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Pourquoi les partis politiques et toutes les institutions bourgeoises sont-ils aussi radicalement et profondément discrédités ?

mercredi 12 juin 2019, par Robert Paris

Pourquoi les institutions bourgeoises en France (partis, syndicats, administration, Etat, gouvernement, institutions religieuses, forces de répression et syndicats) sont-elles aussi radicalement et profondément discréditées ?

Les média en sont toujours à s’interroger comment, en un temps aussi court, les deux grands partis politiques français, de droite et de gauche, les républicains et les socialistes qui se partageaient quasiment l’essentiel du crédit politique du pays, se sont complètement effondrés, au point qu’on se demande s’ils vont survivre. Et on ne peut pas dire que les autres partis aient réellement récupéré l’influence que les précédents ont perdue. Ni Macron ni Le Pen ne peuvent prétendre avoir grandi autant que les deux grands partis français ont chuté. Les écologistes non plus ne gagnent pas de quoi retrouver le crédit perdu par eux. Et c’est sans parler des plus petites formations comme les Insoumis ou l’extrême gauche ou des extrêmes droites et divers partis dont le crédit ne monte pas. En fait, le plus grand parti est celui des déçus ou des révoltés, de tous ceux qui ne croient non seulement plus à un parti, à un politicien, mais même plus à aucune élection dans le cadre du système. Ce sont toutes les institutions politiques et sociales qui sont profondément et durablement discréditées et pas seulement tel ou tel parti, du fait de telle ou telle politique menée ou de tel ou tel dirigeant.

Cette perte brutale de crédit politique des institutions bourgeoises n’est pas un changement conjoncturel, un épiphénomène, c’est un changement de fond, ou plutôt cette chute provient d’un changement de fond économique et social de la société française et même au-delà.

Bien sûr, les commentateurs accusent les politiques de Hollande-Valls et de Fillon-Wauquiez d’avoir plombé leurs formation politiques mais il est évident que le mal est beaucoup plus important et profond. Le départ des personnalités en question n’a d’ailleurs rien réglé et n’a même pas permis de trouver la voie d’un nouveau crédit dans la population. les scandales qui ont marqué ces formations ne sont eux-mêmes que des épisodes sans grande importance. Le discrédit est beaucoup plus large et plus fondamental. Il est social et politique. la corruption du monde politique, ses liens permanents avec les lobbys, les trusts, les banques, les profiteurs, loin de diminuer, n’ont fait qu’augmenter et que devenir publics, indiscutables, évidents avec le régime Macron qui est ouvertement au service des puissance de l’argent, des milliardaires dont la fortune grandit au même rythme que la pauvreté des plus démunis et que les suppressions d’aides sociales et de services publics, un véritable système de vases communicants.

Mais ce ne sont pas seulement les hommes politiques ou leurs partis qui sont discrédités : toutes les institutions bourgeoises apparaissent clairement pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire de purs et simples instruments d’une infime minorité de milliardaires et contre l’immense majorité de la population, c’est-à-dire tous ceux qui ne vivent que de leur travail. Quelles sont ces institutions qui apparaissent au grand jour comme servant les classes possédantes contre les classes laborieuses ? Eh bien, cela va de l’école aux services publics, des élections dites démocratiques aux média, des religions aux associations reconnues, des bureaucraties syndicales aux administrations, des impôts à la justice, de la santé à la retraite !

Dans tous ces domaines, ce qui prime ce sont clairement les intérêts d’une infime minorité de possesseurs de capitaux. Eux ne sont pas condamnés en justice, eux ne paient pas d’impôts. Leurs enfants réussissent scolairement et squattent les grandes écoles. L’école ne se contente pas de s’adapter aux divisions sociales, elle les accroit, elle est le domaine de la plus grande discrimination sociale ! L’impôt ne saigne que le malheureux, ce proverbe est plus vrai que jamais et les plus riches ont tellement de moyens de ne pas payer (comme le CICE ou le crédit d’impôt-recherche, sans parler de Notre-Dame, qu’il faudrait qu’ils soient bêtes pour payer ! Les classes possédantes ont toujours l’oreille des gouvernants quelque soit la couleur politique de leurs partis. Ce n’est pas nous seuls, révolutionnaires communistes, qui le disons, c’est tout le monde qui le reconnaît tant c’est devenu une évidence. La présidence est ouvertement au service non du public mais de quelques intérêts privés. Le président n’a-t-il pas déclaré que les seuls jeunes qui l’intéressaient étaient ceux qui voulaient devenir milliardaires !!!

Certains attribuent à Macron cette évolution et ils se trompent. Macron n’en est que l’un des sous-produits. la vraie cause de ce changement qui met en évidence clairement, même au sein des prétendues démocraties, la corruption du pouvoir, c’est la crise de 2007-2008. En effet, dans cette crise des millions d’Américains ont perdu leur maison, leur emploi, leur santé, leur famille, mais tous, absolument tous, les grands capitalistes ont été sauvés par l’intervention massive des fonds publics. Les impôts de toute la population ont servi à ne sauver que moins de 1% de la population, les seuls banquiers, patrons des trusts, patrons des organismes financiers et assurances, possesseurs du grand capital. Pas un gouvernement au monde ne s’est refusé à déverser ainsi les milliers de milliards de dollars des coffres des banques d’Etat, des caisses publiques, des banques centrales. Tous ont ainsi reconnu clairement qu’ils ne fonctionnent nullement dans l’intérêt de la population mais exclusivement dans celle des capitalistes.

Bien sûr, cela ne signifie pas que le monde entier ait clairement compris le rôle de l’Etat au service du grand capital et l’essentiel de la population de la planète, « démocraties » en tête, continue de croire que l’Etat bourgeois devrait « normalement » être au service de tous les citoyens. Ils n’admettent pas que l’Etat soit de nature bourgeoise, et pensent que c’est l’Etat français, l’Etat allemand ou l’Etat américain, russe ou chinois, c’est-à-dire défenseur des intérêts des français, des Allemands, des Américains, des Russes ou des Chinois. Et c’est la pire erreur politique possible, la plus dangereuse. Partout dans le monde, on n’accuse pas la nature de classe de l’Etat mais seulement de son locataire, de son président, de son parti, de sa politique.

Cependant, même cet aveuglement a ses limites. En période de crise aiguë, la réalité des oppositions de classe devient claire et, comme on l’a bien vu dans la lutte des Gilets jaunes, le caractère de classe de l’Etat ne peut que se dévoiler. Qui pourrait croire que les flics, que les média, que les partis, que les gouvernants, que les institutions, que les syndicats ont soutenu les plus déuunis en lutte en gilets jaunes ou même ne leur ont pas été violemment hostiles ? Poser la question, c’est y répondre ! Au contraire, tous les efforts de ces institutions précédemment cités, syndicats et associations y compris, a consisté à discréditer la lutte des plus démunis, à prétendre que l’Etat n’a pas à répondre à leurs exigences, qu’il n’en a pas les moyens, que les classes possédantes sont celles qui fournissent les emplois, qui entreprennent, qui créent l’activité économique, qui doivent être soutenues !!!

Eh oui, toutes les institutions bourgeoises, en période de crise, sont clairement du bord opposé de celui des plus démunis, des exploités, des opprimés, du peuple travailleur !!! Les peuples estimaient qu’elles devraient « normalement » être aux côtés de la population mais c’est ignorer que les Etats bourgeois n’ont pas été fondés pour aider les peuples mais pour les combattre. Ils se sont renforcés et durcis dans les révolutions mais pour encadrer et réprimer les peuples. Même au cours de la révolution française, l’Etat a été un instrument de combat contre le peuple travailleur.

Les prétendus démocrates disent que tout cela est peut-être vrai mais qu’il faut combattre ce discrédit des institutions car il ne peut que favoriser le retour des dictatures, des fascismes, de toutes les violences des extrêmes droites et des révolutions et contre-révolutions, des terrorismes et des intégrismes. Ce discours dit démocratique ne fait qu’occulter la réalité du fondement de la dictature : le fait qu’une infime minorité détienne toutes les richesses et dicte ses intérêts au pouvoir politique et social. Il suffit de demander à ces prétendus « démocrates » s’il est normal de « sauver » tous les trusts et toutes les banques en faillite du fait de leurs spéculations lors de l’effondrement mondial de 2007-2008 et, par contre, laisser chuter les travailleurs, les plus démunis, les peuples, y compris la petite bourgeoisie dans la crise et la misère dans la même période pour constater que la limite de leur démocratisme est étroite : tous justifient qu’il fallait sauver le système !!!

Oui, les démocrates sont pour que les fonds publics servent à sauver les entreprises capitalistes, y compris les partis réformistes, les associations de gauche, les syndicats et bien sûr tous les média et toutes les institutions de la « bonne » société !!!

Tous ont le discours, la main sur le cœur, que l’Etat doit être juste, équitable, propre, non corrompu, objectif, libre et on en passe des qualificatifs mensongers mais, dès qu’on pose un problème où on voit réellement s’opposer les intérêts du 1% de possesseurs des capitaux et les intérêts de la population, ils oublient tous leurs discours ronflants et se concentrent sur la défense des capitalistes !

A-t-on vu ces gens-là s’en prendre aux trusts pharmaceutiques qui empoisonnent la planète ? Les a-t-on vu s’en prendre aux banquiers pour tous les vols de ces gens-là ? Les a-t-on vu remettre en cause la mainmise, prévue désormais par la loi, des banques sur la totalité de l’argent des comptes des particuliers, sur la totalité de leurs épargnes, sur tous les contrats d’assurance-vie et on en passe, l’Etat se contentant de prétendre garantir une petite fraction de ces sommes alors que l’argent qu’il a provisionné pour cela est ridiculement faible par rapport à ce rôle ? Les a-t-on vus exiger que les capitalistes responsables de la chute de 2007 paient les frais de leur propre crise ? Non, jamais et aucun d’entre eux n’affirme cela. Leur démocratisme ne va pas plus loin que de belles paroles moralisatrices ! C’est pourquoi ils sont aussi discrédités que les autres piliers de la société capitaliste.

Le capitalisme lui-même est discrédité. De plus en plus de gens pensent qu’il n’a pas de pérennité. Certes, les média et les politiciens sont parvenus à faire croire que ce discrédit et cette crise étaient « climatiques », que ce qui causait cette absence d’avenir du système était la production… de CO² mais la réalité est que c’est la production de… profits !!! C’est en effet le succès même du capitalisme qui l’a porté às es limites.

S’il était encore capable de développer la planète, d’investir dans des productions nouvelles, d’embaucher de plus en plus de gens dans ses entreprises, aucune chance que le capitalisme soit discrédité en même temps que ses institutions politiques et sociales ! Mais non ! Il se contente actuellement de détruire partout ce qu’il a construit au cours des décennies précédentes, les droits sociaux, les liens sociaux, la vie sociale, la stabilité sociale, la paix sociale, le bien-être social ! C’est là que réside la racine de la déstabilisation générale actuelle et pas dans le discours de tel ou tel homme politique. Ce ne sont ni Hollande-Fillon-Macron, ni Trump, ni May, ni Merkel, ni Poutine qui ont discrédité la politique. Ce ne sont ni la droite, ni la gauche, ni le centre, ni même l’extrême droite qui dégradent la politique politicienne. C’est l’effondrement capitaliste qui est à la racine de la chute actuelle.

C’est cet effondrement qui explique la nécessité pour les classes possédantes de faire monter partout les haines, les guerres, les terrorismes, les oppositions au sein des peuples, la violence des affrontements sociaux et politiques. C’est cet effondrement qui explique que les classes possédantes anglaises opposent entre eux les travailleurs anglais, en bro-Brexit et anti-Brexit, que les classes possédantes espagnoles opposent les Espagnols entre pro-Catalans et anti-Catalans, que les classes possédantes européennes les opposent entre pro-migrants et anti-migrants, entre pro-Musulmans et anti-Musulmans, etc.

C’est cet effondrement qui explique que les patrons et les gouvernants ne jouent plus la conciliation, la négociation, la collaboration, l’alliance des classes sur lesquels les appareils syndicaux avaient longtemps vécu et que ces derniers se retrouvent en culotte courte maintenant que les classes possédantes décident d’employer clairement et crument la lutte des classes ! Les bureaucraties syndicales ont beau en appeler à la négociation, elles ne font qu’en appeler à un passé révolu et à souligner qu’elles ne servent plus à rien dans la situation actuelle des affrontements de classe qu’à tromper les travailleurs et détourner les luttes de classes. Voilà pourquoi eux aussi sont discrédités et dépassés.

De tous les mensonges précédents dévoilés par la crise, nous n’avons à en regretter aucun : tous n’étaient que des mensonges, des tromperies « démocratiques » qui nous piégeaient, nous faisant croire qu’on ne pouvait lutter qu’au sein du système.

Non, la démocratie, la justice, la paix, le bien-être, le développement économique et social ne sont plus des produits que l’on peut attendre du système capitaliste, des gouvernants capitalistes, des institutions bourgeoises, mais au contraire du combat pour les renverser !

L’avenir n’appartient pas aux luttes réformistes mais aux combats révolutionnaires !

Concluons avec un propos de Michel Serres, un philosophe qui vient récemment de décéder :
« Nous vivons un changement décisif, comme le monde en a très rarement connu. Une sorte d’immense faille s’est ouverte sous nos pieds. Le paysage humain s’est radicalement transformé en quelques décennies. Par contre, nos institutions n’ont pratiquement pas changé. D’où un grand désarroi. Mon intuition est que nous vivons un changement décisif, comme le monde en a très rarement connu : à la fin de l’empire romain, à la Renaissance. On a vu s’effacer effectivement, progressivement, les pouvoirs religieux, militaires, politiques. Celui de la grande finance a sans doute été décuplé, mais son pouvoir est extrêmement fragile. D’une certaine manière, la crise de la finance appartient à la liste des changements observés. L’essentiel aujourd’hui est que les gens comprennent que nous traversons une période exceptionnelle, et non pas une crise de plus. »

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