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La Françafrique de Hollande mène ses guerres coloniales

mercredi 18 mai 2016, par Robert Paris

Edito

La Françafrique de Hollande mène ses guerres coloniales

Sous prétexte que les troupes françaises auraient « fini le travail en Centrafrique » et que Boko Haram ferait « subir un terrorisme insupportable aux populations », le président français vient d’annoncer son intention d’intervenir militairement dans une immense région qui va du Tchad au Niger, et du Cameroun au Nigeria. Il fait entériner cette intervention par une réunion au sommet qu’il a organisé à Abuja (Nigeria). En réalité, la France ne fait que rajouter le Nigeria à la liste des pays africains précédents où il intervenait déjà militairement, pays qui faisaient partie de l’ancien empire colonial français contrairement au Nigeria. Et le président précise que cela pourrait être l’occasion d’une pénétration des entreprises françaises dans un pays très important de l’Afrique où seuls les trusts anglais et américains avaient une place économique significative.

Le 13 mai 2016, Hollande s’est donc déplacé en personne pour « apporter l’aide de la France dans la lutte contre Boko Haram », ce qui signifie lancer une nouvelle guerre française en Afrique, sans le moindre débat avec l’opinion française (vous savez que c’est l’opinion qui dirigerait paraît-il le pays ?!!!) ni avec le parlement français, une guerre aux dimensions territoriales immenses et aux conséquences inconnues (y compris en termes de retombées terroristes en France), une guerre dont les média français se gardent d’informer sans parler de la discuter ou de la critiquer.

Boko Haram est certes une armée terroriste aux actions violentes et horribles mais cela n’avait pas empêché la France de la laisser se développer, enlever et tuer, sans jamais intervenir. Cela n’empêche pas non plus le gouvernement français, comme tous les gouvernements africains ou la « communauté internationale » de refuser de nous dire qui arme et qui finance Boko Haram, au point que cette organisation terroriste soit capable d’intervenir sur une zone aussi vaste et de manière aussi dramatique !

La France s’est bien gardée de critiquer le gouvernement du Nigeria qui n’a pas levé le petit doigt pour empêcher par exemple les enlèvements massifs de lycéennes ou les attaques violentes de villages et elle ne le critique toujours pas puisqu’elle prétend venir à son aide.

Hollande avait, juste avant son sommet africain d’Abuja, tenu à annoncer que l’armée française arrêtait son intervention militaire en République Centrafricaine. Il rend donc public « la fin de l’opération Sangaris » sans que personne puisse lire et discuter le moindre rapport sur le bilan de cette intervention. Mis à part que des militaires français ont été accusés d’avoir pris partie violemment pour des milices fascistes chrétiennes exécutant et torturant des civils musulmans, mis à part que d’autres militaires français sont accusés d’avoir violé des femmes et des enfants, y compris en organisant des horreurs avec des viols d’enfants par des animaux, toutes sortes d’accusations auxquelles Hollande s’est bien gardé de répondre clairement, sinon on est toujours dans le noir sur ce bilan de l’intervention : que sont devenues les milices fascistes, qui va les désarmer, ont-elles arrêté leurs crimes, que vont devenir les populations déplacées, qui va les reloger, les nourrir, leur donner du travail ? C’est pas Hollande, ça c’est sûr ! Certes, le gouvernement centrafricain actuel dit se féliciter de l’action militaire de la France mais il faut dire que ce gouvernement a été mis en place justement… par la France et nullement par le peuple centrafricain !

En tout cas, pour Hollande, le bilan est clairement uniquement en positif : « Cette opération a été menée avec succès. » Et, si l’armée française s’en va, c’est seulement parce que « Nos armées son appelées sur d’autres fronts. » Pour le reste, c’est silence radio !

Et cela ne signifie pas que la mainmise de la France sur la Centrafrique soit du passé : « La France est et sera toujours là. »

Par contre, cela permet de faire croire qu’on se contente de remplacer une intervention militaire africaine par une autre. Pas question de discuter même le droit de l’armée française d’intervenir partout où cela lui chante en Afrique.

La Centrafrique est loin d’être le seul point d’intervention militaire de la France qui est présente dans tout son ancien territoire colonial. L’ancien colonisateur y fait et défait toujours les chefs d’Etat comme au Centrafrique où la guerre civile qui a servi à l’intervention française a été précédée par le lâchage français de l’ancien président accusé d’être trop pro-chinois, au Niger, au Mali, en Libye ou en Côte d’Ivoire. Il est clair que les nouveaux chefs d’Etat intronisés par la France ne sont nullement plus démocrates ou moins corrompus que les précédents.

Dans tous ces pays, c’est la France qui monopolise les profits tirés des produits pétroliers, miniers, agricoles ou autres. Ce sont les trusts français qui disposent des marchés publics et privés, des échanges portuaires, etc. Les guerres de la France et les pressions via les Etats n’y sont pas pour rien. Ces dernières années, ces guerres se sont multipliées avec ou sans le prétexte antiterroriste : Côte d’Ivoire, Libye, Centrafrique, Niger, Mali… et le terrorisme se porte de mieux en mieux… S’y rajoute seulement la terreur exercée par des forces armées étrangères et impérialistes. Avec Hollande, ce qui est nouveau, c’est l’ambition d’étendre le « pré carré colonial français » aux anciennes possessions anglaises comme le Nigeria ! En somme, La gauche gouvernementale est plus guerrière et impérialiste encore que la droite !

Et les trusts français lui disent merci car il y a de nombreuses retombées économiques que cet interventionnisme guerrier et politique. On se souvient que les chefs d’Etat du Niger sont systématiquement tombés à chaque fois qu’ils prétendaient renégocier à la hausse leur contrat sur l’uranium avec le trust Areva où en signer un autre avec la Chine. On se souvient aussi que Bougues fait la pluie et le beau temps dans les mines d’or du Mali comme Total dans les champs pétrolifères du Gabon.

Le Canard Enchaîné du 11 mai 2016 rapporte ainsi comment le trust français Bolloré, un de ceux qui ont fait des fortunes sur le dos des colonies africaines avec l’aide de l’Etat français et de ses copains présidents africains, a transformé l’Afrique de l’ouest en sa chasse gardée :

« Aujourd’hui, avec l’Afrique, Bolloré s’est constitué une machine à cash incomparable. Il est en situation de quasi monopole dans de nombreux ports de la côte ouest. Grâce aux conditions – pas toujours régulières – dans lesquelles il a décroché ces marchés, il peut imposer des tarifs ultra-rentables. »

Voilà ce qui se cache derrière les motivations prétendument humanitaires et antiterroristes : les sales coups des trusts français contre les peuples et le soutien aux dictatures qui imposent cette mainmise des richesses du continent noir…

Il faut remarquer que le mouvement ouvrier est quasi totalement silencieux sur les interventions de son impérialisme, que ce soit en Afrique ou ailleurs. Il faut remarquer que le courant dit révolutionnaire ne l’est presque pas moins. Il y a pourtant une relation directe entre ces interventions armées à l’étranger et la montée du terrorisme. Il y a pourtant une relation aussi entre les attaques contre la classe ouvrière et les attaques contre les peuples que ces guerres signifient.

La classe ouvrière des pays impérialiste ne peut pas reprendre la direction de ses propres luttes, de son propre avenir sans remettre en question l’alliance entre les organisations syndicales et politiques réformistes avec les intérêts impérialistes et l’Etat qui les couvre.

Dénoncer les nouvelles attaques contre le monde du travail est inséparable de dénoncer les nouvelles guerres coloniales et leurs cortèges de souffrances et de misères pour les peuples.

Il est très significatif que les interventions militaires françaises en Côte d’Ivoire, en Libye et au Mali n’ont nullement apporté paix, démocratie, bien-être ou liberté des femmes, mais le contraire : une aggravation de toutes les souffrances et que les peuples ne sont même pas revenu à la situation économique, sociale et des libertés précédent les interventions et guerres de la France. Tout a seulement empiré, les déplacés n’ont toujours pas de logement, pas de santé, pas de sécurité et on en passe.

Alors, oui, seul un mouvement ouvrier digne de ce nom peut remettre en cause les visées impérialistes de ce qu’on appelle « la France » et qui n’est que l’intérêt des trusts badigeonné en bleu-blanc-rouge !

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