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« Dans ma tête un rond point », film algérien de Hassen Ferhani

jeudi 22 décembre 2016, par Robert Paris

« Dans ma tête un rond point », film algérien de Hassen Ferhani

Ce film sorti en février 2016, vous ne l’avez sans doute pas vu, vous n’en avez peut-être même pas entendu parler et pourtant ce film a a reçu :

* Festival International du cinéma d’Alger, GRAND PRIX

* Entrevues Belfort, PRIX DU PUBLIC, PRIX DE LA CRITIQUE

* Festival International du Film d’Amiens, PRIX DOCUMENTAIRE SUR GRAND ÉCRAN

* FID Marseille, GRAND PRIX DE LA COMPÉTITION FRANÇAISE, Mention Spéciale du Prix du GNCR

* Festival du Film de Turin, MEILLEUR DOCUMENTAIRE INTERNATIONAL

* Journées cinématographiques de Carthage, TANIT d’OR TAHAR CHERIAA (Première œuvre) et TANIT d’OR Catégorie documentaire

* Festival International du Documentaire, Amsterdam - Compétition Première œuvre, PRIX SPÉCIAL DU JURY

Et d’autres prix ancore…

Pourtant, il ne passe quasiment nulle part, ni en France, ni en Algérie, ni ailleurs !

Et il y a à cela une raison de fond… Ce film a été mal reçu par les autorités algériennes car il décrit l’état de la classe ouvrière et des milieux populaires algériens, écrasés par la réaction de la dictature militaire issue de l’indépendance.

On y voit tout le désespoir de la jeunesse qui ne rève qu’immigration, la misère de la vieillesse qui, même en ayant travaillé, n’a pas de quoi survivre, une vieille entreprise qui n’a jamais été rénovée depuis l’indépendance, des gens qui n’ont comme seule satisfaction que se rappeler qu’ils ont imposé leur indépendance politique à la France coloniale et de haute lutte.

Il montre aussi que, malgré une répression féroce du pouvoir, le peuple travailleur ne désespère pas tout à fait de la révolution !!!

Le film ne s’attaque pas directement, ouvertement, à la question de la lutte des classes, au pouvoir dictatorial, à la classe dirigeante, pas même au patron de cette usine qui n’a pas été transformée depuis l’époque coloniale ! Mais, chacun des personnages évoque une situation qui accuse directement les classes dirigeantes !

Même le niveau très bas du moral des travailleurs, que révèlent les propos de ceux qui sont présentés dans ce film documentaire, c’est le pouvoir qui l’a produit, cassant sciemment la classe ouvrière. L’Algérie n’est pas située en dehors des « printemps arabes ». Elle a même débuté une nouvelle révolte en même temps que la Tunisie et l’Egypte mais elle est frappée par tous les échecs des révoltes précédentes, en particulier en 1988-1990 et en 2000.

Dans cet abattoir, ce qui frappe ce n’est pas seulement les bas salaires, pas seulement les conditions de travail, la saleté des vêtements, la dureté du travail, les horaires sans fin, ce n’est pas seulement le fait que les travailleurs soient contraints de dormir dans l’usine, dans des cartons, car ils habitent beaucoup trop loin pour être à 6 heures à l’abattoir, non c’est le mépris dans lequel sont traités ces travailleurs sous-payés et dévalorisés à leurs propres yeux.

Bien sûr, le cinéaste n’a pas pu, pour un film algérien diffusé en Algérie, rapporter l’oppression du pouvoir militaire qui a produit cette situation. Mais bien des propos de ce film, qui est un documentaire sans en être un en fait, nous montrent ce que chacun sait en Algérie : c’est l’Etat qui écrase la population, c’est le pouvoir qui a écrasé la classe ouvrière d’Algérie après sa principale révolte, en octobre 1988, quand l’usine de Rouiba, le centre de la classe ouvrière, annonçait vouloir enflammer tout le prolétariat d’Algérie…

Et le film dépasse largement tous ces constats, il ne se contente pas de la situation algérienne. C’est une humanité qu’il présente, avec des personnages abimés, détruits, cassés mais qui conservent leur grandeur, leur poésie, leur philosophie personnelle, leur capacité aussi de savoir qu’on a cherché à les duper et de refuser d’obéir, de refuser de croire à la vérité officielle des média et du pouvoir, comme leur capacité de refuser de justifier le monde en place.

« Je n’ai pas peur de l’Etat », clame l’un.

« Si on s’unissait tous, kabyles et arabes, on vaincrait », dit l’autre.

La classe dirigeante d’Algérie, cachée prudemment derrière ses généraux, a tout fait pour détruire moralement et psychologiquement le peuple travailleur, pour exercer sur lui des pressions et lui faire subir de violentes attaques mais la classe ouvrière n’en est pas moins toujours là et le pouvoir a toutes les raisons d’en avoir encore peur.

Ce n’est pas seulement un de ces ouvriers qui a « un carrefour dans la tête », c’est toute la classe ouvrière. Il y a plusieurs voies et la classe ouvrière n’est pas dans l’impasse. Seulement, elle hésite encore, elle n’a pas trouvé sa vérité, elle n’a pas encore choisi sa voie…

Le film

Le commentaire du Monde

Le commentaire de RFI

L’interview du réalisateur

Film-annonce

Maghreb des films

Commentaire de l’association ACID des cinéastes indépendants

Commentaires de presse

L’autre festival

Les films de l’Atalante, le distributeur

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