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La faillite du capitalisme

mercredi 5 juin 2013, par Robert Paris

La faillite du capitalisme

Par Nick Beams

Les chiffres publiés la semaine dernière sur l’état de l’économie européenne ne sont pas seulement l’expression d’une crise économique et sociale qui s’intensifie. Ils ont une grande importance historique et marquent la faillite de l’ordre économique capitaliste.

Dans ses dernières prévisions, le Fonds monétaire international anticipe que l’économie de toute la zone euro va se contracter de 0,3 % cette année. Au chapitre des grandes économies en récession, la France devrait rejoindre l’Italie et l’Espagne. La contraction est importante en soi, mais le fait qu’elle survient près de cinq ans après l’éclatement de la crise financière montre qu’il y a des processus sous-jacents à cette crise. L’économie européenne s’enlise dans une spirale descendante.

Un taux de chômage de 27 %, digne de la Grande Dépression, frappe l’Espagne et un taux de 57 % affecte la jeunesse. Plus de six millions de travailleurs espagnols sont sans emploi. En France, le nombre total de chercheurs d’emploi qui n’ont pas travaillé du tout au cours du mois précédent est à 3,2 millions, un record. À travers l’Union européenne, 26 millions de personnes, soit 12 % de la main-d’œuvre, sont sans emploi.

En Grande-Bretagne, la croissance économique était de 0,3 % seulement au dernier trimestre. Même si les milieux officiels ont laissé échapper un soupir de soulagement, car la Grande-Bretagne venait d’échapper à une récession à « triple creux », l’économie britannique demeure tout de même 2,6 % en dessous de ce qu’elle était avant le début de la crise.

Le produit intérieur brut de la Grande-Bretagne connaît sa chute la plus marquée et soutenue depuis un siècle. Par comparaison, au même point de la crise – environ 51 mois après le début de la crise – la croissance économique avait repris durant la Grande Dépression, le ralentissement des années 1970 et la récession du début des années 1990.

De plus, la perspective économique européenne s’assombrit. Dans un discours prononcé le mois dernier, le directeur général adjoint du Fonds monétaire international, David Lipton, a soutenu que l’Europe risquait de vivre un « scénario de stagnation ». « Les investissements déclinent et le chômage continue d’augmenter [et] les marchés financiers demeurent fragmentés. »

La situation européenne n’est cependant que la plus vive expression de l’état du capitalisme mondial. Aux États-Unis, la croissance de l’économie est anémique à 2,5 %, le chômage est semblable à ce qu’il était durant la Grande Dépression et la pauvreté et les inégalités sociales sont en hausse. Pendant que la Réserve fédérale injecte de l’argent dans les marchés financiers, faisant ainsi gonfler les profits, les salaires réels de la vaste majorité de la population continuent de chuter.

Pour les médias bourgeois, leurs commentateurs et spécialistes, la chute continuelle de la position sociale des masses n’est qu’une autre expression de la « nouvelle norme ». Aucun d’entre eux ne daigne expliquer pourquoi, malgré les plus grands progrès scientifiques et technologiques de l’histoire, des couches de plus en plus grandes de la population sont appauvries.

Mais la signification d’un tel développement a été expliquée par Karl Marx il y a plus de 160 ans. Un tel phénomène, expliquait-il, montre que « la bourgeoisie n’est plus apte à être la classe dirigeante de la société et à imposer, sous forme de loi primordiale, ses conditions d’existence à la société ».

Lors d’un récent forum organisé par la Bank of England à Londres, le chef économiste au FMI, Olivier Blanchard, a exposé les grandes lignes des leçons de la crise. Il s’agit d’une confession de faillite intellectuelle et politique.

Blanchard a admis avoir été pris complètement par surprise par l’éclatement de la crise financière en 2008, croyant que rien de tel ne pouvait se produire. Il n’avait pu s’expliquer la « tuyauterie » du système financier et n’avait pas pris en considération l’interconnexion de l’économie mondiale, qui ont mené à l’effondrement du commerce mondial en 2009.

De plus, après avoir admis que « les outils monétaires et financiers traditionnels sont tout simplement inadéquats pour résoudre les problèmes bien précis du système financier », il a dit qu’il ne savait pas si les soi-disant outils macroprudentiels allaient vraiment pouvoir réguler le système financier.

Et Blanchard n’est certainement pas le seul à s’exprimer ainsi. En septembre dernier, après que la Réserve fédérale américaine a décidé de développer sa politique d’assouplissement quantitatif, Richard Fisher, un membre du Federal Open Market Committee, avait reconnu que « personne ne sait vraiment comment ramener l’économie sur la bonne voie » et qu’aucune banque centrale « n’a l’expérience qui nous permettrait de sortir de cette situation ».

La même confusion régnait à une réunion des plus grands économistes organisée par le FMI après sa rencontre du printemps tenue le mois dernier à Washington. George Akerlof, gagnant du prix Nobel, a comparé la crise économique à un chat qui avait grimpé à un arbre, ne savait pas comment descendre et était sur le point de tomber. Un autre économiste a ajouté qu’après cinq ans il était peut-être temps de descendre le chat de l’arbre, mais un autre prix Nobel, Joseph Stiglitz a expliqué : « Il n’y a pas de véritable théorie économique qui puisse expliquer pourquoi le chat est toujours dans l’arbre. »

La faillite de cette scolastique médiévale et de l’ordre social féodal qui la sous-tend fut exprimée dans les discussions dans lesquelles on se demandait combien d’anges pourraient tenir sur une tête d’épingle.

Les théologiens contemporains du capitalisme et leurs discussions sur les chats dans les arbres ont beau sembler aussi ridicules, ce n’est pas à cause de défauts personnels. En dernière analyse, ils sont incapables d’expliquer la plus profonde crise en trois quarts de siècle, car l’ordre socioéconomique qu’ils défendent est hostile à tout progrès historique.

Les idéologues de la classe dirigeante ont profité de l’effondrement de l’URSS pour annoncer la fin du socialisme, mais les économistes et experts des médias restent silencieux sur la faillite du capitalisme.

Toutefois, derrière cette confusion grandit la peur que cet effondrement économique puisse provoquer une explosion de luttes sociales et de luttes des classes. Un important article paru récemment dans le magazine Time notait que Marx avait élaboré la théorie que « le système capitaliste allait inévitablement appauvrir les masses du monde pendant que la richesse mondiale allait être concentrée entre les mains d’une cupide minorité, causant des crises économiques… De plus en plus, l’expérience semble indiquer qu’il avait peut-être raison. »

La foule de statistiques sur la situation en Europe et internationalement montre que le capitalisme est en crise terminale, et cela a des implications révolutionnaires.

La désintégration intellectuelle des défenseurs de l’ordre bourgeois montre que seule une lutte politique consciente de la classe ouvrière, armée d’un programme socialiste et internationaliste, va créer les conditions où celle-ci pourra extirper la société de la spirale descendante de décomposition sociale qu’est l’effondrement du système de profit.

Messages

  • Thèses du site « Matière et révolution » sur la crise actuelle

    1- Il n’y a aucune origine accidentelle à la crise actuelle. Pour les capitalistes, loin d’être une surprise, elle est une catastrophe annoncée. C’est seulement pour le grand public, et particulièrement pour les travailleurs, qu’elle est tout ce qu’il y a de plus étonnant : le système qui domine le monde, sans une puissance capable de le renverser, sans une classe sociale qui semble lui contester ce pouvoir, est en train de s’effondrer et de se détruire lui-même.

    2- Ce n’est pas une crise conjoncturelle. Ce n’est pas une crise américaine. Ce n’est pas une crise immobilière. Ce n’est pas une crise financière. Ce n’est pas une crise bancaire. Ce n’est pas une crise pétrolière. Ce n’est pas une crise de confiance. Ce n’est pas une crise inflationniste. Ce n’est pas une crise de l’endettement. Ce n’est pas une crise due à une simple récession. Bien sûr, il y a tout cela à la fois mais cela n’explique pas le fondement de la crise. C’est le système capitaliste tout entier qui est en crise. Le terme « systémique » pour caractériser la crise signifie que c’est le fondement, le principe même, du capitalisme qui est mort.

    3- C’est l’accumulation du capital qui ne peut plus fonctionner. Et ce pour une raison simple. Le mécanisme d’accumulation du capital a atteint sa limite.

    4- Cela signifie que le capitalisme n’a pas subi une maladie, ni un défaut, ni un comportement défaillant de tels ou tels de ses acteurs. Non, le capitalisme meurt parce qu’il a été au bout de ses possibilités. C’est son succès lui-même qui provoque sa fin. Il n’y a pas moyen d’inventer suffisamment d’investissement vu la quantité de capitaux existant dans le monde. Tous les cadeaux des Etats et des banques centrales au capital ne peuvent qu’être des palliatifs d’une durée de plus en plus limitée.

    5- L’accumulation du capital est le but même de la société capitaliste. Produire, exploiter, vendre des marchandises, tout cela n’est qu’un moyen. Faire de l’argent, s’enrichir n’est aussi qu’un moyen. Le but même est de transformer cet argent en capital, c’est-à-dire trouver les moyens de l’investir et de lui faire rendre du profit, lequel profit doit lui-même encore être investi.

    6- C’est ce mécanisme qui ne fonctionne plus. Il n’est pas grippé. Il n’est pas menacé. Il est mort. Il a été maintenu en survie pendant un temps déjà très long par des mécanismes financiers et eux-mêmes viennent d’atteindre leurs limites. On ne peut pas maintenir le mourant tellement longtemps même en inventant de nouvelles techniques de survie artificielle. Bien entendu, aujourd’hui tout le monde accuse le système financier et ses « folies « , mais c’est oublier que ce sont ces prétendues folies, des politiques pratiquées parfaitement consciemment, qui ont permis au système de perdurer au-delà de ses limites.

    7- Les guerres locales comme celles d’Irak, celle d’Afghanistan, mais aussi de Yougoslavie et du Timor ont été aussi des moyens de faire durer le système. Mais, là aussi, les limites sont atteintes.

    8- Quel moyen aurait le système de se redresser vraiment ?

    Celui de détruire une très grande partie des richesses et des marchandises accumulées. Il ne lui suffit pas de détruire les richesses fictives de la finance. Il lui faut, pour repartir, détruire une partie de la planète comme il l’a déjà fait, dans des circonstances semblables, lors de deux guerres mondiales.

    9- De là découle l’alternative pour les classes ouvrières et les peuples. Entre le Capital et le Travail, il y a maintenant une question de vie ou de mort. Même si la classe ouvrière ne souhaite pas consciemment se préparer au renversement définitif du système et à la fondation d’une société reposant sur la satisfaction des besoins collectifs des peuples de la planète, c’est le capitalisme lui-même qui va la contraindre à choisir.

    10- Les mécanismes politiques et sociaux de domination sont désormais dépassés. On va voir du nouveau. Les « démocraties » occidentales vont montrer toute leur barbarie aux populations qui y sont le moins préparées : celles de leurs propres pays. Les dictatures, les fascismes vont revenir au goût du jour.

    11- Il est urgent de préparer l’avant-garde aux situations à venir. Il n’y a rien de plus urgent que de comprendre la crise actuelle et ses conséquences et de les faire comprendre autour de nous. Ce qui est à l’ordre du jour n’est pas seulement de se défendre contre des attaques. C’est de se défendre contre une attaque idéologique de grande ampleur. Les gouvernants vont tâcher de donner leur propre interprétation des événements pour nous convaincre qu’eux seuls peuvent faire revenir l’époque passée. Ils mentent. Elle ne peut pas revenir. Ils vont chercher ainsi à nous empêcher de nous organiser entre nous pour comprendre, discuter et répondre aux situations. La crise de confiance des peuples dans le système est dangereuse si les opprimés, si les peuples se mettent à s’organiser, et déjà à se réunir pour confronter les points de vue, pour donner leurs avis sur la signification de ce qui se passe et sur les moyens d’y faire face.

    12- Ce que souhaite la classe dirigeante, c’est que chacun se retrouve face à ses peurs, face aux problèmes matériels touchant sa vie, celle de sa famille, et se demande seulement quel dirigeant bourgeois va pouvoir le sauver. Des sauveurs suprêmes, des Hitler ou des chefs civils ou militaires dictatoriaux prétendants tenir la solution, on va en voir défiler. La première des tromperies qui va se présenter à nous sera celle des réformistes de tous poils qui auront quantité de prétendues solutions pour sauver à la fois le système et la population. Le seul effet de leurs discours sera de démobiliser les opprimés et d’éviter tout risque révolutionnaire aux exploiteurs afin de leur permettre de préparer leurs vraies solutions violentes : dictatures et guerres. D’avance il faut se préparer à n’avoir confiance qu’en nous-mêmes.

    13- Au lieu de se protéger, ce qui ne sera pas possible, il faut saisir l’occasion. Le capitalisme est atteint dans ses fondements. Profitons-en pour en finir avec ce système d’exploitation. Nous sommes des millions de fois plus nombreuses que les exploiteurs et bien plus forts que le système si nous en sommes conscients. La fin du capitalisme ne sera une catastrophe et un recul massif que si nous nous contentons de nous défendre, catégorie par catégorie, pays par pays, groupe social par groupe social. Cela peut être le prélude d’une avancée historique de l’humanité si nous décidons d’en finir avec l’esclavage salarié

    « Vous avez aimé la crise des supprimes, vous adorerez la crise des LBO (LBO = titrisation des dettes des sociétés d’achats par endettement avec effet de levier) »

    Le « Canard Enchaîné » le 22 septembre 2008

     » Un cycle de croissance de dix ans s’achève. Au-delà du retournement cyclique, il est clair que l’on touche aujourd’hui aux limites d’un modèle de développement »

    L’économiste Jean-Hervé Lorenzi Cité par « le Figaro » du 7 juillet 2008

    Précisons que ce qui est menacé dans la crise actuelle, c’est tout simplement le capitalisme ! Voilà ce que ne voudrons certainement pas entendre tous ceux pour qui l’existence éternelle de l’empire actuel ne doit même pas être questionnée.

    En effet, ce qui est mis en cause, c’est tout simplement le niveau trop élevé de la capitalisation mondiale par rapport aux capacités d’absorption des marchés. Or, c’est le mécanisme fondamental qui est ainsi atteint : l’augmentation du capital.

    L’hypertrophie de la finance apparaît comme la cause de la crise mais elle en est surtout la conséquence, le seul moyen qu’a trouvé le système pour perdurer.

  • La décision de la Banque du Japon, mardi, de ne pas amplifier son récent programme d’assouplissement monétaire destiné à stimuler la croissance du pays a alimenté les craintes des acteurs du marché de voir la Réserve fédérale américaine (Fed) commencer à revenir sur ses propres mesures de soutien.

    La politique monétaire très accommodante de l’institution a en effet largement soutenu l’embellie des Bourses ces derniers mois, notamment via un programme de rachats d’actifs à hauteur de 85 milliards de dollars par mois qui permet d’inonder les marchés de liquidités. Elle se réunit la semaine prochaine, un rendez-vous qui pourrait bien sonner la fin de ce programme de rachats d’actifs, selon les opérateurs.

    Tokyo, qui accusait la baisse la plus forte, souffre en outre d’une remontée du yen face à l’euro et au dollar, ce qui est mauvais pour ses exportations. Le yen valait 94,86 yens pour un dollar dans la matinée à Tokyo, soit un plus haut face au billet vert depuis deux mois, contre 95,94 yens la veille au soir à New York. La devise japonaise oscillait autour des 98 yens pour un dollar en début de semaine et a regagné plus de 8,5 % depuis fin mai.

    Pour Hirokazu Kabeya, courtier chez Daiwa Securities, les fluctuations de la Bourse "sont telles ces derniers temps que peu de gens ont envie d’acheter. Résultat, c’est une sorte de situation de la poule et de l’œuf : la volatilité du marché éloigne les acheteurs et l’absence d’acheteurs conduit à la volatilité du marché."

    Les prix du pétrole se repliaient en Asie, en raison d’une hausse surprise des réserves hebdomadaires américaines de brut. Jeudi matin à Singapour, le baril de "light sweet crude" (WTI) cédait 37 cents, à 95,51 dollars. Le baril de Brent de la mer du Nord perdait 21 cents à 103,28 USD.

    La Bourse de Tokyo connaissait un très fort repli jeudi 13 juin à la mi-séance, perdant 5,3 % pour revenir à des niveaux proches de ceux qui prévalaient avant les mesures de relance de la politique monétaire par la Banque du Japon, début avril. L’indice Nikkei s’établissait à 12 587,40 points après être descendu à 12 415,85 en cours de séance matinale. Le Topix concédait lui 4,1 % à 1 051,67 points.

    Vers 5 h 30, Hong Kong cédait 2,7 % et Shanghai 3,08 %. Séoul reculait de 1,25 %, tandis que Sydney abandonnait 0,88 %. Les places des pays émergents, prisées des investisseurs étrangers à la recherche de rendements meilleurs que dans les pays occidentaux, étaient elles aussi en nette baisse, en raison de retraits de fonds : Manille perdait 4 %, Bangkok 4,6 % et Jakarta 1,54 %.

    La veille, Wall Street avait reculé de 0,84%, terminant ainsi dans le rouge pour la troisième séance consécutive, une première depuis le début de l’année. Les investisseurs s’interrogent de plus en plus sur la pérennité des mesures de soutien à l’économie apportées par les banques centrales.

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