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L’arnaque du 14 juillet

mercredi 13 juillet 2016, par Robert Paris

Le 14 juillet est aujourd’hui la date incontournable d’une manifestation militariste, nationaliste, guerrière, contre-révolutionnaire, chauvine, antipopulaire, bourgeoise, étatique présidée par le roi-président de la classe exploiteuse alors que la révolution française qu’elle est censée évoquer était antiétatique, révolutionnaire, prolétarienne, antibourgeoise autant qu’antinoble et antiroyauté, issue d’une vague révolutionnaire européenne.

Que s’est-il passé vraiment le 14 juillet et est-ce la plus grande date de la révolution française ?

C’est le 14 juillet 1789, avec la prise de la Bastille, qui est censé, selon la décision des gouvernants, symboliser la révolution française de 1789-1795 alors qu’elle en est un épisode ni plus glorieux, ni plus révolutionnaire, ni plus important socialement et politiquement.

C’est même un choix social et politique d’avoir pris le 14 juillet comme date symbole. La royauté n’y est pas directement prise à parti, le peuple n’ayant même pas encore commencé à détester le roi. La classe féodale n’est pas visée non plus. Le régime social et politique n’est pas vraiment désigné du doigt. C’est un symbole ancien tombé en désuétude, la prison de la Bastille, qui est frappé. Il n’a quasiment pas été défendu.

D’ailleurs ce n’est pas la prise de la Bastille qui a mené au choix du 14 juillet. C’est le 14 juillet 1790 et la "fête de la fédération" qui est commémoré par la bourgeoisie et l’Etat bourgeois, c’est-à-dire le 14 juillet 1790 !!!

Pas étonnant ! La « fête de la fédération » annonce la « réconciliation de tous les Français » quelle que soit leur classe sociale et leur origine, mais pas quelle que soit leur fortune, donc la consécration des possesseurs de propriété privée !

Et déjà un an après, le 14 juillet 1791, les propriétaires et l’Etat à leur service faisait tirer au champ de Mars sur les bras nus et les comités jacobins par la garde nationale bourgeoise… La propagande pour l’unité nationale ne supprimait pas la lutte des classes !

Le choix de la date du 14 juillet témoigne du fait que, très vite, la bourgeoisie a cessé d’être révolutionnaire et a souhaité la fin de la révolution, considérant que le début était en même temps le point final.

Nombre d’événements et de journées révolutionnaires ont une bien plus grande importance : parce qu’elles ont fait avancer les consciences, parce qu’elles ont contribué à détruire l’ancien monde, parce qu’elles ont lancé des montées de la révolution ou une radicalisation des masses.

C’est à bien d’autres moments que le roi a été défié par le peuple, a été emmené dans la capitale sous la garde populaire, a été attrapé tentant de rejoindre l’armée de la noblesse, a été emprisonné, a été condamné à mort et exécuté. C’est à bien d’autres moments que le peuple a discuté ses doléances, s’est organisé pour les transmettre, pour les défendre puis pour les imposer. C’est à bien d’autres moments que le peuple s’est organisé pour obtenir une représentation de ses intérêts puis pour exercer le pouvoir exécutif et législatif par lui-même directement et de manière radicale. C’est à bien d’autres moments que le peuple a supprimé le droit féodal, avant que le parlement ne le ratifie la nuit du 4 août.

Ce n’est pas alors que la radicalité sociale ni la radicalité politique a atteint un de ses sommets.

L’un des épisodes révolutionnaires fondamentaux a été celui d’août 1792 où le peuple a attaqué et pris le palais des Tuileries et l’a détruit, une radicalité qui dépassait déjà les buts de la bourgeoisie française.

Jean Ziegler rapporte ainsi dans « L’empire de la honte » :

« A Paris, l’été 1792 est de misère extrême. Dans les faubourgs, la faim rôde. Les Tuileries, le palais du roi, hante l’imagination des affamés. Des bruits courent. Des montagnes de pain, des victuailles en abondance seraient entassées dans les appartements royaux… Durant la nuit du 9 au 10 août, l’Hôtel de Ville est illuminé. L’animation y est intense. De tous les quartiers, de tous les faubourgs, les députés des sections affluent. Ils se consultent, négocient, puis à l’aube proclament la Commune insurrectionnelle de Paris. L’ancienne municipalité est dissoute. La garde nationale est décapitée, son commandant en chef, Mandat, tué. Santerre prend sa place. Les insurgés décident d’attaquer les Tuileries. Deux colonnes de femmes et d’hommes armés de fusils, de pics, de fourches, de poignards, encadrés par des « sans culottes », convergent vers le palais. L’une vient du faubourg Saint-Antoine, sur la rive droite de la Seine, l’autre de la rive gauche. 171 mercenaires suisses défendent le palais. Celui-ci est quasiment vide. Louis XVI, sa famille et ses courtisans étaient, à cette heure, réfugiés au manège. Les Suisses seront tués jusqu’au dernier. Des pillards se saisissent des trésors – meubles, lingerie, vaisselle, etc. – qu’ils découvrent au palais et les emportent. Lorsque les premiers d’entre eux, leur butin sur le dos, débouchent sur les quais de la Seine, les miliciens sectionnaires, pour la plupart jacobins, les arrêtent et les pendent aux lampadaires. Le pillage, l’atteinte à la propriété privée, fût-elle celle du roi tant détesté, sont sanctionnés par la mort. A travers cet épisode de maintien de l’ordre se donne à voir une valeur centrale – le respect absolu de la propriété privée -, véhiculée par la conscience de la nouvelle classe montante, la bourgeoisie marchande et proto-industrielle. Elle allait bientôt confisquer la révolution. Et c’est précisément contre ces bourgeois démocrates que se dresseront bientôt les « Enragés », conduits par le prêtre Jacques Roux. Ecoutons Jacques Roux : « La liberté n’est qu’un vain fantôme quand le riche, par son monopole, exerce le droit de vie et de mort sur son semblable. La république n’est qu’un vain fantôme quand la contre-révolution s’opère, de jour en jour, par le prix des denrées, auquel les trois quarts des citoyens ne peuvent atteindre sans verser des larmes. » Et plus loin : « L’aristocratie marchande, plus terrible que l’aristocratie nobiliaire et sacerdotale, s’est fait un jeu cruel d’envahir les fortunes individuelles et les trésors de la république ; encore ignorons-nous quel sera le terme de leurs exactions, car le prix des marchandises augmente d’une manière effrayante, du matin au soir. Citoyens représentants, il est temps que le combat à mort que l’égoïste livre à la classe la plus laborieuse de la société finisse. » Roux encore : « Députés de la Montagne, que n’êtes-vous montés depuis le premier jusqu’au quatrième étage des maisons de cette ville révolutionnaire, vous auriez été attendris par les larmes et les gémissements d’un peuple immense sans pain et sans vêtements, réduit à cet état de détresse et de malheur par l’agiotage et les accaparements, parce que les lois ont été cruelles à l’égard du pauvre, parce qu’elles n’ont été faites que par les riches et pour les riches… Ô rage, ô honte ! Qui pourra croire que les représentants du peuple français qui ont déclaré la guerre aux tyrans du dehors ont été assez lâches pour ne pas écraser ceux du dedans ? » A quoi sert à un analphabète la proclamation de la liberté de la presse ? Un affamé n’a que faire du droit de vote. Celui qui voit mourir de maladie, de misère, sa famille ne se préoccupe guère des libertés de penser et de se réunir. Sans justice sociale, la république ne vaut rien. »

L’attaque du château royal des Tuileries le 10 août 1792 est la plus importante des journées révolutionnaires de la révolution française car elle casse la royauté, clef de voûte de la féodalité, et elle lance une phase d’auto-gouvernement des masses populaires de Paris…. Le 10 août 1792 est une vraie offensive populaire révolutionnaire dans laquelle les masses exploitées se sont auto-organisées. Pas étonnant que la bourgeoisie ne s’en souvienne pas

Comment la révolution a réellement commencé

Le 14 juillet de la révolution française, mythes et réalité

Que s’est-il passé le 14 juillet 1789 ?

L’année 1793 de la Révolution française

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Pour wikipedia le 10 août vient après le 14 juillet

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Messages

  • Le défilé du 14 Juillet a été placé par Hollande-Valls sous le signe de « l’engagement de la jeunesse », engagement militaire dans les guerres tous azimuts lancées par les classes dirigeantes : c’est donc la génération « boucherie guerrière » comme en 14 !!!

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