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Qui était Hocine Aït Ahmed ?

5 mars 2016, 09:47, par Robert Paris

18 juin 2001 : à la radio française France Inter, Aït Ahmed déclare : « Il faut une transition démocratique avec la garantie de l’armée. »

Audition d’Aït Ahmed à la requête de la défense Le procès de « La Sale Guerre »

« Par exemple, ce n’est pas inintéressant de vous dire que j’avais eu une mésentente avec Boudiaf qui, comme moi, avait été élu député et qui ne voulait pas siéger. Il avait créé un parti : le PRS. J’ai eu une longue discussion avec lui et je lui ai expliqué : « Ton parti, c’est une petite verrue, le FLN a la légitimité intérieure et internationale. Le mieux que l’on puisse faire, au stade actuel, c’est de faire connaître nos idées démocratiques, de rappeler que le but de guerre qui est inscrit dans la déclaration du 1er novembre, c’est de créer une république démocratique sociale, évidemment en invoquant le respect des principes de l’islam. Donc, viens combattre, viens animer le débat à l’Assemblée… »

Comment Aït Ahmed acceptait d’être manipulé par Nezzar, de bavarder avec les responsables dont il venait de dire qu’ils avaient massacré la jeunesse algérienne à l’arme lourde deux ans avant :

« M. Nezzar a demandé à me rencontrer. D’habitude, c’est un principe dans notre parti, on prend les contacts officiels à deux ou trois, c’est plus responsable. Je me suis dit que quand même c’était important, que s’il y avait une chance après le premier tour d’éviter la catastrophe, il fallait la saisir. Donc j’ai eu un très long débat avec M. Nezzar. En fait, je n’avais pas compris le but de sa démarche. C’est par la suite qu’on m’a dit que peut-être il désirait que je sois à la tête du pays parce que je suis un « historique », parce que si on allait chercher Boudiaf au Maroc, loin, en négligeant ceux qui sont sur place, ce ne serait pas compris des gens. Ou bien m’inclure dans le Haut Comité d’État. Je n’ai pas compris, c’est par la suite qu’il y a eu des interprétations. Bref, mon souci c’était de lui dire : « S’il vous plaît, n’intervenez pas. » Nezzar, nous sommes sous serment, je suis sous la foi du serment. Je vous ai dit alors de ne pas intervenir. Vous m’avez dit : « Nous n’interviendrons jamais. » Je vous ai dit : « Non, pas jamais. Si on a au préalable utilisé la loi, la Constitution, nous avons un président, nous avons ce qu’on appelle un retranchement constitutionnel, si un Parlement vote une loi liberticide ou attentatoire aux principes constitutionnels, si cette loi passe en deuxième lecture, il y aura dissolution. Nous avons donc cette possibilité. » La deuxième possibilité, c’est le deuxième tour. C’est vrai que le FIS avait pris un très grand avantage, mais là aussi nous avions la possibilité d’un troisième tour grâce aux cent cinquante à cent soixante recours déposés. Nous-mêmes avions déposé auprès de la Cour constitutionnelle trente dossiers de recours pour fraude contre le FIS, avec des documents, des preuves. Il y avait donc cette possibilité. Mais puisque de toute manière les islamistes auront la majorité relative, c’est à ce moment-là, lorsqu’ils seront au Parlement, qu’ils seront divisés. C’est facile de faire des manifestations de rue au nom de l’islam en disant « Le Coran est notre Constitution », mais quand il s’agit de proposer des programmes culturels, des programmes économiques, c’est un autre problème. Or j’ai découvert au sein du FIS Abdelkader Hachani, qui était une véritable tête politique, qui pensait que l’Algérie n’était pas mûre pour la République islamique. Lui en particulier et ses hommes voulaient trouver un canal d’expression. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, après l’arrestation des deux grands chefs en juin, il a convoqué un congrès à Batna au mois d’août et il a exclu tous les violents du FIS. C’est vous dire qu’il y avait des chances d’impliquer politiquement une partie du FIS et d’éviter surtout une interruption des élections. Alors, M. Nezzar, vous avez fait le coup d’État... Quelques jours après le coup d’État, M. Nezzar demande à me voir de nouveau. Je dis alors : « Non, moi je ne viens pas tout seul, je viens avec mes camarades. Et puis, où doit-on se rencontrer ? » Il m’a dit : « Ici, à la Défense. » J’ai dit : « Pourquoi vous ne venez pas au siège du parti ? » Évidemment, c’était une prétention de ma part, je le savais, c’est même indécent, mais c’est une manière de casser la langue de bois, de dire qu’on ne veut pas apparaître dès qu’on appuie sur un bouton. Il a dit : « Bien. On va venir. » Effectivement, on nous a envoyé des voitures, mais pour nous amener. On nous a fait faire des tours du diable pour nous conduire de notre siège à la Défense nationale, pour « tromper l’ennemi parce que le FIS est partout », alors qu’il n’y avait même pas encore de violences. Arrivés à l’entrée de la guérite, on a fait baisser la tête à mes amis pour que le soldat de faction ne les reconnaisse pas. J’ai refusé. C’est toujours ces décors à la Potemkine ! Montrer que le GIA est partout, qu’il a une direction politique importante, qu’il a des réseaux partout ! Nous avons eu de très longues discussions, très sereines, n’est-ce pas, M. Nezzar ? Vous avez parlé, j’ai parlé. Vous m’avez dit : « Qu’est-ce qu’il faut faire ? » J’ai dit : « Négociez maintenant, avant que la violence n’apparaisse, et je connais des gens qui sont assez modérés pour jouer le jeu. » Vous n’étiez pas d’accord. »

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