symbolisme, l’expressionnisme, le mouvement décadent... Mais le mariage entre l’art et la bourgeoisie ne demeura, sinon heureux, du moins stable qu’aussi longtemps que dura l’ascension de la société bourgeoise, qu’aussi longtemps qu’elle se montra capable de maintenir politiquement ci moralement le régime de la « démocratie », non seulement en lâchant la bride aux artistes, en les gâtant de toutes sortes de manière, mais également en faisant quelques aumônes aux couches supérieures de la classe ouvrière, en domestiquant les syndicats et les partis ouvriers. Tous ces phénomènes sont à mettre sur le même plan.
(…)

L’art, comme la science, non seulement n’a pas besoin d’ordres, mais il ne peut, par sa nature même, les supporter. La création artistique a ses lois, même lorsqu’elle est consciemment au service du mouvement social. La création intellectuelle est incompatible avec le mensonge, la falsification et avec l’opportunisme. L’art peut être un grand allié de la révolution, pour autant qu’il reste fidèle à lui-même. Les poètes, les artistes, les sculpteurs, les musiciens, trouveront eux-mêmes leurs voies et leurs méthodes, si les mouvements libérateurs des classes et des peuples opprimés dispersent les nuages du scepticisme et du pessimisme qui assombrissent en ce moment l’horizon de l’humanité. »

Et dans « Littérature et révolution », Trotsky rajoute :

« Il est ridicule, absurde, et même stupide au plus haut point, de prétendre que l’art restera indifférent aux convulsions de notre époque. Les événements sont préparés par les hommes, ils sont faits par les hommes, ils réagissent sur les hommes et les changent. L’art, directement ou indirectement, reflète la vie des hommes qui font ou vivent les événements. C’est vrai pour tous les arts, du plus monumental au plus intime. Si la nature, l’amour ou l’amitié n’étaient plus liés à l’esprit social d’une époque, la poésie lyrique aurait depuis longtemps cessé d’exister. Un bouleversement profond dans l’histoire, c’est-à-dire un réalignement des classes dans la société, ébranle l’individualité, situe la perception des thèmes fondamentaux de la poésie lyrique sous un angle nouveau et sauve ainsi l’art d’une éternelle répétition.

Mais " l’esprit " d’une époque ne travaille-t-il pas de façon invisible et indépendamment de la volonté subjective ? Certes, en dernière analyse, cet esprit se reflète chez tous chez ceux qui l’acceptent et l’incarnent aussi bien que chez ceux qui luttent désespérément contre lui ou qui s’efforcent de se dérober à lui, mais ceux qui détournent la tête dépérissent peu à peu, ceux qui résistent sont tout au plus capables de ranimer telle ou telle flamme archaïque, alors que l’art nouveau, posant de nouveaux jalons et élargissant le lit de la création artistique, pourra être créé par ceux-là seuls qui font corps avec leur époque. Si l’on traçait une courbe allant de l’art actuel à l’art socialiste de l’avenir, on pourrait dire que nous avons à peine dépassé aujourd’hui le stade de la préparation de cette préparation même. »

Samuel

Voilà pour Trotsky. Et qu’en disait Marx ?

Robert

Marx considérait l’art comme activité humaine et non comme pensée isolée d’une activité réelle. La réalité de la création artistique provient du fait que l’homme est acteur du monde qu’il transforme en même temps qu’il appartient à ce monde.

Dans ses « Thèses sur Feuerbach », Marx remarquait que « Le principal défaut, jusqu’ici, du matérialisme de tous les philosophes – y compris celui de Feuerbach est que l’objet, la réalité, le monde sensible n’y sont saisis que sous la forme d’objet ou d’intuition, mais non en tant qu’activité humaine concrète, en tant que pratique, de façon non subjective. C’est ce qui explique pourquoi l’aspect actif fut développé par l’idéalisme, en opposition au matérialisme, — mais seulement abstraitement, car l’idéalisme ne connaît naturellement pas l’activité réelle, concrète, comme telle. Feuerbach veut des objets concrets, réellement distincts des objets de la pensée ; mais il ne considère pas l’activité humaine elle-même en tant qu’activité objective. (…) La question de savoir s’il y a lieu de reconnaître à la pensée humaine une vérité objective n’est pas une question théorique, mais une question pratique. C’est dans la pratique qu’il faut que l’homme prouve la vérité, c’est-à-dire la réalité, et la puissance de sa pensée, dans ce monde et pour notre temps. La discussion sur la réalité ou l’irréalité d’une pensée qui s’isole de la pratique, est purement scolastique. »

Par ailleurs, Marx refusait de considérer les activités dites intellectuelles indépendamment du reste du fonctionnement de la société et montrait ainsi le lien entre l’art et la société :

« Dans l’idéologie allemande, il rappelait que le développement politique, juridique, philosophique, religieux, littéraire, artistique, etc, est fondé sur le développement économique. »

« La chose est claire : tant que le travail humain était encore si peu productif qu’il ne fournissait que peu d’excédent au-delà des moyens de subsistance nécessaires, l’accroissement des forces productives, l’extension du trafic, le développement de l’État et du droit, la fondation de l’art et de la science n’étaient possibles que grâce à une division renforcée du travail, qui devait forcément avoir pour fondement la grande division du travail entre les masses pourvoyant au travail manuel simple et les quelques privilégiés adonnés à la direction du travail, au commerce, aux affaires de l’État et plus tard aux occupations artistiques et scientifiques. La forme la plus simple, la plus naturelle, de cette division du travail était précisément l’esclavage. (…) Sans esclavage, pas d’État grec, pas d’art et de science grecs ; sans esclavage, pas d’Empire romain. »

L’art des sociétés modernes était donc pour lui un sous-produit de la société de classe.

Si la société de classe lui apparaissait comme une condition du développement artistique notamment, elle finissait par y être une entrave :

« Le maintien d’une classe dominante se révèle chaque jour davantage un obstacle au développement des forces productives industrielles, ainsi qu’à celui de la science, de l’art et en particulier des formes affinées de la vie sociale. »

Il affirmait également à propos de cet exemple :

« Prenons, par exemple l’art grec... Il est bien connu que la mythologie grecque fut non seulement l’arsenal de l’art grec, mais aussi sa terre nourricière. L’idée de la nature et des rapports sociaux qui alimentent l’imagination grecque, et donc la (mythologie) grecque, est-elle compatible avec les métiers à filer automatiques, les locomotives et le télégraphe électrique ? Qu’est-ce que Vulcain auprès de Roberts and Co, Jupiter auprès du paratonnerre et Hermès à côté du Crédit mobilier ? Toute mythologie dompte, domine, façonne les forces de la nature, dans l’imagination, et par l’imagination ; elle disparaît donc, au moment où ces forces sont dominées réellement. (...) L’art grec suppose la mythologie grecque, c’est-à-dire la nature et les formes sociales, déjà élaborées au travers de l’imagination populaire d’une manière inconsciemment artistique. Ce sont là ses matériaux. Non pas une mythologie quelconque, c’est-à-dire une façon quelconque de transformer inconsciemment la nature en art (ici le mot nature désigne tout ce qui est objectif, y compris la société). (...) Mais en tout cas, il fallait une mythologie. En aucun cas, l’art grec ne pouvait éclore dans une société qui exclut tout rapport mythologique avec la nature et qui demande, par conséquent, à l’artiste une imagination ne s’inspirant pas de la mythologie. »

Marx montrait que l’art aussi est traité comme un produit sous le capitalisme :

« L’objet d’art - comme tout autre produit - crée un public apte à comprendre l’art et à jouir de la beauté. La production ne produit donc pas seulement un objet pour le sujet, mais aussi un sujet pour l’objet. La production produit donc la consommation 1º en lui fournissant la matière ; 2º en déterminant le mode de consommation ; 3º en faisant naître chez le consommateur le besoin de produits posés d’abord simplement par elle sous forme d’objets. Elle produit donc l’objet de la consommation, le mode de consommation, l’instinct de la consommation. De même la consommation engendre l’aptitude du producteur en le sollicitant sous la forme d’un besoin déterminant le but de la production."

Et Marx considérait que l’avenir appartenait à des hommes tous transformés en artistes :

« La concentration exclusive du talent artistique dans quelques individus, et son étouffement dans les grandes masses, qui en découle, est un effet de la division du travail. Si même, dans certaines conditions sociales, chacun pouvait devenir un peintre excellent, cela n’empêcherait pas chacun d’être un peintre original, de sorte qu’ici également la différence entre le travail « humain » et le travail « unique » se ramène à une absurdité. Avec une organisation communiste de la société prennent fin en tous les cas l’assujettissement de l’artiste à l’étroitesse locale et nationale, qui provient uniquement de la division du travail, et l’assujettissement de l’individu à tel art déterminé qui en fait exclusivement un peintre, un sculpteur, etc. ; ces noms seuls expriment déjà l’étroitesse de son développement professionnel et sa dépendance de la division du travail. Dans une société communiste, il n’y a pas des peintres, mais tout au plus des hommes qui, entre autres, font de la peinture. »

Samuel

Effectivement, le statut de l’objet d’art pose problème sous le capitalisme et à bien des égards. Sur quelles bases, le capitalisme peut-il transformer l’objet en valeur et comment lui attribuer cette valeur ? Qu’est-ce qui permet de dire que ce vase ancien vaut trois fois plus cher que ce tableau ? La notion de valeur-travail est-elle valable dans ce cas ?

Robert

Non, bien sûr, il n’y a pas que pour l’oeuvre d’art que l’objet ne vaut pas le temps de travail moyen nécessaire à sa fabrication. C’est le cas de tous les objets qui sont uniques ou réalisés à un tout petit nombre d’exemplaires. Ils peuvent acquérir par leur pénurie une valeur spéculative. Ils font partie du marché de ce qui s’achète et se vend et peuvent devenir infiniment plus cher que leur coût car leur valeur ne dépend alors que de la spéculation sur la possibilité du prix de revente ce qui est illimité. Par contre, comme le soulignait Marx plus haut, les autres mécanismes du capitalisme fonctionnent pour l’œuvre d’art comme pour les autres objets du marché capitaliste. Ce dernier s’y entend à fabriquer des besoins pour écouler ses produits, les œuvres d’art comme le reste. Et il est fort possible que le marché impose des œuvres qui n’auraient jamais eu de succès sans lui. Mais, même avant le marché capitaliste, le goût des personnes pour telle ou telle œuvre d’art n’était pas seulement un goût personnel mais un goût social, à la fois cultivé et même inventé par la société. On le voit bien avec les modes lancées par tel ou tel.

Samuel

Il n’y a donc aucune valeur objective à l’œuvre d’art ?

Robert

Les années jouent quand même un rôle pour donner une valeur artistique car si une œuvre traverse les siècles, c’est qu’elle est autre chose qu’une mode, qu’elle touche ‘homme au plus profond de ses sentiments.

Samuel

Pleurer devant un chef d’œuvre suite à des sentiments forts qui parlent en profondeur aux individus ou à la collectivité, qu’est-ce que ce que ce sentiment ?

La suite

Autres dialogues sur le site :

Entretien entre Diderot et D’Alembert

Discussion entre Einstein et Freud

Discussion sur la signification de l’expérience révolutionnaire russe

Dialogue sur la discontinuité, le déterminisme et la dialectique

Une discussion sur la crise actuelle

Dialogue sur la situation au Mali et les perspectives pour le peuple travailleur

Dialogue sur la crise de la société grecque antique

Un débat entre NPA, LO, Fraction et VdT

Un débat dans l’extrême gauche sur le Forum Marxiste Révolutionnaire

Suite du dans l’extrême gauche sur le Forum Marxiste Révolutionnaire

Débat sur la Libye

Discussions sur l’Histoire

Discussion sur le programme de transition

Discussion sur la question noire aux USA

Discussion de Trotsky avec le SWP

Discussion avec les visiteurs américains du S.W.P.

Suite de la discussion avec des militants du S.W.P.

Discussion sur l’organisation des Noirs américains

A venir :

Discussion sur les syndicats et le syndicalisme

Discussion sur l’Etat

Echanges sur la révolution au Maghreb et dans le monde arabe

Débat sur le nucléaire

D’autres débats

Messages

  • ... La première condition de la liberté de la presse consiste à ne pas être un métier.

  • Samuel

    Voilà pour Trotsky. Et qu’en disait Marx ?

    Robert

    Marx considérait l’art comme activité humaine et non comme pensée isolée d’une activité réelle. La réalité de la création artistique provient du fait que l’homme est acteur du monde qu’il transforme en même temps qu’il appartient à ce monde.

    Dans ses « Thèses sur Feuerbach », Marx remarquait que « Le principal défaut, jusqu’ici, du matérialisme de tous les philosophes – y compris celui de Feuerbach est que l’objet, la réalité, le monde sensible n’y sont saisis que sous la forme d’objet ou d’intuition, mais non en tant qu’activité humaine concrète, en tant que pratique, de façon non subjective. C’est ce qui explique pourquoi l’aspect actif fut développé par l’idéalisme, en opposition au matérialisme, — mais seulement abstraitement, car l’idéalisme ne connaît naturellement pas l’activité réelle, concrète, comme telle. Feuerbach veut des objets concrets, réellement distincts des objets de la pensée ; mais il ne considère pas l’activité humaine elle-même en tant qu’activité objective. (…) La question de savoir s’il y a lieu de reconnaître à la pensée humaine une vérité objective n’est pas une question théorique, mais une question pratique. C’est dans la pratique qu’il faut que l’homme prouve la vérité, c’est-à-dire la réalité, et la puissance de sa pensée, dans ce monde et pour notre temps. La discussion sur la réalité ou l’irréalité d’une pensée qui s’isole de la pratique, est purement scolastique. »

    Par ailleurs, Marx refusait de considérer les activités dites intellectuelles indépendamment du reste du fonctionnement de la société et montrait ainsi le lien entre l’art et la société :

    « Dans l’idéologie allemande, il rappelait que le développement politique, juridique, philosophique, religieux, littéraire, artistique, etc, est fondé sur le développement économique. »

    « La chose est claire : tant que le travail humain était encore si peu productif qu’il ne fournissait que peu d’excédent au-delà des moyens de subsistance nécessaires, l’accroissement des forces productives, l’extension du trafic, le développement de l’État et du droit, la fondation de l’art et de la science n’étaient possibles que grâce à une division renforcée du travail, qui devait forcément avoir pour fondement la grande division du travail entre les masses pourvoyant au travail manuel simple et les quelques privilégiés adonnés à la direction du travail, au commerce, aux affaires de l’État et plus tard aux occupations artistiques et scientifiques. La forme la plus simple, la plus naturelle, de cette division du travail était précisément l’esclavage. (…) Sans esclavage, pas d’État grec, pas d’art et de science grecs ; sans esclavage, pas d’Empire romain. »

    L’art des sociétés modernes était donc pour lui un sous-produit de la société de classe.

    Si la société de classe lui apparaissait comme une condition du développement artistique notamment, elle finissait par y être une entrave :

    « Le maintien d’une classe dominante se révèle chaque jour davantage un obstacle au développement des forces productives industrielles, ainsi qu’à celui de la science, de l’art et en particulier des formes affinées de la vie sociale. »

    Il affirmait également à propos de cet exemple :

    « Prenons, par exemple l’art grec... Il est bien connu que la mythologie grecque fut non seulement l’arsenal de l’art grec, mais aussi sa terre nourricière. L’idée de la nature et des rapports sociaux qui alimentent l’imagination grecque, et donc la (mythologie) grecque, est-elle compatible avec les métiers à filer automatiques, les locomotives et le télégraphe électrique ? Qu’est-ce que Vulcain auprès de Roberts and Co, Jupiter auprès du paratonnerre et Hermès à côté du Crédit mobilier ? Toute mythologie dompte, domine, façonne les forces de la nature, dans l’imagination, et par l’imagination ; elle disparaît donc, au moment où ces forces sont dominées réellement. (...) L’art grec suppose la mythologie grecque, c’est-à-dire la nature et les formes sociales, déjà élaborées au travers de l’imagination populaire d’une manière inconsciemment artistique. Ce sont là ses matériaux. Non pas une mythologie quelconque, c’est-à-dire une façon quelconque de transformer inconsciemment la nature en art (ici le mot nature désigne tout ce qui est objectif, y compris la société). (...) Mais en tout cas, il fallait une mythologie. En aucun cas, l’art grec ne pouvait éclore dans une société qui exclut tout rapport mythologique avec la nature et qui demande, par conséquent, à l’artiste une imagination ne s’inspirant pas de la mythologie. »

    Marx montrait que l’art aussi est traité comme un produit sous le capitalisme :

    « L’objet d’art - comme tout autre produit - crée un public apte à comprendre l’art et à jouir de la beauté. La production ne produit donc pas seulement un objet pour le sujet, mais aussi un sujet pour l’objet. La production produit donc la consommation 1º en lui fournissant la matière ; 2º en déterminant le mode de consommation ; 3º en faisant naître chez le consommateur le besoin de produits posés d’abord simplement par elle sous forme d’objets. Elle produit donc l’objet de la consommation, le mode de consommation, l’instinct de la consommation. De même la consommation engendre l’aptitude du producteur en le sollicitant sous la forme d’un besoin déterminant le but de la production."

    Et Marx considérait que l’avenir appartenait à des hommes tous transformés en artistes :

    « La concentration exclusive du talent artistique dans quelques individus, et son étouffement dans les grandes masses, qui en découle, est un effet de la division du travail. Si même, dans certaines conditions sociales, chacun pouvait devenir un peintre excellent, cela n’empêcherait pas chacun d’être un peintre original, de sorte qu’ici également la différence entre le travail « humain » et le travail « unique » se ramène à une absurdité. Avec une organisation communiste de la société prennent fin en tous les cas l’assujettissement de l’artiste à l’étroitesse locale et nationale, qui provient uniquement de la division du travail, et l’assujettissement de l’individu à tel art déterminé qui en fait exclusivement un peintre, un sculpteur, etc. ; ces noms seuls expriment déjà l’étroitesse de son développement professionnel et sa dépendance de la division du travail. Dans une société communiste, il n’y a pas des peintres, mais tout au plus des hommes qui, entre autres, font de la peinture

  • « Lorsque [l’art] ne va pas au-delà de la simple imitation, il est incapable de nous donner l’impression d’une réalité vivante ou d’une vie réelle : tout ce qu’il peut nous offrir, c’est une caricature de la vie. »

    Hegel, Esthétique, 1832 (posth.)

  • « Le beau se définit [...] comme la manifestation sensible de l’idée. »

    Hegel, Esthétique, 1832 (posth.)

  • "Rien ne nous empêche de dire que, comparée à cette réalité, l’apparence de l’art est illusoire ; mais l’on peut dire avec autant de raison que ce que nous appelons réalité est une illusion plus forte, une apparence plus trompeuse que l’apparence de l’art."

    Hegel, Esthétique.

  • « L’Art est ce qui révèle à la conscience la vérité sous forme sensible. »

    Hegel, Georg Wilhelm Friedrich

  • L’artiste ne tient pas, par son œuvre, à nous donner une idée de l’objet qu’il nous présente. Nous n’avons pas besoin de regarder ces tableaux pour savoir ce que c’est que les raisins, les fleurs, les cerfs, les arbres, les dunes, la mer, le soleil, le ciel, les ornements et les décors des ustensiles de la vie quotidienne, les chevaux, les guerriers, les paysans, nous savons également ce que c’est fumer, arracher des dents, et les scènes domestiques de tout genre et de toute nature nous sont on ne peut plus familières. Aussi bien n’est-ce pas le contenu réel de ces tableaux qui est fait pour nous charmer, mais l’apparence des objets, abstraction faite de leur usage et de leur destination réelle. Par la beauté, cette apparence se trouve fixée comme telle, et l’art consiste dans la maîtrise avec laquelle on sait représenter les mystères que recèlent les apparences des phénomènes extérieurs, considérées pour elles-mêmes. L’art consiste surtout à saisir les traits momentanés, fugitifs et changeants du monde et de sa vie particulière, pour les fixer et les rendre durables"

    Hegel

  • Que penses-tu de ma définition de l’art ?

    Il faut déjà signaler l’hétérogénéité de ce terme, les termes d’artisan, d’artiste ont la même racine. A été appelé artisan, celui qui met son art au service d’autrui (XVIe siècle). A été appelé artiste, celui qui utilise son art pour le plaisir (fin XVIIe siècle)

    Je définirais l’art comme l’expression d’un groupe social, par divers voies de communication. L’artisan devient artiste au moment où son œuvre constitue un modèle de référence à l’ensemble des gens du même métier. L’artisan travaillant sur le matériel, il exprime tout un tas de conceptions sociales qui s’exprime dans son œuvre. Il en est de même pour tous les métiers, est dit art tout ce qui exprime à un haut niveau et dans sa globalité les conceptions d’un ou de plusieurs groupes sociaux. Donc dans le monde moderne, le niveau de production étant élevé, les œuvres d’art se diversifient au travers le perfectionnement des techniques de métiers.

    Mais dans une société diversifiée, où les groupes sont divers de par la grande histoire de l’humanité, la notion d’art est contestée par tout groupe social qui se sent menacer par une expression particulière de groupes sociaux et s’adresse à leur encontre. Pourtant ce n’est pas la qualité d’art qui doit être contesté, mais la menace exprimée par une tendance d’un tel groupe social à l’encontre d’un autre. L’art peut exprimer les points de tension entre divers groupes sociaux, leur analyse pourrait nous éclairer sur des projets potentiels de chaque groupe social.

    L’art, définit comme tel, est indépendant de sa forme. Lorsqu’un groupe entend limiter les formes de l’art, elle n’a que pour objectif de disqualifier certaines catégories sociales d’une expression artistique.

    Les arts par excellence tel que le théâtre, la peinture, la sculpture, la musique, etc., qui paraisse déconnecter de la réalité, entre dans ce qu’on appelle dans le règne de l’idéalisme qui a pour défaut de concevoir l’idée en dehors de toute matérialité. Pourtant, toutes ces disciplines prennent appuie sur des activités humaines qui ont pour finalité la transmission du savoir et de la tradition. La diversité des arts va dans le sens d’une humanité diversifiée d’un point de vue social, la communication par le rire, les images, les lettres, la musique, etc. recouvre le grand débat dans la société humaine qui a lieu aujourd’hui à l’échelle mondiale. Le perfectionnement est aujourd’hui la mesure d’une œuvre d’art qui transcende tous les types d’art. Le perfectionnement vient de la volonté d’exprimer dans sa totalité les conceptions qui conditionnent les individus par rapport à leur groupe social respectif et en relation avec les autres groupes sociaux avec lesquels ils interagissent.

    La logique ne constitue en soi aucune expression, mais pourtant elle constitue la colonne vertébrale de toute expression. Une expression n’est saisissable que de par sa logique interne. Nous ne retenons d’une expression en réalité que sa logique interne. Il s’agit dès lors d’une équation à travers laquelle on transmet un message à son groupe social de référence ou à l’encontre d’un autre groupe social. Le caractère incontestable d’une équation donne au message une expression d’un haut niveau. La diversité des groupes sociaux qui composent l’humanité fait que nous posons les équations sur des bases sociales différentes et donc à partir d’une même logique, on peut donc avoir une multitude d’expressions. Unifier les bases s’oppose à celle de les effacer. Les animaux dont les êtres humains étant ce qu’ils sont, ne cherchons pas à remplacer leurs bases sociales mais à les comprendre pour les inclure toutes dans une seule conception du monde.

    Le sentiment d’un groupe social d’être menacé par un autre, fait naître un sentiment d’hostilité des membres du premier groupe à l’encontre du second groupe social dit menaçant. Le rapport de domination entre les différents groupes sociaux semblent être celles qui conditionnent les conflits, un groupe dominé qui se sent menacer peut provoquer son déchaînement. En cela, Dieudonné en propageant sa victimisation à l’encontre d’un groupe social qu’il prétend dominant (et qui semble avérer), peut déchaîner une violence à l’encontre du groupe prétendument dominant. En ce présentant comme le pauvre noir ou le pauvre français victime d’une conspiration juive ou sioniste, il braque ses groupes sociaux (dominés) de référence contre le groupe (prétendument dominant).

  • Merci de ta contribution très intéressante.

    Tu dis que « L’artisan devient artiste au moment où son œuvre constitue un modèle de référence à l’ensemble des gens du même métier. »

    Je me demande si je ne le définirais pas exactement de manière inverse :

    L’artisan devient artiste à partir du moment où son travail devient purement personnel et inimitable !

  • Tu dis que « Dieudonné en propageant sa victimisation à l’encontre d’un groupe social qu’il prétend dominant (et qui semble avérer), peut déchaîner une violence à l’encontre du groupe prétendument dominant. En ce présentant comme le pauvre noir ou le pauvre français victime d’une conspiration juive ou sioniste, il braque ses groupes sociaux (dominés) de référence contre le groupe (prétendument dominant). »

    Cela signifie plusieurs choses qui me semblent à la fois fausses, absurdes et ultra réactionnaires :

    premièrement que les "groupes sociaux" dont tu parlais plus haut et qui se heurtent, se craignent, se combattent et se braquent mutuellement, selon tes termes, sont en fait des groupes culturels, raciaux, ethniques, nationaux, ce qui est la caractéristique du point de vue des racistes et des fascistes (désolé du peu...)

    deuxièmement qu’il y aurait effectivement une "conspiration juive", ce qui est aussi réactionnaire que de prétendre qu’il y aurait une conspiration islamique, thèse des fascistes de l’autre bord...

    troisièmement, que l’art est là pour exprimer ce type d’oppositions raciales et ethniques, qui exprimeraient selon toi, si je sais lire, des intérêts de groupes sociaux, dont une réalité objective. Ce qui signifie que les groupes sociaux déterminants ne sont pas les classes sociales. En effet, les classes sociales regroupent les bourgeois, qu’ils soient Juifs ou musulmans ou bouddhistes ou n’importe quoi, et regroupent aussi les prolétaires entre eux, quelque soient leurs nationalités, races, ethnies.

    Tu es donc bel et bien, à propos de l’art, de parler d’un art ethnique, racial, religieux, et non d’un art dépendant des époques en termes de classes sociales.

    Si tu lis toute l’histoire en termes de races, de couleur de peau, d’ethnie, le point de vue des racistes blancs devient tout aussi justifié que celui des racistes noirs, ce qui est une manière de voir très très en dessous de celle de Mandela dont tu te réclamais précédemment, puisque lui refusait de placer la ligne politique en termes de races...

    Espérons que tu me répondras que je ne t’ai pas compris !

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.