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Mort de l’écrivain sud-africain André Brink

samedi 7 février 2015

« Ce peut être la fin. Cette idée l’emplit de tristesse. On devrait pouvoir se laisser bercer, sans conscience du temps, au fil des jours, abandonné comme une algue devant la marée, mais on est toujours balayé, emmené au large.
Un aigle plane bien au-dessus des rochers et cherche une proie. Presque immobile, il reste suspendu dans les courants les plus forts, petite croix dans l’espace infini. Lui aussi, un de ces jours, tombera comme une pierre. Ce qui semble si lointain, devient tout à coup évident, immédiat. Demain devient aujourd’hui ; aujourd’hui se mue en hier. Et la terre n’en est nullement troublée. Ce ne sont que graines de charbon emportées par le vent, soupirs insignifiants dans l’espace. »

André Brink

« Une fois dans sa vie, juste une fois, on devrait avoir suffisamment la foi en quelque chose pour tout risquer pour ce quelque chose. »

André Brink

« Vous ne me croyez pas ? Je sais que c’est une chose terrible à dire, mais c’est vrai. Ils ne savent pas. Même quand ils tuent nos enfants, ils ne savent pas ce qu’ils font. Ils croient que ça n’a pas d’importance. Ils ne croient pas que nos enfants soient des êtres humains. Ils pensent que ça ne compte pas. »

André Brink

« Il n’existe que deux espèce de folies contre lesquelles on doit se protéger, Ben. L’une est la croyance selon laquelle nous pouvons tout faire. L’autre est celle selon laquelle nous ne pouvons rien faire. »

André Brink

« On finit toujours par se mouler dans les costumes que les autres nous taillent. »

André Brink

Mort de l’écrivain sud-africain André Brink

Connu notamment pour ses romans anti-apartheid comme « Au plus noir de la nuit », « Une saison blanche et sèche », « Un turbulent silence » ou « Etats d’urgence, André Brink a gardé son franc parler après la venue au pouvoir du parti de Nelson Mandela. Il n’a pas douté de la nécessité de dire la vérité sur la fin de l’Apartheid officiel et son maintien réel…

Dans son autobiographie, Mes bifurcations, André Brink, écrivain marquant du combat contre l’Apartheid, qui soutenait l’ANC à l’époque de l’Apartheid, écrit :

« Depuis son accession au pouvoir, l’ANC est devenu l’ennemi du peuple. »

Dans les derniers chapitres de ses mémoires, André Brink revient sur la transition démocratique et les désillusions qu’il a connues après l’accession de l’ANC (African National Congress) au pouvoir. Il décrit les nouveaux dirigeants du pays comme des hommes corrompus, avides de pouvoir et moins intéressés par la lutte contre la violence, le sida ou la pauvreté, problèmes fondamentaux dans ce pays, que par leur propre intérêt personnel : "une fois parvenu au pouvoir, l’ANC a trahi la plupart des principes et idéaux qu’il défendait auparavant."

Allant même plus loin, il compare le pouvoir présent avec le passé :

"Dans la nouvelle Afrique du Sud, l’ANC joue exactement le même rôle que le gouvernement nationaliste sous l’apartheid ".

L’Afrique du sud n’est sortie que formellement de l’Apartheid, il suffit de voir la police sud-africaine assassiner les mineurs grévistes de Marikana ou les habitants des townships toujours parqués dans leurs ghettos et tués par la police. Il suffit de lire que l’écrivain sud-africain André Brink, porte parole de la lutte contre l’Apartheid, a déclaré que l’ANC, le parti de Mandela, n’est qu’une réincarnation du parti raciste, le Parti National de De Klerk, en pire, j’ai bien dit en pire ! Ce qui a vraiment changé, c’est qu’un bon ami de Nelson Mandela, Cyril Ramaphosa, ancien dirigeant du syndicat des mineurs, la NUM, devenu le principal syndicat antigrève du pays au point que les grévistes de Marikana ont dû s’affronter à lui, est devenu le plus riche noir du pays, un milliardaire possesseur de nombreuses grandes entreprises ! Mais, pour le reste, ceux qui vivaient dans la misère y sont restés et l’apartheid entre noir et blanc s’est transformé en apartheid entre riches et pauvres qui sont toujours noirs et blancs ! Par contre, l’hypocrisie a pris le pouvoir. Et l’argent de l’exploitation des travailleurs entre toujours dans la poche des mêmes trusts !
André Brink, écrivain sud-africain connu pour son courageux combat contre l’Apartheid, vient de déclarer à la radio française : « Aujourd’hui l’ANC joue exactement le même rôle en Afrique du sud que le Parti National raciste pendant la dictature de l’apartheid. »

Une déclaration choc très courageuse qui en dit long sur la tromperie qui a été celle des dirigeants de l’ANC conjointement avec la bourgeoisie sud-africaine et mondiale afin de détourner de la lutte les masses opprimées d’Afrique du sud, et tout particulièrement les travailleurs…

Brink ajoute : « ignorant les besoins criants de la population –criminalité galopante, épidémie de sida, pauvreté, privation - le premier souci de certains paraît être de se remplir les poches et celles de leurs familles et amis et d’exploiter au maximum leur juteuse position, même s’ils doivent pour cela piétiner les corps des victimes de meurtres, de viols et de violence, et à ceux d’entre nous qui osent protester, on conseille de se taire ou de partir ».

Il a également pris des positions remarquables sur la question palestinienne.

Voici par exemple un extrait de ses mémoires intitulées Mes bifurcations :

« Mais l’expérience déterminante de ce voyage (de 2002) fut la visite à l’université palestinienne de Birzeit. J’avais beaucoup lu sur le conflit au Moyen-Orient ; à Salzbourg et ailleurs, j’avais eu de longues conversations passionnées avec des écrivains palestiniens. Je me rappelle encore ma discussion avec Hanan Mikhail-Ashrawi quand elle était venue au Cap des années plus tôt. En plusieurs occasions avant sa mort prématurée, j’avais aussi pu bénéficier de la grande sagesse et de la douce humanité d’Edward Said. Mais cette immersion dans la terrible réalité de cet endroit tragique, de cette terre et de son peuple, m’a éprouvé comme peu d’expériences l’ont fait dans ma vie. Je crus redécouvrir le cœur hideux de l’apartheid : la manière dont les Palestiniens, y compris certains des êtres les plus merveilleux que j’ai jamais rencontrés, sont soumis à l’une des oppressions les plus cruelles ici-bas, le tissu d’hypocrisie et de mensonges qui, du côté israélien, tente d’obscurcir et de déformer la vérité. Au cours de ce séjour se produisit un événement particulièrement choquant : la bicoque d’un vieux Palestinien fut rasée par les bulldozers de l’armée israélienne parce qu’il avait osé installer une citerne sur sa toiture afin de récupérer les quelques gouttes de pluie qui tombaient là. »

« J’ai vu le réseau d’autoroutes modernes construites pour les Israéliens et les misérables petites routes auxquelles les Palestiniens sont confinés ; j’ai vu les oliveraies, souvent seul moyen de subsistance des agriculteurs palestiniens, arrachées par les Israéliens ; j’ai vu la prolifération de nouvelles colonies israéliennes en plein territoire palestinien, établies là à l’encontre de tous les accords signés, simplement pour renforcer la présence et le pouvoir des Israéliens dans un territoire qui ne leur appartient pas. J’avais déjà vu cela, du temps de l’oppression des Noirs par les Blancs en Afrique du Sud. J’avais déjà entendu les mêmes excuses et explications pieuses. »

« Quand j’y repense aujourd’hui, je ne peux écarter de mon esprit le souvenir des terribles vestiges de Dachau et d’Auschwitz : si Israël ne s’est jamais lancé dans un génocide de l’ampleur de l’Holocauste, le nettoyage ethnique que cette nation inflige aux Palestiniens équivaut, moralement, à une version lente et en mode mineur des camps de la mort. J’ai du mal à comprendre comment un peuple pour lequel il a été si difficile de se relever des horreurs de l’Holocauste peut ensuite infliger à d’autres ce qu’on lui a fait. »

« Tout cela est projeté, concentré avec l’intensité d’un laser sur une confrontation spectaculaire entre un jeune écrivain israélien et une jeune femme palestinienne, belle et furieuse, lors d’une conférence au Shloss Leopoldskron à Salzbourg, où il se peut que j’aie passé, je crois, certains des moments les plus mémorables de mon existence. »

Messages

  • « Le verbe est une chose insignifiante en soi, un souffle infime, rien de plus. Toutefois, c’est dans et par le mot que nous prenons d’abord conscience de notre humanité. Tant que nous aurons à notre disposition les mots, nous pourrons rejoindre autrui au sein d’une chaîne de voix qui ne seront jamais bâillonnées. C’est notre unique, notre modeste, notre durable garantie en ce monde et contre ce monde. Tant que ce sera possible, je parlerai, je ne pourrai pas me taire. »

    André Brink

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