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La chasse aux sorcières à la fin du Moyen-Âge : une vraie guerre de type fasciste pour démolir les droits des femmes

lundi 15 avril 2013, par Robert Paris

La chasse aux sorcières à la fin du Moyen-Âge : une vraie guerre de type fasciste pour démolir les droits des femmes

Cela peut étonner de parler de fascisme à propos des chasses aux sorcières médiévales et pourtant, ce sont bel et bien les classes dirigeantes, en se servant de l’appareil religieux, juridique et militaire qui ont instrumentalisé ces épisodes sanglants utilisant les milieux populaires les plus misérables et visant les femmes qui étaient jugées trop indépendantes ou qui exerçaient des professions réservées aux hommes. Cela est du domaine du pogrome, de la violence raciste, un racisme contre les femmes traitées de diables….

Si toute l’antiquité connaît l’interdiction de la sorcellerie, cela ne vise pas encore spécifiquement les femmes…

Contrairement au cliché, la « chasse aux sorcières » est loin d’être un fait historique médiéval.

En effet, le haut Moyen-Âge, s’il réprima dans le sang et les flammes l’hérésie, fut clément, en tout cas comparé à la Renaissance et au Grand Siècle, vis à vis de la « sorcellerie ».

Les premières "chasses aux sorcières" débutèrent vers le milieu du 15ème siècle, à la toute fin du moyen-âge.
On peut dater plus précisément la première vague de répression, menée par les tribunaux de l’Inquisition, de 1480 à 1520.

Mais la plus intense folie meurtrière eut lieu entre 1580 et 1630, et fut menée par des tribunaux séculiers.

C’est avec le milieu du quinzième siècle, avec la montée de la révolution bourgeoise qui menace l’édifice chrétien-féodal, que la papauté, l’église et le pouvoir politique lancent l’affaire des sorcières afin de détourner les colères populaires contre des femmes trop libres et que l’on va accuser de jeter le mauvais sort en alliance avec le diable. Mais, on va le voir, la bourgeoisie elle-même, est pour faire reculer les femmes dans leur lutte pour leurs droits…

La papauté est opposée aux droits des femmes, aux femmes qui prétendent faire de la religion et même diriger dans ce domaine, par exemple aux béguines religieuses qui réclament une libéralisation du statut de la femme… Les béguines, surtout présentes en Europe du Nord, cristallisent ce courant de subversion des mœurs. Elles vivent au sein de communautés autonomes, mais ne sont pas ordonnées. Elles sont autonomes en vivant d’aumônes, mais aussi de leurs salaires pour leurs soins médicaux ou leurs travaux textiles. Surtout, elles prônent une plus grande liberté sexuelle et récusent l’autorité des hommes. Marguerite Porete, une béguine, pousse la provocation jusqu’à publier à la fin du XIIIe siècle un traité de théologie, le Miroir des âmes simples anéanties. Poursuivie par l’Inquisition, elle est condamnée pour hérésie et est brûlée en 1310.

Vers 1326, le pape Jean XXII rédige la bulle Super Illius Specula, qui définit la sorcellerie comme une hérésie.

Bien que l’imaginaire collectif place la persécution de prétendues sorcières au Moyen Âge, les persécutions ne commencèrent qu’au XVe siècle et connurent leur apogée aux XVI et XVIIe siècles, c’est-à-dire pendant la Renaissance et le Grand siècle.

En 1484, le pape Innocent VIII lance le signal de la chasse aux sorcières en rédigeant une bulle papale, Summis desiderantes affectibus, qui organise la lutte contre la sorcellerie et élargit la mission de l’Inquisition aux « praticiens infernaux ».

La persécution est véritablement lancée à grande échelle après la publication en 1486 du Malleus Maleficarum, par Heinrich Kramer et Jacques Sprenger, deux dominicains. Il s’agit d’une enquête commanditée par l’Inquisition qui décrit les sorcières, leurs pratiques, et les méthodes à suivre pour les reconnaître. Le Malleus Maleficarum, ou Marteau des sorcières en français, est un véritable succès : il connut près de trente éditions latines entre 1486 et 1669.

Ce qui lance toute une campagne en ce sens, c’est la fameuse bulle apostolique Summis desiderantes affectibus en 1484, suivi d’un manuel démonologique, le Malleus Maleficarum, écrit par deux inquisiteurs dominicains, Heinrich Kramer et Jacob Sprenger.

La première partie du livre traite de la nature de la sorcellerie. Une bonne partie de cette section affirme que les femmes, à cause de leur faiblesse et de l’infériorité de leur intelligence, seraient par nature prédisposées à céder aux tentations de Satan. Le titre même du livre présente le mot maleficarum (avec la voyelle de la terminaison au féminin) et les auteurs déclarent (de façon erronée) que le mot femina (femme) dérive de fe + minus (foi mineure). Le manuel soutient que certains des actes confessés par les sorcières, comme le fait de se transformer en animaux ou en monstres, ne sont qu’illusions suscitées par le Diable, tandis que d’autres actions comme, par exemple, celles consistant à voler au sabbat, provoquer des tempêtes ou détruire les récoltes sont réellement possibles. Les auteurs insistent en outre de façon morbide sur l’aspect licencieux des rapports sexuels que les sorcières auraient avec les démons.

La seconde partie explique comment procéder à la capture, instruire le procès, organiser la détention et l’élimination des sorcières. Cette partie traite aussi de la confiance qu’on peut accorder ou non aux déclarations des témoins, dont les accusations sont souvent proférées par envie ou désir de vengeance ; les auteurs affirment toutefois que les indiscrétions et la rumeur publique sont suffisantes pour conduire une personne devant les tribunaux et qu’une défense trop véhémente d’un avocat prouve que celui-ci est ensorcelé. Le manuel donne des indications sur la manière d’éviter aux autorités d’être sujettes à la sorcellerie et rassurent le lecteur sur le fait que les juges, en tant que représentants de Dieu, sont immunisés contre le pouvoir des sorcières.

Suite à la publication de cet ouvrage commence un mouvement d’arrestations systématiques dans toute l’Europe. Principalement en Allemagne, en Suisse et en France, mais également en Espagne et en Italie. Cette première vague dure environ jusqu’en 1520. Puis une nouvelle vague apparaît de 1560 à 1650. Les tribunaux des régions catholiques mais surtout des régions protestantes envoient les sorcières au bûcher. On estime le nombre de procès à 100 000 et le nombre d’exécutions à environ 50 000. Brian Levack évalue le nombre des exécutions à 60 000. Anne L. Barstow révise ces nombres et les élève à 200 000 procès et 100 000 exécutions en prenant en compte les dossiers perdus.

Au cours de la campagne répressive menée dans les pays germaniques par les deux auteurs du Marteau des sorcières, on procéda a des exécutions massives : en trois mois, 600 dans le petit évêché de Bamberg, 900 a Wiirzburg. Mais la chasse aux sorcières devait prendre une ampleur et une férocité plus grandes encore au XVIe s. et dans la première moitie du XVIIe s., surtout en France, en Allemagne, en Angleterre, alors que l’Italie était beaucoup plus épargnée.

Loin de tempérer les préjugés populaires sur la sorcellerie, la réforme les aggrava plutôt en répandant une conception pessimiste de l’existence humaine sur la terre.

Erasme et Luther croyaient profondément a la présence active du démon dans les âmes. Un grand esprit, comme celui du théoricien politique Jean Bodin, l’auteur de La République, peu suspect cependant de fanatisme religieux, se passionnait pour la démonologie (De magorum doemonomania, 1579), de même que le roi d’Angleterre Jacques 1er.
Luther et Calvin réclamèrent des châtiments impitoyables pour toutes les personnes suspectes de sorcellerie, et cette tradition protestante se perpétua longtemps dans le puritanisme anglais et américain.

En France, le siècle classique fut marqué par de célèbres affaires de sorcellerie : procès des ursulines convulsionnaires de la Sainte-Beaume (1611), d’Urbain Grandier et des ursulines de Loudun (1634), du maréchal de Luxembourg (1681), etc.

En Allemagne, dans les années 1625/30, plus de 600 personnes convaincues de sorcellerie furent brûlées dans le seul évêché de Bamberg.

En Angleterre, dans les années 1640, Matthew Hopkins mena de féroces chasses aux sorcières.
En 1599, le roi Jacques Ier d’Angleterre montre comment il est possible de prouver la culpabilité d’une sorcière en la piquant, ou bien en la jetant à l’eau : si la piqûre ne saigne pas, la sorcière est reconnue coupable. De même si la femme s’avise de remonter à la surface de l’eau après y avoir été précipitée.

Aux XVIe et XVIIe siècles, les procès en sorcellerie deviennent presque exclusivement à l’encontre des femmes.
Le premier procès de sorcières officiel eut lieu à Trèves en 1235, et, en 1275, à Toulouse, fut brûlée la première sorcière dûment condamnée par les tribunaux ecclésiastiques. La sorcellerie était dorénavant assimilée à l’hérésie, et le pape Jean XXII, en 1330, donna une nouvelle impulsion à la chasse aux sorcières.
Les « chasses aux sorcières » connaissent deux vagues : la première de 1480 à 1520 environ, puis la seconde de 1560 à 1650. Mais dès les années 1400-1450, le portrait de ce qui deviendra une « image d’Épinal » par la suite se dessine, et les dernières persécutions se terminent vers la fin du XVIIe siècle.

Historiens et chercheurs estiment aujourd’hui le nombre de leurs victimes entre 50 et 100 000 sur les deux siècles où tant les tribunaux de l’Inquisition que ceux de la Réforme les conduisent au bûcher. Un chiffre élevé en proportion de la population européenne de l’époque. Et ce sont, pour 80 % de ces victimes, des femmes.

Ces femmes (et quelques fois leurs enfants, surtout s’il s’agissait de filles), appartenaient le plus souvent aux classes populaires. Une toute petite minorité d’entre elles pouvait être considérée comme étant d’authentiques criminelles.

Un moyen horrible de savoir si une femme était une sorcière consistait à la jeter nue à l’eau, les mains et pieds attachés ensemble pour l’empêcher de surnager. Une sorcière étant — en théorie — plus légère que l’eau, si elle flottait, elle était aussitôt repêchée et brûlée vive. Si elle se noyait, c’est qu’elle était morte innocente.

En Angleterre, la loi contre la sorcellerie fut définitivement abolie en 1736, ce qui n’empêcha pas la pendaison de la dernière sorcière anglaise en 1808. Les dernières brûlées le sont dans la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, tel Anna Göldin dans le canton de Glaris de la Suisse protestante en 1782, ou en 1793 en Pologne. En France à Bournel, une femme accusée de sorcellerie fut brûlée par des paysans le 28 juillet 1826, une autre en 1856, fut jetée dans un four à Camalès.

Il ne suffit pas de dire que la société avait basculé dans le crime systématique contre les femmes, il faut expliquer pourquoi…

Une sorcière signifiait une femme qui exerçait des métiers comme pharmacopée, médecine, sage-femme, avorteuse, conseillère psychologique, enseignante, dirigeante politique éventuellement dans les milieux populaires, etc… En tout cas, une femme libre en rupture avec l’ordre patriarcal devenu de plus en plus pesant avec le développement économique de la bourgeoisie… Cette dernière, pas plus que les anciennes classes dominantes, ne voulait que les femmes profitent de la lutte pour la liberté nécessaire au développement économique bourgeois. La bourgeoisie a donc cherché sciemment à aggraver le sort des femmes et non à l’améliorer et on le verra au cours de la révolution française ou la bourgeoisie en pleine conquête de son pouvoir, s’appuyant pourtant sur des mouvements révolutionnaires de femmes contre l’ordre établi, agira violemment pour empêcher les femmes d’acquérir des droits sociaux et politiques…

Le droit bourgeois nécessitait l’héritage et la paternité et cela signifiait qu’il fallait interdire toutes les libertés qui avaient pu exister pour les femmes au Moyen-Age. Contrairement au mythe qui la présente comme un progrès de toutes les libertés, la société bourgeoise a représenté un enfermement des femmes… Si des femmes pouvaient vivre de manière indépendante et exercer des professions libérales, ce n’est plus le cas ensuite ! Toute femme qui refuse de se mettre sous la domination d’un homme doit être dénoncée comme sorcière !

C’est le début de la montée de la bourgeoisie qui coïncide avec la vague de chasse aux sorcières et notamment avec la Renaissance. Il fallait alors accuser les femmes de tous les malheurs de la société menacée de révolution sociale.

Les grands penseurs humanistes ne s’élevèrent pas contre ce mouvement, à l’exception de Heinrich Cornelius Agrippa von Nettesheim qui fut attaqué pour soutien à la sorcellerie.

Le pasteur allemand Anton Praetorius de l’Église réformée de Jean Calvin édita en 1602 le livre De l’étude approfondie de la sorcellerie et des sorciers (Von Zauberey und Zauberern Gründlicher Bericht) contre la persécution des sorcières et contre la torture. Le jésuite Friedrich Spee von Langenfeld qui a accompagné de nombreuses prétendues sorcières au bûcher publia sous l’anonymat un livre pour les défendre (cautio criminalis).

Le premier en France à réhabiliter publiquement les femmes libres dites « sorcières » fut l’historien Jules Michelet qui leur consacra un livre en 1862. Il voulut ce livre comme un « hymne à la femme, bienfaisante et victime ». Michelet choisit de faire de la sorcière une révoltée en même temps qu’une victime et il réhabilite la sorcière à une époque où elle avait totalement disparu derrière l’image du diable. Dans ce livre, Michelet accuse l’Église d’avoir organisé cette chasse aux sorcières, pas seulement au Moyen Âge mais aussi au XVIIe siècle et au XVIIIe siècle. Le livre eut des difficultés à trouver un éditeur et provoqua un scandale. Michelet se défendit en présentant son livre comme un travail d’historien et non de romancier. Mais il ne leur reconnaît pas véritablement le droit à l’émancipation. Il faut attendre les mouvements féministes des années 1970 pour voir apparaître le thème sous un jour positif. Les représentantes de ces mouvements s’en sont emparé et l’ont revendiqué comme symbole de leur combat. On notera par exemple la revue Sorcières de Xavière Gauthier, qui étudiait les « pratiques subversives des femmes ».

QUELQUES DATES

1326 Bulle du pape Jean XXII contre la magie démoniaque (Super illius specula).

1428-1430 Mise en place du mythe du sabbat.

1459-1461 Procès d’Arras contres les Vaudois, hérétiques assimilés aux sorciers

1484 Bulle du pape Innocent VIII qui lance la chasse aux sorciers en Rhénanie (Summis desiderantes affectibus). Premier essor de la persécution et publication des manuels de procédure.

1487 Le Marteau des sorcières (Malleus maleficarum) de deux inquisiteurs Henry Institoris et Jacques Sprenger. Manuel de démonologie. Succès éditorial.

1580 La Démonomanie des sorciers du juriste Jean Bodin. La persécution s’accroît dans toute l’Europe du Nord.

1612 Le Tableau de l’inconstance des mauvais anges et démons du juriste Pierre de Lancre : récit de la chasse aux sorciers au Pays basque et traité de procédure.

1634-1637 La possession des ursulines de Loudun. Le curé Urbain Grandier, qui est accusé de pacte avec le diable, est brûlé vif.

La sorcière de Michelet

Lire aussi

Document de l’époque

Extraits de « Un monde sans fin » de Ken Follett :

Quelques autres lectures :

Portfolio

Messages

  • Le droit bourgeois nécessitait l’héritage et la paternité et cela signifiait qu’il fallait interdire toutes les libertés qui avaient pu exister pour les femmes au Moyen-Age. Contrairement au mythe qui la présente comme un progrès de toutes les libertés, la société bourgeoise a représenté un enfermement des femmes… Si des femmes pouvaient vivre de manière indépendante et exercer des professions libérales, ce n’est plus le cas ensuite ! Toute femme qui refuse de se mettre sous la domination d’un homme doit être dénoncée comme sorcière !

    C’est le début de la montée de la bourgeoisie qui coïncide avec la vague de chasse aux sorcières et notamment avec la Renaissance. Il fallait alors accuser les femmes de tous les malheurs de la société menacée de révolution sociale.

  • Robert Muchembled écrit dans « La sorcière au village » (collection Archives de Juliard) :

    « La persécution massive des sorcières est une invention du XVIème siècle et non pas du Moyen Age. Elle atteint son paroxysme en France comme dans les Pays-Bas espagnols entre 1560 et 1630… L’impulsion qui déclencha la grande chasse aux sorciers vint de haut… Une procédure d’exception fit mise en place, dans le cadre d’une répression criminelle d’ailleurs de plus en plus sévère en général. Elle visait particulièrement de vieilles femmes… conduisant à la mort des centaines, des milliers de « sorciers » dans la proportion moyenne de trois à quatre femmes pour un homme….

    Il est indéniable que la chasse aux sorcières fut décidée et entreprise par les élites ecclésiastiques et laïques du XVème siècle à la fin du XVIIème siècle. Pour le roi, pour l’Eglise et pour les gouvernants dans leur ensemble, la persécution visait une secte satanique qui était censée constituer une Eglise parallèle, un Etat subversif, une vaste et secrète communauté….

    Au fond, les villageois ne chassent pas les sorciers pour les mêmes raisons que les magistrats et les élites dont ils connaissaient pourtant les théories en la matière. Ils participent à la répression sur la base d’un malentendu : on leur désigne les sorcières comme la cause de tous les maux ; pour eux, cependant, les inquiétudes les plus fondamentales ne concernent pas le diable, qu’on dit omniprésent sur la terre, mais des phénomènes plus immédiats et plus fréquents, des enchaînements de malheurs multiples dans la trame de leur vie quotidienne. Aussi acceptent-ils l’idée que les sorciers sont dangereux et qu’il faut les détruire, comme on le leur dit très fréquemment, pour n’en retenir que ce qui a trait au malheur quotidien, à leur malheur de tous les jours.

    Ainsi, la chasse aux sorciers eut également une dimension populaire fondamentale. Sans la participation active du monde rural, ou du moins d’une partie de celui-ci, à la persécution, on ne pourrait comprendre la violence, la longueur et la diffusion du phénomène…

    En somme, l’ampleur de la persécution des sorciers s’explique par la conjonction, entre 1560 et 1660 pour l’essentiel, des intérêts et des hantises des couches dirigeantes, d’une part, et du monde rural, de l’autre….

    Dans cette période, la ponction fiscale croît en flèche, écrasant les masses rurales, tandis que se renforce la domination et qu’augmente la fortune d’une élite paysanne, que l’on nomme parfois les coqs de village. Dans ces conditions, les structures de sociabilité se transforment. La famille conjugale prend plus d’importance que par le passé, sous l’autorité du père… La communauté rurale, souvent ouverte autrefois à tous les chefs de famille, ou peu s’en faut, se rétrécit d’une manière générale à une sorte d’oligarchie locale. Le pouvoir se concentre à ce niveau comme il se concentre entre les mains du roi devenu absolu.

    Ces divers reclassements sociaux et politiques, au sens large du terme, entraînent des tensions croissantes dans le monde rural. La chasse aux sorcières permet de les réduire, ou peut-être simplement de les détourner, en évitant ainsi un surcroît de criminalité, de résistances et de révoltes : la fin du XVIème siècle et le début du XVIIème siècle, correspondent, ne l’oublions pas, à une époque de très forte criminalité, de violence et à une extraordinaire multiplication des révoltes populaires en France.

    En ce sens, les bûchers de sorcellerie peuvent être considérés comme une négation de la lutte des classes : il est probable que la plupart des condamnés n’avaient pas eu conscience de s’attaquer à la société établie, mais les gouvernants et les paysans aisés brûlaient ainsi symboliquement leur peur d’une subversion sociale généralisée. »

  • Ils ont fait l’école du rire ou ils y croient réellement à leurs bobards ?
    nous aurions préféré un article historique, pas une invention pseudo-fataliste...

  • A la charnière entre le XVIe et XVIIe siècle, tout le monde affirmait croire au diable, il n’est de grand esprit qui ne s’y référa. Et si c’est le pape qui avait amorcé le mouvement en 1326 en assimilant sorcellerie et hérésie, l’Église abandonna vite les poursuites qui devinrent, à l’échelle de l’Europe, l’affaire des juges : Rome ignora elle-même cette inquisition, la chasse aux sorcières fut une procédure d’autorité locale non soumise à autorité supérieure, qu’elle soit religieuse ou royale.

    En pays protestant - où le pape n’était plus reconnu -, les autorités locales brûlèrent à qui mieux mieux, suivant ainsi la conviction de Luther qui affirmait : « Il ne faut pas faire grâce aux sorcières et aux magiciennes (...) je voudrais moi-même mettre le feu à leur bûcher, de même qu’on voit dans l’ancienne loi les prêtres lapider les malfaiteurs. »

    A l’origine de bien des procès, une dénonciation populaire. Telle femme, considérée jusqu’alors comme dotée des pouvoirs bénéfiques de soigner et guérir, devenait, face aux malheurs qui accablaient une communauté, responsable du mal comme elle l’avait été du bien. La source de cette croyance peut bien n’avoir été que l’expression d’une religiosité paysanne (c’est-à-dire païenne au sens étymologique du terme) que le christianisme n’avait atteinte que superficiellement. La grande majorité du peuple français pratiquait une religion animiste que les lettrés catholiques des cours citadines assimilèrent à de la sorcellerie.

    Les procès ravagèrent les campagnes. Depuis 1570 environ (paroxysme des guerres de religion) et pour un siècle, ce sont des dizaines de milliers de pauvres gens, majoritairement des femmes, qui périrent publiquement dans d’atroces souffrances à l’issue de procès iniques. Des tortures insoutenables faisaient avouer ce qu’on voulait. Tant que les juges n’avaient pas obtenu d’aveux, ils persistaient à torturer, et une résistance acharnée à la pression était elle-même la preuve que le diable soutenait l’accusée, incapable sans secours diabolique de résister à l’épreuve.

    Un accusé tentait-il d’incriminer un de ses bourreaux pour tenter d’en réchapper en le discréditant ? Peine perdue. Les juges étaient, par nature, indemnes de toute attaque satanique, leur mission était placée sous la protection de Dieu le père. En personne.
    Tout malheureux tombé dans les filets des juges sur simple soupçon était voué à la mort, sans distinction de sexe ou d’âge. Sans aucune chance d’en réchapper. Aucune.

    On aurait tort de voir dans ces magistrats sadiques des rustauds abrutis par l’ignorance. Des juges subalternes aux plus hauts magistrats, tous avaient étudié. Le plus illustre d’entre eux, Pierre de Lancre, qui se vanta d’avoir fait flamber plus de 500 malheureuses, était un érudit, un lettré appartenant à l’élite intellectuelle de Bordeaux.

    Et quand un médecin, Jean Wier, écrivit qu’il suffisait d’un peu de médecine pour expliquer bien des possessions, il attira sur lui les foudres de Jean Bodin. Jean Bodin (1529-1596), avocat au Parlement de Paris, l’auteur des Six Livres de la République, la référence pour des générations en matière d’analyse de l’origine de l’autorité, Jean Bodin que le xxe siècle a honoré comme humaniste en donnant son nom à un lycée de sa ville natale, accueillit l’intervention de Jean Wier en tonnant que c’était le diable qui l’inspirait et lança un appel véhément à une répression impitoyable.

    Bérulle lui-même, sous couvert du prétendu humanisme dévot, attaqua ad hominem le médecin Marescot qui avait commis l’outrage suivant : « S’il ne faut donc point d’autres signes de possession du diable que ceux qui sont décrits par les évangélistes, tout épileptique, mélancolique, phrénétique aura le diable au corps. Il et y aura au monde plus de démoniaques que de fols. »

    Ce n’était pas l’Eglise qui poussait au crime, et c’est un jésuite, Friederich Spee, qui dénonça le mieux la procédure française en 1632. En 1657, un décret pontifical reconnut la maladie mentale et s’éleva contre le fait d’arrêter et d’incarcérer des femmes contre lesquelles n’existait aucune charge. Mais en France ce décret ne toucha personne, car les juges d’Inquisition ne sévissaient pas, et une décision pontificale n’avait aucun pouvoir de contrainte contre les juges séculiers.

    Ces derniers s’arrogeaient un mirobolant pouvoir religieux, mais l’Eglise n’avait sur eux aucune prise.

    Le reflux des procès en sorcellerie a peu à voir avec une prise de conscience des magistrats en faveur de leurs victimes. Jusqu’au bout ils rejetèrent les appels à la raison d’où qu’ils viennent. Mais un glissement des affaires de sorcellerie des campagnes vers les villes, vint semer le trouble dans leur monde à eux. Les grands scandales de l’époque que sont l’affaire des possédées de Loudun ou de Louviers, mirent en cause des prêtres et des notables. On n’avait plus là affaire à des femmes du peuple, soupçonnées de pratiques sataniques, mais à des femmes du beau monde qui se plaignaient de possessions dont il fallait les délivrer. Elles n’étaient plus les coupables, mais les victimes d’un mal dont elles accusaient des personnalités au-dessus de tout soupçon. Dans ces affaires qui ont défrayé la chronique, ce sont des femmes qui accusèrent et semèrent la terreur.

    Le scandale était d’autant plus grand qu’il mettait à jour de lourds secrets touchant à une bien trouble sexualité pratiquée dans les couvents. En 1610 à Aix-en-Provence, Madeleine Demandols lança au cours de crises violentes et spectaculaires, à son confesseur Louis Gaufridy : « Vous savez bien que vous avez fait de moi tout ce que vous avez voulu, tant devant que derrière ! » Comment une jeune fille, enfermée dans un couvent, pouvait-elle évoquer la sodomie si elle ne l’avait subie ! Son suborneur fut exécuté après un procès expéditif, et il y a fort à penser que la présence, ou non, du diable dans ses séductions, eut peu à voir avec la rapidité de la procédure.

    Les grandes exhibitions des possédées furent éhontément lubriques. Hystérie des participantes, certes, mais aussi lubricité des spectateurs qui venaient se délecter à la perspective de voir des nonnes se dénuder en poussant des hurlements de bêtes. Et en faisant tomber sur des notables des soupçons inavouables : orgies avec sacrifices d’enfants, crucifixions, anthropophagie… Une fois lancée, la procédure ne pouvait plus être arrêtée, et il était temps pour la force publique d’y mettre bon ordre. Les Parlements s’y employèrent, et à leur tête celui de Paris, qui imposa une procédure d’appel automatique en cas de condamnation à mort. Ainsi fut arrêtée la folie des procédures en sorcellerie.

  • Tout le Moyen-âge a cru aux sorcières qui étaient traitées avec une certaine mansuétude jusqu’au 15e siècle. Puis les exécutions capitales commencèrent, surtout après la bulle d’Innocent VIII (1484) qui introduisit les procès de sorcellerie dans le Saint-Empire où déjà la chasse aux sorcières battait son plein.

    La folie de la croyance en la sorcellerie et la chasse aux sorcières ont conduit des milliers de femmes en prison où elles ont été torturées, avant d’être brûlées sur le bûcher.

    L’histoire nous a transmis le récit de nombreuses exécutions de sorcières qui eurent lieu dans beaucoup de villes et villages d’Alsace et en particulier dans le Sundgau, terre de domination autrichienne.

  • La chasse aux sorcières a été notamment une lutte d’intérêts opposant des médecins issus de la bourgeoisie aux femmes du peuple qui pratiquaient (souvent gratuitement) la médecine.

    Pour connaître cet aspect de l’histoire de la chasse aux sorcières :

    "Sorcières, sages-femmes et infirmières"

    de Barbara Ehrenreich et Deirdre English

    Editions du Remue-ménage

  • En 1613, en Allemagne, le superintendant de Henneberg déclarait : « Les autorités ne doivent pas permettre aux avocats de s’occuper des affaires de sorcières et de leur sauver la vie pour provoquer encore plus de dommages et de maux. Car tout le mal que de telles fiancées du diable font, les régents et les honorables avocats devront un jour en répondre devant Dieu et la chaire du Christ. »

  • Les méthodes sont celles utilisées à toute époque quand l’accusé est jugé coupable avant même que commence le procès. Un moment clé de l’interrogatoire est l’apparition des témoins qui sont souvent des proches de la sorcière. L’instant d’avant, elle ne savait pas qui avait déposé contre elle et, tout à coup, l’accusée s’effondre quand elle réalise quelles personnes se sont liguées contre elle. Le livre de Friedrich Spee Cautio Criminalis, écrit à l’époque de la persécution la plus violente en terre germanique, décrit parfaitement le mécanisme implacable qui fait que la sorcière ou le sorcier ne peuvent que mourir ; s’ils n’avouent pas, ils sont accusés de taciturnité diabolique et sont condamnés, s’ils avouent sous la souffrance, ils sont également brulés.

  • Les femmes accusées de sorcellerie sont souvent sages-femmes ou guérisseuses, dépositaires d’une pharmacopée et de savoirs ancestraux. La population, essentiellement rurale, n’avait guère d’autre recours pour se soigner. Ces méthodes définies comme magiques se heurtent au rationalisme de la Renaissance. Des incantations en langue connue ou inconnue sont souvent associées aux soins et l’Église contraint les fidèles à remplacer ces gestes et incantations par des prières aux saints guérisseurs et par des signes de croix. Les sages-femmes sont accusées de pratiquer des avortements.

  • La persécution des sorcières culmine aux XVIe et XVIIe siècles et coïncide avec la Renaissance, c’est-à-dire le début de l’époque moderne qui est caractérisé par l’humanisme et les débuts de l’imprimerie. Les courants bourgeois, protestant, humaniste, etc, n’ont nullement protégé les femmes... Les grands penseurs humanistes ne s’élevèrent pas contre ce mouvement, à l’exception de Heinrich Cornelius Agrippa von Nettesheim qui fut attaqué pour soutien à la sorcellerie.

    Le pasteur allemand Anton Praetorius de l’Église réformée de Jean Calvin édita en 1602 le livre De l’étude approfondie de la sorcellerie et des sorciers (Von Zauberey und Zauberern Gründlicher Bericht) contre la persécution des sorcières et contre la torture. Le jésuite Friedrich Spee von Langenfeld qui a accompagné de nombreuses prétendues sorcières au bûcher publia sous l’anonymat un livre pour les défendre (cautio criminalis), toute sa vie il se battit pour les défendre, et invitait les juristes et tous ceux qui contribuaient à cette chasse, d’assister à une séance de torture au cours des quelles il dit avoir vu blanchir ses cheveux en voyant tant de détresse et de souffrance qu’il ne pouvait soulager. Il les adjurait d’appliquer la constitution caroline de Charles Quint, un système de droit pénal évolué et protecteur des droits des accusés.

  • L’historien français Jules Michelet publia un ouvrage en 1862. Il voulut ce livre comme un « hymne à la femme, bienfaisante et victime », reconnaissant la prétendue "sorcière" comme une femme révoltée ou indépendante ou de femmes âgées, contraintes de vivre en marge de la société pour vivre libres.

  • Parler de fascisme à propos de la chasse aux sorcières au moyen-âge n’a en réalité rien de surprenant puisque justement sur l’inquisition un auteur comme Jean-Louis Biget (Pr. â l’ENS) développe une théorie en comparant inquisition et 3ème Reich. A savoir que le slogan des inquisiteurs était : "un peuple, une religion, un dieu." Et que Hitler avait pour slogan : "un peuple, une nation, un chef".

  • La Grande Chasse aux sorcières, du Moyen Âge aux Temps modernes

    La Renaissance où s’affrontent magies savante et populaire

    Lire ici

  • En effet, la mise à mort des sorcières sur les bûchers n’est pas l’apanage du moyen-âge. Nombre de supposés serviteurs du malin ont succombé aux flammes purificatrices à la renaissance, et ce parfois à tour de bras dans certaines de nos contrées. Des courriers arrivent régulièrement dans les cabinets régionaux des conseillers au parlement. Les destinataires y découvrent des témoins de cérémonies de débauche, les sabbats, ou encore des délateurs soupçonnant leur voisin de pratique de rites sataniques. Les veuves deviennent folles lorsque point la nuit et vendent leurs âmes au diable. Des foyers conséquents de sorcières sont connus dans le pays basque, ou dans le Jura. Les juges qui président les procès pour sorcellerie ne manquent pas de coucher leurs opinions sur papier, ouvrages ainsi promis à un brillant avenir dans l’édition. Plusieurs "Best Sellers" font alors référence à l’époque : le Malleus Maleficarum, écrit en 1487 par deux dominicains allemands, le discours des sorciers, d’Henry Boguet, qui encourage l’étranglement des condamnés avant leur passage sur le bûcher, exception faite des Loups-garous, qu’il faut brûler vifs !

    Les condamnations pleuvent, être soupçonné envoi bien souvent à une mort horrible : à Toulouse, 400 personnes périssent par les flammes, en Lorraine, en 30 ans, Nicolas Rémy prononce la sentence fatidique contre deux à trois mille accusés. Il ressort de ces audiences que 8 accusés sur 10 sont des femmes, ayant souvent des penchants lesbiens. Les Sabbats sont en fait des lieux de débauches sexuelles, ou les demoiselles s’abandonnent au péché de la chair, et les paysans aux joies de l’adultère et de l’inceste. De plus, ces cérémonies sont pour les sujets les moins riches des endroits propices à la contestation du pouvoir en place et à la révolte. Les inquisiteurs espèrent se montrer comme des serviteurs zélés des directives royales, en pourchassant sans relâche les païens et autres cabalistes.

  • Droits des femmes en milieu professionnel (Algérie)
    Le comité femmes du Snapap a rendu public, hier, un sondage sur les conditions de travail des femmes.

    Sur un échantillon de 600 personnes interrogées dans 11 wilayas, plusieurs employées déclarent être victimes d’exploitation et de harcèlement. Parmi les femmes approchées, douze déclarent venir du milieu socioéconomique moyen et 396 de milieux défavorisés.
    Dans le détail, 82 femmes sont mariées. Onze de cette catégorie, travaillant dans le secteur privé, ont déclaré dans le cadre de l’enquête qu’elles n’ont pu bénéficier de congé de maternité. Le tableau de l’enquête démontre en outre que 135 femmes ont été victimes d’exploitation en milieu professionnel, 56 ont fait l’objet de harcèlement sexuel et 21 ont été victimes de violences verbales. 39 femmes dénoncent également une discrimination et 38 d’entre elles une atteinte au droit à la promotion professionnelle, alors que cinq travailleuses évoquent une atteinte au droit syndical. Le comité femmes du Snapap a récolté plusieurs témoignages.

    Des femmes soutiennent que leurs conditions de travail sont « très pénibles » et ne respectent pas la dignité humaine. A titre d’exemple, souligne le comité, « des femmes d’Adrar travaillent comme ramasseuses de gravier dans le désert du Grand Sud à des moments de grande chaleur. Elles accomplissent cette tâche à mains nues. Elles séparent le gravier du sable puis le revendent à un prix dérisoire. Leur transport est assuré par des camions, au risque de se perdre dans le désert ». Enfin, le comité femmes du Snapap dénonce les licenciements dont sont victimes plusieurs travailleuses en raison de leur activité syndicale et appelle à la solidarité pour contrer les pratiques discriminatoires.

    Bsikri Mehdi

  • Ken Follett rapporte dans "Les piliers de la terre" comment "toute femme indépendante prenait le risque d’être traitée de sorcière"...

  • Quelques hommes courageux se sont battus contre la diabolisation des femmes et contre les exorcismes religieux face aux névroses

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    Jean Wier

    Anton Praetorius

    Friedrich Spee von Langenfeld

    Montaigne

    Jean Nydault

    Nicolas Malebranche

    Michelet

  • En France, les accusés de sorcellerie sont des femmes dans des proportions d’environ 80%, c’est pourquoi le terme sorcière sera utilisé tout au long de ce travail. Ces sorcières sont généralement des veuves relativement âgées, et sont habituellement de la même catégorie d’âge ou un peu plus vieilles que les accusateurs. Par le fait même, elle est également plus vulnérable parce qu’elle n’est souvent plus protégée par les liens de solidarité que procure la famille. La plupart du temps, ces femmes sont des voisines des accusateurs, et sont donc connues et fréquentées par ces derniers.

    Toutefois, il est important de mentionner qu’il existe des différences majeures entre ces femmes et leurs accusateurs. La sorcière est dans la majorité des cas plus pauvre que ses accusateurs et elle vient souvent leur quémander quelques services ou petits emprunts. De plus, on peut dire que cette dernière appartient à l’ancien ordre des choses, c’est-à-dire qu’elle continue de vivre selon les coutumes qui prévalaient depuis des siècles, alors que son entourage, et plus particulièrement les mieux nantis du village, ont évolué ; ils ont fréquenté les écoles de paroisse, ont appris à lire, et surtout se sont laisser imprégner du nouveau discours clérical qui condamnait les coutumes païennes pratiquées par ces supposées sorcières.

    Pour bien comprendre le phénomène de la sorcellerie, il faut bien sûr tenir compte du contexte dans lequel il évolua. En effet, le XVIe siècle est une époque de grande effervescence mais aussi de ruptures. C’est le début de la modernité, avec tout ce que cela comporte de bouleversement. Justement, c’est à cette époque que le discours démonologique prit véritablement de l’ampleur et qu’il fut largement diffusé dans les masses populaires par l’imprimerie et les discours cléricaux. La doctrine démonologique qui a été établie par l’Église se définissait comme "...la théorie de l’appartenance des sorciers à une secte satanique organisée", et fut reprise par des juges et des laïques qui lui ajoutèrent une dimension politique.

    Ce discours était en réalité le reflet d’une société apeurée par l’approche imminente de la fin du monde, ce qui est tout à fait compréhensible étant donné les nombreux bouleversements qui s’opéraient dans une société immobile depuis des siècles. Selon les démonologues, les sorcières sont donc envoyées par Satan pour tenter l’humanité à commettre les pires crimes. D’ailleurs, on constate que la présence de Satan dans les mentalités s’accroît considérablement à cette époque et que ce dernier est largement dépeint dans les discours et l’iconographie ecclésiastique.

    On peut maintenant se demander pourquoi les femmes étaient majoritairement soupçonnées de sorcellerie. Tout d’abord, les femmes étaient réputées pour être des guérisseuses. Lors de veillées, elles s’échangeaient des recettes, des façons d’influencer le sort, etc. Ce sont les femmes qui transmettaient les croyances païennes et les superstitions. De plus, étant donné la rareté des écoles, ce sont les femmes qui transmettaient la culture populaire en enseignant les rudiments de l’écriture à leurs enfants. Par le fait même, elles sont devenues des concurrentes pour certains. Par ses conseils et son savoir, la sorcière rassurait la population et occupait une place importante dans la société, ce qui avait pour effet de réduire l’influence des prêtres sur leurs ouailles. Par son rôle de sage femme, elle remplaçait les médecins coûteux et rares à la campagne. On peut donc facilement comprendre pourquoi les médecins et les prêtres s’acharnèrent tant à dévaluer les croyances païennes.

    De plus, la présence d’un antiféminisme virulent dans le discours de l’Église a poussé les élites à identifier la femme comme un agent de Satan. Par sa nature faible et débile, elle est plus sujette à se laisser duper par Satan, croyait-on. En plus, la femme était perçue comme une insatiable qui est prête à tout pour assouvir ses besoins les plus pervers, ce qui n’était sûrement pas à son avantage dans une période de répression sexuelle. D’ailleurs, on constate l’importance de la sexualité dans les procès de sorcellerie, car on insistait pour faire décrire aux accusés les détails des scènes de copulation satanique.

    L’épicentre du phénomène est sans aucun doute la zone de contact entre deux civilisations : les protestants du Saint Empire romain germanique et les catholiques de France. Grossièrement, elle se situe le long du rhin et de ces embranchements, qui traverse également les Pays-Bas espagnols, la Suisse et le duché de Savoie. Cet endroit n’est pas le fruit du hasard, mais plutôt la zone de friction entre les catholiques et les protestants, tout deux tentant de convertir les âmes de son voisin à sa religion. Cette portion de territoire était donc quotidiennement soumis à de grandes tensions. D’ailleurs, pendant la guerre de Trente Ans qui débuta en 1618, les bûchers se multiplièrent à vue d’oeil.

    De plus, cette région n’est pas la seule à avoir connu la frénésie des persécutions : le Languedoc, la Normandie et le sud-ouest ont également été le théâtre de telles scènes. Ceci s’explique par le fait que ces régions sont, tout comme la frontière est de la France, à l’extrémité du pays. En effet, on constate que les régions situées en périphérie du pouvoir central sont portées à se révolter et sont plus difficiles à surveiller, c’est pourquoi la répression de la sorcellerie y est nécessaire. Elle permet de fabriquer une cohésion sociale et de mettre sur pied un système de surveillance par les communautés mêmes. Celui-ci se met facilement en branle car comme on peut facilement l’imaginer, la peur de se faire dénoncer comme un agent de Satan devient omniprésente avec la multiplication des bûchers, et chacun commence à épier son voisin et à agir selon les nouvelles normes afin de devenir totalement irréprochable. C’est le principe même de l’obéissance par la peur. Toutefois, d’autres facteurs participent à cette multiplication des bûchers, comme le besoin d’un bouc émissaire pour libérer les tensions sociales qui augmentent au sein de la communauté.

  • Comme nous l’avons vu précédemment, l’Europe du XVe et du XVIe siècles est en pleine transformation, du moins un changement profond se manifeste chez l’élite de l’époque. Ce sont les premiers pas de la modernité, qui se font difficilement. D’ailleurs, c’est justement à cause de la résistance des masses rurales à ces changements que la répression de la sorcellerie devient nécessaire. Cela se traduit de la façon suivante : ce n’est pas la sorcellerie qui a évolué pendant cette période, mais bien la perception que l’élite s’en faisait. Pour eux, c’est la perpétuation des croyances païennes qui constituait la sorcellerie, car elle était un frein à la modernité et à la mobilité. Ces croyances maintenaient les masses populaires dans l’immobilisme moyen-âgeux qu’ils tentaient maintenant de combattre.

    Les élites se lancèrent alors dans une vaste entreprise d’acculturation des campagnes qui visait à faire abandonner les pratiques magiques des masses incultes. Pour ce faire, des écoles dirigés par des clercs ont été fondées afin de transmettre les connaissances de base en écriture, mais surtout afin de christianiser le peuple. Ce mouvement de répression venait nécessairement du haut, c’est-à-dire autant du clergé que du roi. Il se démontrait par une volonté de soumettre les corps et les âmes, et de créer ainsi de bons sujets obéissants. On peut donc dire que les motifs de la répression étaient autant d’ordre politique que religieux.

    Par contre, il faut mentionner qu’une collaboration des masses devait être présente pour que s’enflamment les bûchers. En effet, on remarque que les coqs de villages ont souvent collaboré à la répression de la sorcellerie, car ceux-ci y voyaient leur intérêt. En accusant de pauvres femmes arriérées, ils se différenciaient d’une classe païenne et inculte. En effet, ces coqs de village avaient très souvent fréquenté les écoles locales où le discours démonologique était très présent, ce qui les avaient coupés de la vision traditionnelle du monde. Mais la raison fondamentale à cet appui est davantage d’ordre économique, car les mieux nantis du village avaient une peur terrible de perdre leur supériorité financière dans une période de paupérisation. Les pouvoirs magiques qu’évoquaient les pauvres constituaient donc une menace pour eux. En exterminant les sorcières, ils faisaient véhiculer le message suivant : toute personne qui ne veut se soumettre à l’ordre des choses périra du même sort. Ils donnaient ainsi un avertissement aux pauvres qui seraient tentés de se révolter.

    En écrasant les femmes qui se révoltaient, en engageant aussi des femmes contre les femmes révoltées, la société bourgeoise naissante prenait le pas sur les masses populaires.

  • Le développement de la bourgeoisie et la rapide transformation économique et sociale qu’elle entraînait a profondément bouleversé les milieux populaires, provouant des conflits, de la méfiance et de la peur, et menaçant l’ordre politique et social. Il est caractéristique que les campagnes désormais désavantagées par le développement de la bourgeoisie ont été le centre des procès en sorcellerie. Par exemple, en Grande Bretagne, l’essentiel des procès en sorcellerie se déroulent dans les régions les plus développées ayant subi une transformation bourgeoise radicale : Sussex, Surrey, Kent et Essex. Ailleurs aussi, ce sont des conflits économiques qui sont source des crises de sorcellerie comme au pays basque, dans le Labourd. C’est la crise du monde rural qui a amené le grand développement des procès, développement que l’Eglise et le pouvoir central ont appuyé à fond pour augmenter leur domination sur les masses rurales…

  • Par une bulle du 5 décembre 1484, le pape Innocent VIII fait enquêter sur les sorciers, les sorcières et la sorcellerie, en vue de définir les signes auxquels on peut reconnaître le pacte d’un individu avec le démon !

    Comme l’atteste cet acte, c’est curieusement à la fin du Moyen Âge, tandis que la foi médiévale recule au profit de la philosophie gréco-romaine, que les prétendues sorcières sont désignées à la vindicte publique !

    Au Moyen Âge, on ne brûle pas les sorcières mais on les expose et on les traite en pauvres folles. Tout change à partir du moment où disparaît l’Inquisition, en France et dans les pays germaniques : les tribunaux civils héritent des procès en sorcellerie et les juges, à la différence des inquisiteurs, croient volontiers au pouvoir maléfique des sorcières. Ils les font en conséquence brûler à l’égal des hérétiques.

    Les chasses aux sorcières sont un phénomène caractéristique de la Renaissance (fin du XVe siècle, XVIe et XVIIe siècles). Elles débutent vers 1430 et la plupart ont lieu entre 1560 et 1630. Elles se soldent par l’envoi au bûcher d’environ 30.000 à 60.000 malheureuses, pour environ le double de procès.

    Ces persécutions sévissent avec le plus d’intensité dans les régions germaniques et surtout en Suisse. Dans le seul pays de Vaud, on compte un total de 1700 bûchers (jusqu’à 25 en une seule année !). La dernière sorcière, Anna Göldi, a été décapitée en 1782 dans le canton suisse de Gladis. Elle a été réhabilitée le 28 août 2008.

  • Les juges qui président les procès pour sorcellerie ne manquent pas de coucher leurs opinions sur papier, ouvrages ainsi promis à un brillant avenir dans l’édition. Plusieurs "Best Sellers" font alors référence à l’époque : le Malleus Maleficarum, écrit en 1487 par deux dominicains allemands, le discours des sorciers, d’Henry Boguet, qui encourage l’étranglement des condamnés avant leur passage sur le bûcher, exception faite des Loups-garous, qu’il faut brûler vifs !

    Les condamnations pleuvent, être soupçonné envoi bien souvent à une mort horrible : à Toulouse, 400 personnes périssent par les flammes, en Lorraine, en 30 ans, Nicolas Rémy prononce la sentence fatidique contre deux à trois mille accusés. Il ressort de ces audiences que 8 accusés sur 10 sont des femmes, ayant souvent des penchants lesbiens ou des penchants vers la liberté vis-à-vis des hommes.

  • Contrairement à l’idée propagée par les Lumières, le Moyen Age, "superstitieux", n’a persécuté aucune sorcière.
    Le concept même de sorcellerie ne fut pas formulé avant la fin du Moyen Age et il n’y eu jamais au cours de l"Age sombre", de proçès collectifs et d’excécutions.
    Dans Rêver l’obscur, la californienne Starhawk propose un changement de perspective saisissant. Elle replace la chasse aux sorcières dans le contexte politique et économique des XVI & XVII eme siècles, du passage de la société féodale à l’économie de marché et au patriarcat salarié. Sans cette persécution, dit elle, impossible de comprendre les origines du capitalisme !

    Car tout bascule alors, l’economie, la société, les valeurs..en s’attaquant à celles qui défient l’ordre nouveau, les femmes paysannes qui prennent souvent la tête des mouvements contestant l’autorité et l’Eglise, mais aussi les célibataires, les vagabondes, les femmes agées qui incarnaient le savoir et la mémoire de la communauté, les persécuteurs anéantissent l’idée d’une révolution qui pourraient bénéficier aux femmes, aux pauvres et aux non propriétaires.

    Extrait de l’article dans le journal Télérama du 08/04/2015- Tous sorcières.

  • Contrairement à ce qu’elle prétend, c’est la bourgeoisie qui a développé l’oppression des femmes…

    Engels écrit dans L’Origine de la famille... :

    “Dans l’ancienne économie domestique (...), la direction du ménage, confiée aux femmes, était une industrie publique de nécessité sociale, au même titre que la fourniture des vivres par les hommes. Avec la famille patriarcale, et plus encore avec la famille monogamique, il en alla tout autrement. La direction du ménage perdit son caractère public. Elle ne concerna plus la société ; elle devint un service privé ; la femme devint la première servante, elle fut écartée de la participation à la production sociale. C’est seulement la grande industrie qui a réouvert - et seulement à la femme prolétaire - la voie de la production sociale.”

  • De quelles activités, les femmes ont été expulsées au profit d’une bourgeoisie par la campagne « contre les sorcières » ?

  • Les femmes occupaient au Moyen-Age la première place dans toutes les activités liées à la santé et sans nécessairement être des religieuses. Elles étaient non seulement sages-femmes, pourvoyeuses de moyens contraceptifs et d’avortement mais aussi infirmières, pharmacologues, herboristes, fabricantes d’onguents, de parfums, de produits aux plantes, de soins pour les blessés, etc… Les professions qui allaient devenir purement masculines étaient celles de médecin, chirurgien, pharmacien, etc…

    Il faut y rajouter tous les restaurateurs, les proxénètes (même la prostitution était ainsi aux mains des hommes), et surtout tous les travaux artisanaux et marchands dont les femmes sont évincées à la faveur de cette campagne anti-femmes…
    Si la religion a tenu à écarter les femmes, la bourgeoisie masculine est la principale bénéficiaire.

  • Rosemary Ruether souligne dans New Woman, New Earth : Sexist Ideologies and Human Liberation que « beaucoup d’idées projetées ensuite sur les sorcières, comme les orgies nocturnes et les sacrifices d’enfants, avaient d’abord été dirigées par l’Inquisition contre les hérétiques... L’image du Juif comme étranger démoniaque était semblable de bien des manières à celle de la sorcière... Le Juif était considéré comme un adorateur du diable, équipé de cornes, de griffes et d’une queue, et chevauchant une chèvre satanique. On croyait que le Juif, comme la sorcière, volait l’eucharistie et se livrait à d’autres caricatures blasphématoires des rituels catholiques »

  • La chasse au sorcière, ce n’est pas du passé. C’est aujourd’hui !!!

    Il existe des régions du monde où l’église chrétienne continue de persécuter des femmes accusées de sorcellerie !!! Il existe également des régions, notamment en Afrique comme au Centrafrique par exemple, où l’Etat continue de condamner des femmes après jugement sur ce même motif. Il existe de nombreux pays où des gens sont assassinés par la population sur cette même accusation !!! Et la religion chrétienne, en continuant à accuser les sorcières, est l’un des responsables de ces crimes !!!

  • Amnesty International a appelé la Papouasie-Nouvelle-Guinée à cesser les crimes commis contre les femmes soupçonnées de pratiquer la magie noire. Ce n’est pas le seul pays dans lequel les femmes sont victimes de ces croyances ancestrales.

    Cela a servi à justifier le meurtre d’une femme en Papouasie-Nouvelle-Guinée. La victime, prénommée Misila, a été tuée dans une partie reculée de la région des Highlands, d’après Amnesty International. « Le meurtre brutal de Misila met en lumière l’échec patent du gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée à faire cesser la vague d’attaques dirigées contre les personnes accusées de sorcellerie et qui sont principalement des femmes », écrit Kate Schuetze, membre de l’association, dans un communiqué. « Le gouvernement doit agir immédiatement pour s’assurer que les auteurs de ces attaques soient traduits en justice. »

    Les défenseurs des droits de l’homme se démènent depuis longtemps pour que cessent les lynchages de personnes accusées de sorcellerie. Car des cas de magie noire sont régulièrement signalés dans ce pays pauvre de la Mélanésie. En 2013, le meurtre particulièrement brutal d’une jeune femme avait relancé leur campagne de sensibilisation. Kepari Leniata, 20 ans, avait été dénudée, attachée, arrosée d’essence et brûlée vive devant les parents d’un garçon décédé des suites d’une maladie. Après ce meurtre commis en 2013, les autorités avaient annulé une loi de 1971 qui prévoyait que les auteurs d’un crime commis contre des personnes soupçonnées de sorcellerie pouvaient bénéficier de circonstances atténuantes et d’une condamnation allégé.

  • Dans « Sorcières, sages-femmes et infirmières », Barbara Ehrenreich compare cette chasse aux sorcières - souvent réduite à un épiphénomène - à une véritable « guerre contre les femmes » menée par les classes dirigeantes entre les XIVe et XVIIe siècles, guerre qui a fait des centaines de milliers de victimes. Selon l’écrivain, ces femmes menaçaient alors la structure du pouvoir en place en Occident. Les sages-femmes et les guérisseuses étaient « les seuls médecins généralistes de la population (féminine paysanne), qui n’avait ni docteurs ni hôpitaux et qui souffrait amèrement de la pauvreté et de la maladie ». Elles proposaient une médecine douce à base de plantes à l’opposé de celle, « héroïque », faite de saignées et de lavements. Aujourd’hui, et pour d’autres raisons, propres à chaque culture, plusieurs régions du monde continue de pourchasser leurs prétendues sorcières « mal aimées ».

  • Nela a 9 ans, les cheveux courts et crépus, de grands yeux noirs. Elle vit dans un orphelinat de Viana, à la périphérie est de Luanda, la capitale de l’Angola.
    Pourtant, ses parents sont bien vivants. Mais ils ne veulent plus la voir. Ils l’ont bannie de leur famille et de leur vie parce qu’ils l’accusent d’être une sorcière.

    La rupture a eu lieu, il y a trois ans. Nela a alors six ans, une petite sœur de deux ans et un frère encore nourrisson. La mère est fragile et rencontre des difficultés. Elle consulte le marabout du village.

    Ce dernier cherche la cause du mal et il la trouve en la personne de Nela et de son frère. Il les accuse de porter en eux de mauvais esprits, d’être le mal. Il traite Nela de « bruxa », c’est-à-dire « sorcière » en portugais.

    « Ma mère m’a accusée d’être une sorcière, elle s’est mise à me battre et elle voulait me tuer parce qu’elle avait parlé avec son marabout. Sur ses conseils, elle a tué mon frère. Elle l’a tué. Ils nous accusaient tous les deux d’être des sorciers alors elle l’a pris, elle l’a noyé et il est mort », raconte Nela d’une toute petite voix.

    Les cas d’enfants accusés de sorcellerie comme Nela sont concentrés dans le nord de l’Angola, à la frontière avec la République démocratique du Congo. Et pour cause, le phénomène est originaire de cette zone, celle du bassin du Congo sur des territoires appartenant à l’aire culturelle Kongo.

    On le retrouve donc également en République démocratique du Congo (RDC) et au Congo-Brazzaville et dans quelques pays voisins, mais de façon plus sporadique.

    Les conflits et déplacements de population, nombreux dans cette zone, ont contribué à diffuser ces pratiques. Toutefois, en Angola comme dans les pays voisins, il est impossible de savoir le nombre d’enfants concernés.

    En avril 2010, un rapport de l’Unicef sur le sujet soulignait que 23.000 enfants étaient contraints de vivre dans les rues de Kinshasa, en raison d’accusations de sorcellerie.

    Toujours selon ce même rapport, ils étaient 423 dans une ville du nord de l’Angola d’après les estimations des autorités locales.

  • Bonjour, je fais actuellement mes TPE sur les sorcières, je voulais donc me servir de votre article, cependant je remarque quelques incohérences entre ce qu’un livre me dit (le livre en question est plutôt précis et fiable) , par exemple dans mon livre on me dit que Louis Servin aurait écrit un ouvrage nous disant que la procédure consistant à jeter une femme dans l’eau pour prouver qu’elle était une sorcière ou non s’est arrêtée dans les alentours de 1594 , cependant vous nous affirmez que c’est en 1599 que cette procédure a été montrée par Jacques Ier d’Angleterre. Cela est il une erreur de ma part ou votre article n’est-il pas fiable ?

  • Le Vatican demandera-t-il pardon aux victimes des procès de sorcellerie ?

    Le canton de Glaris a officiellement réhabilité mercredi Anna Göldi, « dernière sorcière d’Europe », 226 ans après sa condamnation par l’Eglise et sa décapitation. La gouvernante avait été jugé Le canton de Glaris a officiellement réhabilité mercredi Anna Göldi, « dernière sorcière d’Europe », 226 ans après sa condamnation par l’Eglise et sa décapitation. La gouvernante avait été jugée pour avoir empoisonné une fillette dont elle avait la garde.

    Après Glaris en 2008, Fribourg vient de blanchir « sa » dernière sorcière, brûlée en 1731. Normal, en ces temps de réhabilitations tous azimuts et très médiatisées : la Suisse détient le record européen de cette chasse particulière.

    Au Moyen Age, quand il s’agissait d’expliquer les catastrophes ou les épidémies, il fallait en punir les responsables, forcément coupables de magie et de pactes avec le diable dirigés contre la chrétienté.

    Pour « faire » une sorcière, il suffisait qu’un comportement rebelle ou marginal attire l’attention, nourrisse la rumeur publique jusqu’à alerter les autorités, lesquelles déclaraient alors la chasse ouverte.

    Deuxième étape : pour condamner une sorcière, il suffisait de lui briser les jambes, de lui arracher les ongles, de lui faire le coup de la baignoire, etc. A la seule vue de ces techniques raffinées, actuellement exposées au Musée de Morat (Fribourg), on a envie d’avouer avoir tué père et mère.

    C’est la torture qui faisait les sorcières. Et le fanatisme religieux.

    Un record, et même un double record. « Fribourg a été le 3e lieu en Europe à exécuter des sorcières, dès 1429. Et une des premières autorités politiques à instruire des procès en sorcellerie sans inquisiteurs religieux », souligne la médiéviste.

    Au départ, c’est l’Eglise la plus orthodoxe, soutenue par le pouvoir laïc, qui s’est mise à poursuivre l’hérésie, puis la magie, au point de créer cette hérésie imaginaire.

    L’Inquisition, poursuit Kathrin Utz Tremp, « avait besoin de cette sorte de ’contre-monde’ dirigé par le diable, même si cela ne correspondait à aucune réalité ». A partir du 16e, et surtout du 17e siècle, ce sont les pouvoirs politiques qui prennent le relais.

    Ils décident que, comme la magie noire, la magie blanche, plus ou moins innocente, repose elle aussi sur un pacte préalable avec le diable. Pour la médiéviste, ce concept se distingue de la sorcellerie actuelle dans le tiers monde, « qui ne repose pas sur une religion et d’où le diable est absent ».

    C’est ainsi que les procès pour hérésie menés par l’Eglise ont débouché sur des procès pour sorcellerie menés par l’Etat laïc, qui a eu besoin de la sorcellerie pour construire son territoire et asseoir sa juridiction, surtout dans les campagnes.

    Au 15e siècle, les procès concernaient une majorité d’hommes qui ne se soumettaient pas à la cathédrale ou à la cité. Là, il y avait une notion politique de révolte.

    A partir du 16e, et surtout du 17e siècle, une fois leur pouvoir bien assis, les autorités se mettent à utiliser la sorcellerie pour assurer l’ordre public et la discipline sociale. « Et c’est là que la grande chasse a commencé », poursuit Kathrin Utz Tremp.

    Cette dernière précise que la répression fit alors entre 70 et 80% de victimes féminines coupables d’être pauvres, célibataires et... femmes, comme la Catillon, exécutée en 1731 à Fribourg.

    L’historienne relève encore que la répression a été beaucoup plus forte en Suisse romande. « L’Eglise a été confrontée à l’hérésie d’un mouvement laïc, les Waldenser, alors qu’il n’y a pas eu d’Inquisition en Suisse orientale, plutôt orientée vers la magie blanche. »

    La religion a toujours joué un rôle prépondérant dans le canton du Valais, et surtout dans celui de Fribourg. « Là, il existait une sorte de contre-histoire qui faisait que l’histoire de ce canton était souvent réactionnaire. C’est pareil pour les persécutions qui partaient d’une orthodoxie très dure, apparue à la fin du 16e siècle avec la contre-réforme. »

  • Même de grands poètes ont versé dans la haine des sorcières !!!!

    En 1550, Ronsard, le Prince des poètes, se déchaîne contre une "vieille sorcière" du Vendômois, et regrette que le bourreau se soit contenté de la fouetter.

    Puisse-t-elle mourir bientôt !

    Et que ses os diffamez (és)

    Privez(és) d’honneur de sépulture

    Soient des corbeaux goulus pasture (pâtures)

    Et des chiens affamez (és)

    Les forces mauvaises de la nature lui obéissent.

    Au seul soupir de ton haleine

    Les chiens effrayez (és) par la plaine,

    Aiguisent leurs abois,

    Du Bellay, accuse de même une autre vieille femme :

    Par toy (toi) les vignes sont gelées,

    Par toy (toi) les plaines sont greslées (grêlées)

    Par toy (toi) les arbres se démentent (renversent)

    Par toy (toi) les laboureurs lamentent

    Leurs bledz (blés) perdus, et par toy (toi) pleurent

    Les bergers leurs troupeaux qui meurent.

  • En 1326, Jean XXII rédigea la bulle "Super Illius Specula" ; la sorcellerie est désormais assimilée à une hérésie, les inquisiteurs pouvaient enfin la poursuivre.
    Confirmé par les bulles de 1585 et 1623.

    En 1484, Innocent VIII, reconnaît la réalité des pratiques magiques.

    En 1521, Léon X proteste avec menace d’excommunication et d’interdit, auprès du sénat de Venise qui contrecarre l’action des inquisiteurs de Brescia et de Bergame.
    Adrien VI ordonne aux inquisiteurs de Crémone et de Côme de poursuivre la sorcellerie avec sévérité.

    Dans les diocèses de Cologne, Trèves, Cambrai, Malines, Tournai, Anvers, Namur, Metz et Liège, 17 conciles, tenus entre 1536 et 1643, avaient appelé à la répression de la sorcellerie.

    L’archevêque de Trèves fit brûler, entre 1587 et 1593 et ceci dans 22 villages, 368 "sorcières".

    A Wurzburg en Allemagne, le Prince Evêque Philippe Adolf von Ehrenberg qui régna de 1623 à 1631, fit brûler 900 "sorcières".

    A Bamburg en Allemagne, l’évêque Gottfried Johan Georg II Fuchs von Dornhem, qui regna de 1623 à 1630, fit brûler au moins 600 "sorcières", ce qui lui valut le surnom de "l’évêque des sorcières"

    Les autorités protestantes firent de même. Aux Provinces-Unies, entre 1580 et 1620, 15 synodes condamnèrent et excommunièrent les sorciers.

  • Le tournant de la chasse aux sorcières se fait en 1550. Là, le nombre de procès augmente significativement, les accusations de sorcellerie se démocratisent et surtout, se féminisent. L’accusation devient une arme sexiste contre les femmes qui "remettaient en cause la vision patriarcale de la femme idéale", écrit Alison Rowlands.

    "Avec un taux plausible de 48% des condamnations à mort sur 110.000 procès recensés en Europe (hors lynchages), les juges laïques font exécuter environ 60.000 à 70.000 sorcières et sorciers – 7 à 8 femmes sur 10 condamnés (Levack, 2001)", lit-on dans "Présumées coupables" (éd. Iconoclaste, 2017).

    Maxime Gelly - Perbellini ajoute :

    "La question de la sorcière embrasse celle des stéréotypes que l’on véhicule sur les femmes et plus globalement sur les personnes à la marge. Ces stéréotypes peuvent se rapprocher de ce qu’on dit sur les juifs ou les errants, par exemple."

  • Jacques 1er d’Angleterre a, lui-même, encouragé les procès de sorcières avant de changer d’avis… Il assiste au procès des sorcières de North Berwick, la première persécution importante en Écosse depuis le Witchcraft Acts de 1563. Plusieurs personnes, dont la plus connue, Agnes Sampson étaient convaincues de sorcellerie et d’avoir provoqué des tempêtes contre les navires du roi. Jacques devint obsédé par ces menaces et écrivit même le Daemonologie, traité de démonologie opposé aux pratiques de sorcellerie et qui a pu servir de matériaux à la tragédie de Shakespeare Macbeth. Jacques a personnellement supervisé des séances de torture sur des femmes accusées de sorcellerie. Après 1599, il devint plus sceptique et plus tard écrivit à son fils, le prince Henri le félicitant de suivre également cette voie et l’encourageant à faire preuve de prudence face à de fausses accusations qui ne reposent que sur des illusions.

    Voir ici par exemple

    Et ici encore

    On peut lire aussi ceci

  • L’explication est là : ce sont essentiellement des femmes qui ont été condamnées au bûcher !

    « L’unique médecin du peuple, pendant mille ans, fut la Sorcière… »

    Sprenger dit (avant 1500) : « Il faut dire l’hérésie des sorcières, et non des sorciers ; ceux-ci sont peu de chose. » — Et un autre sous Louis XIII : « Pour un sorcier, dix mille sorcières. »

    Lire la suite

    Wier s’apitoie sur les sorcières ; il les appelle pauvresses, petites vieilles, petites femmes malheureuses (misellae, anicalae, mulierculae, vetulae), et il apostrophe vigoureusement, avec une indignation généreuse, leurs juges, qu’il appelle bourreaux.

    Lire la suite

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