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Du « socialisme national » de Montebourg-Valls-Hollande au national-socialisme

dimanche 5 janvier 2014, par Robert Paris

Du « socialisme national » de Montebourg-Valls-Hollande au national-socialisme

La France d’abord, c’est slogan commun de Montebourg à Le Pen et de Valls à Mélenchon. Bien entendu, cela ne choque pas les milieux populaires, habitués aux cocoricos de la gauche à l’extrême droite. Il est pourtant frappant que les uns et les autres se retrouvent sur à peu près les mêmes déclarations haineuses contre les étrangers et les prétendus dangers qu’ils représenteraient pour la population française. A l’heure où c’est le système mondial capitaliste qui menace les peuples et pas un pays particulier qui en menace un autre, à l’heure où tous les peuples travailleurs de la planète ont un intérêt commun et des ennemis communs, il est frappant de voir que toutes les tendances politiques de l’arc en ciel politicien convergent à ce point à pousser les peuples contre les étrangers.

Leur leitmotiv économique, politique et social est bel et bien le cocorico français !

En économie, leur solution est la défense de la France. En termes de société, c’est encore la défense de la France. En termes sécuritaires, c’est encore et toujours la défense de la France.

Et toujours cette défense contre les attaques de l’Etranger.

Qu’ils s’appellent Sarkozy ou Hollande, Guéant ou Valls, Mélenchon ou Montebourg, tous n’ont qu’un mot à la bouche : la France !

Pour eux tous, la seule question économique, c’est la France. La seule question politique, c’est la France. La seule question sociale, c’est la France. La seule question identitaire, c’est la France.

Ils sont tous capables d’accents guerriers s’il s’agit de dénoncer un patron étranger, américain ou indien mais pas un mot si la même attaque provient de l’ensemble du patronat français menant une attaque conjointe avec une véritable vague concertée de licenciements massifs. Là, carrément, ils ne l’ont pas vue, ils ont fait semblant de ne pas voir la riposte ouvrière mondiale et ils l’ont occultée ! Pour eux, il ne peut s’agir d’une seule et même classe sociale mondiale qui fait face à la même attaque du même système mondial. Cela fait des décennies qu’ils ont théorisé qu’aucune force sociale ne s’oppose plus au système capitaliste, à part la vague terroriste islamique !

Les travailleurs des pays émergents sont considérés par eux comme les ennemis des emplois en France. Tous affirment que les disparitions d’emplois proviennent de la concurrence mondiale et pas du désinvestissement massif et international des capitaux privés. Même dans les pays émergents, ce désinvestissement est le phénomène principal qui cause l’effondrement économique, social et politique mondial.

Il est frappant de remarquer qu’en France le gouvernement socialo-écolo bourgeois est en tête de la campagne contre les travailleurs immigrés, en tête de la campagne contre les sans papiers, en tête de la campagne contre les Roms, en tête contre la campagne contre le travail en France des Bulgares et des Roumains, accusés de prendre l’emploi des Français, peu après les mêmes accusations contre les Polonais.

Le discours de « la France d’abord » n’est pas bien différent de la gauche de la gauche à l’extrême droite. Tous prétendent qu’il faut dresser des frontières pour protéger la population, les emplois, les conditions d’existence. Mais toutes les mesures qu’ils préconisent ne servent qu’à blanchir le capital d’origine nationale de tous les crimes antisociaux qu’il commet, de la destruction des emplois, des conditions sociales, de l’accès au logement, à la santé, à l’éducation.

Tous font comme s’il avait existé auparavant une « économie capitaliste nationale » et qu’on avait, par laxisme gouvernemental, laissé se distendre et s’étioler. C’est entièrement faux : il y a belle lurette qu’il n’existe plus en France qu’une fraction de l’économie mondiale, prenant une part de la division mondiale du travail et profitant de cette portion qui lui est réservée par le partage international.

Le retour au « chacun dans son pays », s’il devait passer du discours démagogique des politiciens cherchant à détourner la colère populaire vers le nationalisme outrancier, ne servirait pas à fonder un « véritable capitalisme national » mais servirait à opposer entre eux les travailleurs pour les détourner de la lutte social contre la classe exploiteuse, à les préparer psychologiquement à la guerre mondiale. En termes économiques, le retour dans les frontières ne représenterait nullement une solution économique pour la relance du développement du pays mais, s’il était mis en pratique, un retour en arrière de grande ampleur sur le terrain économique, social et politique, on peut même dire un retour au féodalisme ! Ce serait revenir en arrière de centaines d’années en termes de développement historique !

En attendant, c’est la propagande de la gauche gouvernementale qui sert à justifier le passage de l’opinion publique de la confiance aveugle dans le capitalisme à la haine contre les autres nations, du capitalisme dynamique concurrentiel au capitalisme aux abois et en plein effondrement. C’est elle qui permet de développer à grande échelle les sentiments xénophobes, racistes, nationalistes et guerriers.

Plus la catastrophe économique, sociale et politique due à l’effondrement du système capitaliste se confirme et apparaît clairement aux milieux populaires, plus les classes dirigeantes et leurs suppôts des gouvernements mettent en place les dérivatifs de la colère populaire à venir dont la révolution du monde arabe et du Maghreb a été l’annonciateur. Le premier de ces moyens de détourner la colère des masses prolétariennes est bien évidemment la dénonciation de prétendues « forces étrangères » qui détruiraient « notre économie nationale ». Si les masses en ébullition se tournaient contre d’autres pays dits « étrangers », les accusant de les avoir plongé dans la crise, les classes dirigeantes et les Etats auraient bien moins de mal à gérer la crise sociale qui vient…

La thèse sur laquelle ils se fondent consiste à affirmer que la crise, la dette, les fermetures d’usine, le chômage et toutes les catastrophes économiques et sociales qui en découlent proviendraient d’ailleurs, de l’extérieur du pays. Cela suppose qu’en se renfermant dans nos frontières, dans nos valeurs "nationales", on résoudrait la crise.

Mais l’étranger, c’est qui ? Pour les uns c’est l’Europe et l’euro qui nous refilent leur crise. C’est la Grèce qui « aurait abusé ». C’est l’Espagne qui aurait trop spéculé sur l’immobilier. C’est l’Allemagne qui écraserait de sa domination le reste de l’Europe. C’est l’Angleterre qui n’a jamais apprécié l’euro et en profite pour le couler. Pour d’autres, c’est les pays émergents, Chine, Brésil et Inde qui nous volent nos emplois en travaillant pour presque rien. Pour d’autres encore, c’est les agences de notation étrangères qui poussent les marchés à attaquer « notre pays » et à nous voler notre AAA. On a presque oublié qu’en 2007-2008, le pays qui était accusé d’avoir propagé la crise partout dans le monde était les USA. Tous les jours, aux infos, on nous parle de délocalisations et tous les politiciens y vont de leur couplet dans le domaine comme si on ne savait pas que les délocalisations sont cause de 4% des suppressions d’emploi et d’un pourcentage encore plus faible du chômage, sans parler du sous-emploi.

Le discours anti-délocalisations de Sarkozy rejoint sur ce plan celui anti-mondialisation ou anti-Chine de Montebourg et le nationalisme exacerbé de Le Pen. Hollande ne fait pas mieux en prétendant qu’on est en train d’annexer la France à l’Allemagne.

Que l’on parle d’Europe ou de Chine, en tout cas, on désigne du doigt les étrangers. PSA, Renault, le Bâtiment, les banques qui suppriment des emplois, est-ce des entreprises et des capitaux « étrangers » ? L’Etat français qui supprime des emplois, est-ce la faute aux étrangers ? La Grèce en crise, vous n’y voyez pas la main des banques et des financiers français, eux qui ont joué à la spéculation sur les dettes souveraines grecques ? Si les banques coulent à nouveau après avoir massivement été aidées grâce à nos impôts, sont-elles des innocentes victimes ou des acteurs directes de la spéculation mondiale ?

La France n’est nullement un pays innocent des manigances mondiales du grand capital. C’est au contraire l’un des pays qui en a été parmi les plus grands bénéficiaires quand cela marchait… Présenter la France comme une victime de la mondialisation est mensonger. Quand la financiarisation et la circulation générale des capitaux spéculatifs était florissante, la France en bénéficiait pleinement et profitait de l’existence de l’Europe et de l’euro, attirant massivement les capitaux du reste du monde, et était devenue la troisième puissance mondiale pour les investissement de capitaux étrangers. De très nombreux bourgeois, notamment ceux de l’afrique du nord, du moyen-orient, du maghreb, mais aussi d’Europe et des USA investissaient en France. La grande bourgeoisie française a fait pleinement ses affaires dans cette période où l’euro était plus recherché par les financiers que le dollar. Maintenant que la situation se retourne, elle voudrait qu’on accuse tout sauf elle-même : la Grèce, l’Espagne, l’Europe, l’euro, l’Angleterre, l’Allemagne, la Chine, qui vous voulez sauf les patrons français et l’ensemble du grand capital mondial, tout sauf le système capitaliste.

La France victime « de l’étranger », le discours est singulièrement gonflé. C’est de la France que nombre de pays ont été victimes et d’abord parce que c’est elle qui a soutenu les dictatures au Maghreb, en Afrique, au Moyen-Orient. C’est la France qui profite du fait que les matières premières soient volées à l’Afrique. C’est la France qui profite que nombre de bourgeoisies du tiers monde préfèrent investir leurs capitaux en France plutôt que dans leur pays. C’est la France qui a fait la guerre aux quatre coins de la planète pour défendre l’ordre mondial qui est en train de nous péter à la figure. La France n’est victime que de sa propre politique au service de la grande bourgeoisie. Les gouvernants de droite comme de gauche ont favorisé la financiarisation de l’économie. Ils ont développé eux-mêmes le détournement des investissements vers le capital spéculatif. Cela leur a rapporté des fortunes. En accuser le reste du monde est vraiment fort de café !

C’est avec l’aide de l’Etat que se sont fondés en France des trusts comme Renault, Areva, EDF, ou Veolia. Ces trusts ont certes investi dans le monde entier, en exportant des capitaux, mais cela ne veut pas nécessairement dire qu’ils ont délocalisé des emplois de France vers l’extérieur. Quand Renault met la main sur Nissan, ce n’est pas en créant des emplois au Japon, emplois qu’il aurait pris en France. C’est, au contraire, en supprimant massivement des emplois au Japon ! Quand Renault fait de même en Roumanie, c’est aussi en supprimant des emplois chez Dacia. Et pareil encore en Russie. Où sont alors les emplois délocalisés ? Le capital français est simplement un capital impérialiste qui cherche à conquérir le monde.

Quant à prétendre qu’en supprimant ou en combattant cette mondialisation du capital, on va résoudre les problèmes actuels, il y a vraiment de quoi rigoler. La France est à majorité de capitaux étrangers. Proposer les chacun pour soi, c’est amener un effondrement massif des échanges économiques et une chute brutale du système. La plupart des grandes entreprises en France n’auraient plus qu’à fermer tant elles dépendent de leurs capitaux étrangers…

On nous dit également que la solution consiste à sortir de l’euro et à revenir au franc. On ne précise pas d’ailleurs à quel taux et ce n’est pas étonnant car ce serait encore l’occasion d’une dévaluation massive faisant baisser les revenus des classes populaires. Certains parlent de revenir sur la base un euro égale un franc. Rien que cela signifierait une baisse de 555% de la valeur de la monnaie puisqu’au départ on était à un euro égale 6,55 francs. Cela aurait comme effet une nouvelle inflation considérable.

Mais, politiquement, l’effet négatif est encore plus important. On nous propose de nous défendre pays par pays, et notre pays contre les autres. Résultat : il n’y a aucune mobilisation générale des travailleurs, par exemple en Europe.

Les salariés du secteur public en Angleterre étaient tous en grève le 30 novembre et ont massivement répondu à l’appel. Il en a été de même dans la période en Grèce, en Espagne, au Portugal et en Belgique, mis jamais le même jour comme si chacun n’avait à répondre qu’aux politiques nationales des Etats et pas à la même crise mondiale. Et en France, il ne manquerait plus que de proposer de réagir le même jour qu’eux. On nous bassine avec la crise de l’Europe, mais il y a un seul point où on ne raisonne pas en termes européens, c’est dans les réactions des salariés. Pourquoi ne pas réagir ensemble ? Cela permettrait de répondre aux patrons et aux gouvernants qui veulent nous mettre en concurrence les uns avec les autres et nous accuser les uns les autres dans le style : « c’est la faute des Grecs », etc… Pourquoi ? Parce que les centrales syndicales ne veulent pas vraiment embarrasser les classes dirigeantes. Ils ne sont là que pour encadrer les mouvements de travailleurs et nous convaincre que ce n’est pas nécessaire de nous organiser ! Un c’est un point très important de leur influence négative : prétendre que nos objectifs de défense doivent être nationaux, défendre les travailleurs français… alors que nos objectifs doivent être mondiaux, combattre le grand capital au nom des perspectives mondiales du Travail !

La force internationale des travailleurs existe bel et bien et elle se manifeste. On vient tout récemment de voir comment la révolution s’est étendue par delà les frontières, partie de Tunisie ou d’Egypte pour atteindre de multiples pays, y compris très loin du monde arabe…

Oui, le prolétariat révolutionnaire est une classe qui dépasse les cadres nationaux et les frontières ! Oui, sa perspective sociale ne peut qu’être mondiale. Partager les richesses entre tous ceux qui vivent de leur travail n’est nullement une perspective dans un cadre national ! D’ailleurs, si le capitalisme lui-même a dépassé le cadre national, ce ne serait nullement un progrès d’y revenir.

La force du prolétariat est celle qui a fait tomber Moubarak et Ben Ali et, si les classes dirigeantes s’inquiètent qu’elle frappe aux portes de Wall Street et cherchent à écraser ce mouvement par une répression violente, c’est bien qu’il est le symbole et le drapeau d’une révolution contre le système capitaliste lui-même.

Alors, le meilleur moyen de détruire nous-mêmes nos espoirs et nos perspectives serait que les opprimés conçoivent leur révolte contre la situation actuelle dans l’optique d’une concurrence avec les autres opprimés du monde.

Dans l’ambiance de fin de règne du système qui a longtemps dominé le monde, les peurs irrationnelles de « l’étranger » vont-elles l’emporter, menant à la xénophobie, au racisme, au protectionnisme, le nationalisme exacerbé produisant une nouvelle fois le fascisme, c’est-à-dire l’écrasement physique de toute forme d’organisation du prolétariat ou, au contraire, les prolétaires vont-ils se faire confiance pour diriger eux-mêmes leurs luttes et leurs révolutions, jusqu’à diriger toute la société ? Telle est l’alternative et elle est mondiale : ou organiser la société sur des bases tout autres que le capitalisme ou tomber dans toutes les horreurs que ce système finissant nous prépare : fascismes et guerre mondiale.

Et n’oublie jamais ceci, travailleur, ton ennemi le plus direct est dans ton propre pays, c’est la classe dirigeante. Et celui qui est le premier prêt à tirer sur toi n’est pas une armée étrangère. Ce sont les forces de répression de "ton" Etat national qui vont demain t’assassiner. Par contre, tes frères sont les prolétaires du monde ! A la poubelle, le repliement sur les frontières nationales, la xénophobie, le fascisme et le racisme ! Il faut en finir avec la prétendue fatalité qui nous imposerait de mourir avec le système d’esclavage qui a dominé si longtemps le monde !

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