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Editorial août 2011 - Quand la classe ouvrière mènera sa propre politique…

mercredi 3 août 2011, par Robert Paris

Quand la classe ouvrière mènera sa propre politique…

Il y a cent quarante ans, à Paris, sous la Commune, les travailleurs, les femmes, les jeunes, le peuple parisien, écrivaient une page inédite de l’Histoire : des opprimés réalisant leur propre gouvernement, leur propre forme d’organisation de la société et même leur propre Etat. Il ne s’agissait plus seulement d’élire des hommes politiques pour gouverner à leur place, mais de décider eux-mêmes de leur avenir et de la manière, au jour le jour, de gouverner la société.

Ce n’était pas un événement occasionnel, une particularité momentanée, parisienne ni française. Les classes dirigeantes du monde ne s’y sont pas trompées : elles ont pourchassé tous ceux qui s’en réclamaient. A commencer par celles d’Allemagne, alors en guerre avec la France, qui ont libéré les soldats français emprisonnés pour qu’ils aillent écraser l’insurrection ouvrière de Paris.

Bien sûr, aujourd’hui, ces événements peuvent sembler lointains. Ne nous a-t-on pas dit que le communisme est mort, que le prolétariat n’existe plus, que la lutte des classes a été remplacée par des négociations, à peine perturbées par quelques journées d’action. Et les comités révolutionnaires de la Commune remplacés par les élections du président et des parlementaires. La faucille et le marteau sont à ranger au musée des anciens outils ? L’ordinateur exclue l’exploitation ? Voire. Au technocentre de Guyancourt, par exemple, ou à France Telecom, par exemple, on peut mourir du fait des pressions de l’encadrement. La machine à vapeur n’avait pas libéré l’homme de l’exploitation. Les outils nouveaux non plus.

Plus démocratique la forme actuelle d’élection ? Voire. Quel choix cela nous offre ? Un choix de société ? Non ! Un simple choix de personnes. Il faudrait nous passionner pour la lutte vers le fromage entre le Hollande, l’auBrie qui court, ou le brebichou de madame Royal, la générale… Nous passionner pour l’écologisme d’un Hulot qui prétendait découvrir brutalement les risques du nucléaire mais n’avait pas attendu pour trouver bons les subsides des trusts du nucléaire ? Nous passionner pour la démagogie xénophobe et sécuritaire de la droite qui voudrait nous faire oublier les milliards distribués aux trusts pendant que tant de familles pauvres n’ont aucune aide d’Etat ? Nous passionner pour les rodomontades de la famille Le Pen ? Eux qui prétendent que les massacres d’Oslo ne sont pas grand-chose et voudraient bien faire oublier que leur famille politique, l’extrême droite, est responsable de nombreux crimes dont le nazisme. Et nous passionner pour le « changement » que ces élections vont apporter dans la situation actuelle ?

Pourquoi ? Des politiciens de n’importe quel bord auraient-ils dit qu’ils étaient contre aider les banquiers au travers de la soi-disant aide à la Grèce, ont-ils dit qu’ils étaient contre dépenser des millions d’euros pour des guerres aux quatre coins du monde, de la Côte d’Ivoire à la Libye et à l’Afghanistan ? Pas du tout, ils sont pour ! Ont-ils dit qu’ils allaient revenir en arrière sur toutes les attaques anti-sociales des gouvernements précédents, de gauche comme de droite ? Pas du tout ! Ils s’apprêtent, comme dans le reste de l’Europe, à continuer à nous faire payer, nous ponctionner, détruire les services publics, les retraites, l’enseignement et la santé. Et cela quelque soit la couleur du futur gouvernement.

Ils nous diront que c’est la crise qui les y oblige… Comme vient de le faire Obama qui renie tous ses engagements sous prétexte de la nécessité d’une entente avec le camp adverse ! Pour distribuer des sommes colossales aux trusts, aux banques, aux financiers, là il n’y avait pas de difficulté pour s’entendre ! On a bien vu en Europe les gouvernements de gauche faire la même chose que les gouvernements de droite. Même si en France, partis de gauche et syndicats disent aux travailleurs que la gauche sera mieux que Sarkozy, rien n’est moins sûr ! En France, les deux principaux candidats à la candidature pour le PS s’alignent sur l’austérité. François Hollande le fait très clairement : « il faut rééquilibrer nos comptes publics dès 2013 (…) Je ne le dis pas pour céder à je ne sais quelle pression des marchés ou des agences de notation mais parce que c’est la condition pour que notre pays retrouve confiance en lui ». Martine Aubry lui emboîte le pas et s’engage elle aussi sur les « 3% en 2013, puisque c’est la règle aujourd’hui ». Cette terrible formule (« puisque c’est la règle aujourd’hui ») en dit long et donne la clé de l’impasse dans laquelle se trouve la social-démocratie. La social-démocratie, incapable même d’être social-démocrate face à la crise du capitalisme comme elle l’a démontré en Angleterre, en Grèce ou en Espagne, est rejointe par les centrales syndicales, incapables même de faire du syndicalisme réformiste.

En tout cas, les uns et les autres se gardent bien de nous expliquer en quoi la crise est inéluctablement liée au système capitaliste, en quoi ce système est à bout de souffle, et par quoi ils veulent le remplacer. Il ne suffit pas de se dire « parti socialiste » pour être pour le socialisme. Il ne suffit pas de se dire « parti communiste » pour avoir fait autre chose au gouvernement que gérer les intérêts de la bourgeoisie ! Et s’apprêter à refaire de même demain.

Qui que ce soit qui gouverne, il n’y a rien de bon à attendre des Etats et des patrons, les travailleurs ne doivent s’en remettre qu’à eux-mêmes pour se défendre dans la crise. Pour cela, il ne faut plus accepter la logique et les lois d’un capitalisme qui se propose de détruire nos emplois, nos logements, notre santé, nos vies.

Plus question d’admettre qu’un patron déclare que les caisses de l’entreprise sont vides. Il faut prendre sur ses revenus et biens personnels. Plus question d’admettre qu’un patron nous dise qu’il n’y a plus de travail. Du boulot ou pas, c’est une question de choix du grand capital en fonction de la rentabilité. Ce n’est pas notre problème. Nous exigeons, dans tous les cas, d’être payés. Plus question d’allocations chômage impayées. Plus question d’électricité coupée, de téléphone coupé, de crédits coupés, de compte fermé, d’emplois supprimés. Quand un capitaliste, un banquier, une assurance sont en difficulté, la société trouve des milliards pour le sauver. Imposons qu’il en soit de même quand il s’agit des travailleurs.

Il faut aussi en finir avec la logique des directions des centrales syndicales qui quémandent des petits accommodements, signent des contre-réformes, divisent les luttes, les lâchent en cours de route et organisent des journées d’action sans lendemain.

Il faut unir les travailleurs précaires, les chômeurs et ceux qui ont un emploi, les travailleurs du public et du privé, les travailleurs de l’Automobile et ceux de l’Audiovisuel, ceux de la Recherche et ceux de la Construction, ceux de l’Enseignement et ceux des grands magasins. C’est à nous de défendre notre avenir. Personne ne le fera à notre place ! Il ne s’agit pas de défendre chacun notre entreprise mais de défendre collectivement le sort de la classe ouvrière.

Les travailleurs, s’ils ne veulent pas subir de plein fouet le chômage, la misère, et aussi les dictatures et les guerres, conséquences inévitables de la crise, comme le fascisme et la guerre mondiale ont été des conséquences de la crise de 1929, doivent diriger eux-mêmes leurs luttes aujourd’hui et devront diriger demain la société.

Oui, l’ère des révolutions est revenue. Même si, ici en France, la vague n’a pas encore touché de manière nette, le dernier mouvement des retraites ayant pu être canalisé, endigué et mené dans l’impasse par les directions syndicales, c’est dans le monde entier que cette nouvelle ère commence. Bien sûr, les partis de gouvernement et les appareils syndicaux ne sont pas là pour prendre cette réalité en compte. Leur rôle est, au contraire, de détourner ce mouvement. Il n’est pas dans leurs possibilités de le développer, de le rendre le plus conscient possible et encore moins de le faire réussir.

La révolution ? Mais n’est-ce pas prendre ses désirs pour de réalités ? Non, c’est bel et bien la réalité que le monde change sous l’action des révolutions. Non seulement, les mouvements en Tunisie et en Egypte ont réussi à renverser deux dictateurs qui étaient bien accrochés au pouvoir (à comparer à l’incapacité des troupes internationales de renverser Kadhafi). Non seulement, ils ont entraîné une vague dans tout le Maghreb et le monde arabe, qui s’est répercutée en Afrique noire, et même en Espagne. Mais le monde entier en est marqué. Qui aurait cru possible que les employés d’Etat de quatre Etats des USa se revendiquent de la révolution égyptienne ? Qui aurait cru possible que la vague atteignant Israël, elle mène à une mobilisation commune des Israéliens et des Palestiniens ? Oui, l’avenir appartient à la révolution sociale et donc au socialisme. Car le seul autre avenir possible, c’est la barbarie. l’ancien monde capitaliste, il est inutile de s’y accrocher sinon pour couler avec...

Messages

  • « En tout cas, les uns et les autres se gardent bien de nous expliquer en quoi la crise est inéluctablement liée au système capitaliste, en quoi ce système est à bout de souffle, et par quoi ils veulent le remplacer. »

  • « les travailleurs ne doivent s’en remettre qu’à eux-mêmes pour se défendre dans la crise. Pour cela, il ne faut plus accepter la logique et les lois d’un capitalisme qui se propose de détruire nos emplois, nos logements, notre santé, nos vies. »

  • commune de paris

    Adrienne — descommunards@yahoo.fr

    Nous vous envoyons la présentation d’un livre que nous avons écrit sur la Commune de Paris. Des communeux.
    La Commune de Paris a déjà fait l’objet de centaines de livres. Quelle est donc la pertinence de ce nouveau livre sur cet événement qui a déjà tant fait couler d’encre ?
    D’un même événement, peuvent être tirées des conclusions bien différentes voire totalement opposées. Tout est affaire de point de vue et tout point de vue est nécessairement un point de vue de classe. Et c’est cela qui détermine la direction que prend une analyse.
    Ce livre a reconsidéré les événements en se situant résolument du point de vue prolétarien. Mais tout en étant clair quant à ce parti pris, reste encore à discerner où, dans le mouvement d’affrontement des classes, se situe précisément la frontière de classe ; discerner ce qui a fait la force du prolétariat de ce qui concourait à sa perte, en quoi il s’affirmait comme classe autonome des forces bourgeoises et en quoi il s’est fait prendre au piège des alternatives bourgeoises. En ce sens, ce livre tranche sur bien d’autres écrits sur la Commune de Paris.
    Un des traits essentiels de ce livre est qu’il fait la différence entre la mobilisation prolétarienne culminant avec l’insurrection du 18 mars et le gouvernement de la Commune qui a tout fait pour endiguer ce mouve-ment insurrectionnel et en dernière instance le livrer au massacre mené par Thiers et sa clique. D’une manière générale, les livres sur la Commune de Paris font l’apologie de la Commune, sans discernement, et ne voient la contre-révolution que dans les forces bourgeoises regroupées derrière l’état-major de Thiers. Ils fustigent le massacre de la semaine sanglante sans voir que ce massacre n’était possible sans le concours de la fraction républicaine en place dans Paris même. Ils placent l’affrontement entre Paris et Versailles alors que la frontière de classe traverse Paris même entre le prolétariat en armes et le gouvernement de la Commune. C’est pourquoi, dès le début, le livre précise que sous le vocable la Commune, deux contenus différents s’affrontent : la Commune comme soulèvement révolutionnaire, et la Commune comme gouvernement de Paris. Pour nous en sortir sur le plan terminologique, nous utilisons la Commune lorsque nous nous référons au mouvement révolutionnaire et le gouvernement de la Commune lorsque nous parlons de la réorganisation de l’Etat sous la forme républicaine à Paris.
    *******
    Pourquoi ce livre sur la Commune de Paris ? Parce que cet épisode de notre histoire fut un saut de qualité dans l’affirmation de la communauté humaine contre la terreur imposée par le capitalisme. Ce fut une insurrection prolétarienne, un moment de rupture de la norme établie par la domination capita-liste, un coup d’arrêt à la guerre permanente que livre la bourgeoisie contre le prolétariat. Ce fut un de ces moments où la classe exploitée sort de son abîme pour exprimer sa vitalité révolu-tionnaire, sa force d’ébranlement du monde qui l’emprisonne et brise la logique d’accumulation de mar-chandises, de réalisation de profit, de valorisation du capital. Dans ces moments, tout vole en éclats, l’étau qui nous enserre à l’établi du travail, les casernes qui nous font marcher à la guerre, le salaire qui nous enchaîne à la pauvreté, la propriété qui nous prive des moyens de vie, le capital qui nous détruit toujours plus profondément. L’association s’impose contre la concurrence et les séparations qu’entretient le capital pour assurer sa do-mination. De tout lieu d’enchaînement au travail ou d’encasernement, les prolétaires sortent, se réunissent, discutent de comment organiser la lutte, se défaire du joug du salaire, imposer leurs besoins, organiser l’insurrection. Le monde bourgeois qui s’est hissé sur les guerres de rapine, l’accaparement de toutes les richesses du monde, l’expropriation générale, l’exclusion, la mise en esclavage, le salariat,.... vacille ! Les bourgeois bouffis d’or et imbus de leurs privilèges pâlissent de peur. Leur position de classe dominante est menacée ! Aujourd’hui dans le monde, renaissent des luttes qui posent, dans les faits, cette nécessité de donner un saut de qualité à l’affrontement contre la domination capitaliste. Les mouvements qui s’expriment aujourd’hui de l’Algérie à l’Irak, en passant par la Tunisie, la Libye, l’Egypte, le Yémen, le Bahreïn, la Jordanie,… sont des mouvements puissants bien que le danger est d’en rester à une énième réforme politique, un énième changement de personnel à la tête de l’Etat,… qui ne fera que perpétuer la domination capitaliste et aggraver la situation de guerre et de misère. Contre ce danger s’impose la nécessité de comprendre ces mouvements comme des expressions du mouvement d’abolition et non de réforme de l’ordre existant. Non comme des mouvements égyptien, tunisien ou libyen,… mais comme des mouvements d’une seule et même classe cherchant mondialement à abattre cet Etat qui a imposé depuis des siècles la dictature du capital à l’ensemble de la planète. Contrairement à ce qui est répandu dans les médias, il ne s’agit pas d’une explosion « spontanée » dans le sens qu’elle n’aurait ni passé ni antécédents et qu’elle n’aurait aucunement été préparée, organisée. Si nous revenons un peu en arrière :
    les révoltes dans le bassin minier de Gafsa en Tunisie, en 2008,
    les nombreuses grèves entre autres dans l’industrie textile, en Egypte, en 2010,
    les vagues d’émeutes en Algérie, en 1988, 2001 et régulièrement jusqu’à aujourd’hui, montrent que ce qui se passe dans cette région du monde est le fruit de multiples poussées de lutte ayant connu des moments d’avancée, de recul, de redémarrage. Et alors que nous écrivons cette présentation, les affrontements se poursuivent. Par ailleurs, cette dernière décennie a été marquée par d’autres luttes de grande ampleur : Argentine (2001), Algérie (2001), Bolivie (2003), Oaxaca (2006), Bangladesh (2006-2010), Grèce (2008), Guadeloupe (2009), Thaïlande (2010),… Chine, Pérou, Equateur,… ainsi que les « émeutes de la faim » dans plus d’une trentaine de pays, début 2008. Tous ces mouvements ont en commun d’avoir été précédés par toute une série d’affrontements qui ont permis de renouer avec les habitudes de lutte : rétablir les liens d’entraide, reconstruire des réseaux de solidarité, réinstaller des lieux de discussion, redéfinir les moyens et les objectifs de la lutte,… remémorer les expériences passées, se mettre d’accord sur les leçons à en tirer,… autant de facteurs de maturation et d’aguerrissement. Et il aura suffi d’une confrontation supplémentaire à l’intransigeance de l’Etat, d’une nouvelle aug-mentation des prix ou restriction salariale, d’un camarade tombé sous les balles ou la torture,… pour que la révolte explose, d’autant plus forte et déterminée qu’auparavant il y aura eu tout ce renouveau d’association et d’organisation prolétarienne. À la différence des explosions sociales qui ont marqué les années 1980 et le début des années 1990 et qui retombaient aussi brusquement qu’elles avaient surgi, il semble qu’aujourd’hui elles perdurent et laissent des traces sous forme de réseaux de discussion, de bilans qui circulent, d’une volonté de ne plus se laisser abattre aussi facilement et de voir à plus long terme. De ce foisonnement jaillissent aussi des discussions passionnées et passionnantes parmi les militants révo-lutionnaires interpellés par le développement de toutes ces luttes dont eux-mêmes font partie et sont l’expression. Quel développement donner aux luttes ? L’insurrection est-elle un passage obligé ? Le prolétariat pourrait-il faire l’économie de l’insurrection ? Ces questions et les débats qu’elles suscitent sont l’expression de ces multiples luttes qui, partant des besoins humains, se heurtent inévitablement à l’Etat. Mais le fait que l’insurrection ne s’impose pas comme une évidence est aussi l’expression de la rupture qui s’est opérée entre les expériences actuelles et les expériences plus anciennes (telle celle de la Com-mune de 1870-71 à Paris) dont la trace et la mémoire ont généralement été perdues. La question centrale : Comment nous organiser contre l’Etat pour en finir une bonne fois pour toute avec la guerre permanente de la bourgeoisie contre le prolétariat ? n’est pas nouvelle. Toute lutte conséquente s’y est trouvée confrontée. Les générations de prolétaires qui ont vécu ces affrontements et ont été impliquées dans les efforts pour donner un saut de qualité à ces mouvements insurrectionnels nous ont laissé de précieux enseignements qu’il est important de se réapproprier. L’ignorance fait la force de la domination bourgeoise. La discontinuité dans la transmission de la mémoire des luttes passées est une lacune dans laquelle s’engouffre les forces social-démocrates pour détruire nos luttes. Il y va de notre responsabilité. Ce débat n’est pas intellectuel, c’est une question qui se pose concrètement dans les luttes. Il nous faut parler de cette responsabilité. Certains s’y refusent. Ils font l’apologie d’une sorte de pure « spontanéité » du prolétariat que les militants, par leurs présence et activité, viendraient corrompre ou détourner de ses objectifs ! Le point de départ de cette attitude est l’extériorité par rapport au mouvement de lutte, le fait de ne pas se sentir partie prenante, de ne pas se vivre comme expression du mouvement. Plus fondamentalement, il s’agit du poison démocratique qui, au nom de l’égalitarisme et de l’anti-autoritarisme, culpabilise et met au pilori ceux qui osent prendre des initiatives, mus par une plus grande clarté, nourris des leçons des luttes passées,… et surtout ceux qui s’associent pour faire de tous ces éléments une force contribuant aux sauts de qualité dans le développement d’une lutte. Il est temps de rompre avec ces séparations. Faire un avec l’ensemble des expressions du prolétariat aujourd’hui est crucial. Les divisions dans nos rangs sont l’atout majeur de la domination bourgeoise. Il est temps de dépasser ces attitudes antithétiques, cette extériorité, et de renouer avec le besoin d’organisation, de responsabilisation militante, de développer la critique de ce monde et de la porter consciemment et volontairement afin que les élans d’abolition de l’ordre capitaliste soient toujours plus incisifs et puissants. Concernant l’insurrection du 18 mars 1871 à Paris, beaucoup d’historiens ont, là aussi, prétendu qu’il s’agissait d’une insurrection « spontanée » dans le sens qu’elle ne serait pas le fruit d’une maturation. Rien n’est plus faux. Il y eut des émeutes en mai, juin 1869 et mai 1870 et une tentative insurrectionnelle en février 1870. D’août 1870 à mars 1871, il y eut plusieurs assauts insurrectionnels, vastes mouvements où de nombreux prolétaires –femmes, hommes, enfants– déferlèrent dans les rues, s’opposèrent aux soldats et montèrent des barricades. Parmi eux, des révolutionnaires ayant tiré des leçons des expériences passées –1793, 1830, 1848– s’étaient organisés en vue de l’insurrection. Nous verrons qu’ils sont très vite à l’œuvre pour donner un saut de qualité à ce superbe élan. À y regarder de plus près, nous voyons bien qu’il n’y a pas de séparation entre les uns et les autres. Le texte qui suit s’en veut être la démonstration pratique. Certains révolutionnaires ont su agir avec intelligence, clarté et autorité, percevant que l’imposition de la Commune était une nécessité pour résoudre les graves problèmes posés par la misère et la poursuite d’une guerre exterminatrice. Pas tous. Pas toujours. À certains moments, des militants solides ont témoigné de graves inconséquences, d’un esprit totalement a-critique et de complicités inconscientes avec des idéologies nationalistes, communalistes, politicistes ou autres. Et c’est tragique, car dans ces moments décisifs, le rapport de force étant sur le point de basculer, de telles inconséquences ont, pour de longues années, rendu l’initiative à l’Etat. Lors de la Commune de Paris comme aujourd’hui dans les mouvements de lutte en Tunisie, Egypte, Li-bye,… l’Etat met en avant une formule de rechange plus moderne, républicaine, pluripartiste, … L’accent est mis sur le départ de la fraction bourgeoise à la tête de l’Etat qui est jugée unique responsable de la mi-sère et de la répression.
    « Là où il existe des partis politiques, chacun voit la cause de tout mal dans le fait que son adversaire est au gouvernail de l’Etat, et non pas lui. Même les politiciens radicaux et révolutionnaires cherchent la cause du mal non dans la nature de l’Etat, mais dans une forme spécifique de l’Etat qu’ils veulent remplacer par une autre forme d’Etat ». Karl Marx (Gloses critiques en marge de l’article « le roi de Prusse et la réforme sociale, par un Prussien »).
    Tant que le prolétariat accordera quelque crédit à ces formules de remplacement, il restera toujours l’objet de la dictature du profit. Une forme de domination change et c’est l’opportunité pour la bourgeoisie de moderniser l’exploitation de la force de travail. Si le prolétariat adhère à ce changement de forme, c’est pour la bourgeoisie un répit, une paix sociale assurée… jusqu’à nouvelle ébullition. Mais ce que tous ces mouvements ont aussi en commun c’est que, prenant pour cible toute une série d’institutions étatiques –commissariats, palais de justice, parlement, sièges de partis, bureaux de vote, pri-sons, banques, grands magasins, commerces de luxe,…– ils expriment un rejet implicite de la globalité du système capitaliste. « Que se vayan todos » (qu’ils s’en aillent tous) mot de ralliement retentissant en Argentine en novembre 2001 exprime un certain épuisement des formules de changements gouvernementaux. La marge de ma-nœuvre des différentes fractions bourgeoises est de plus en plus réduite. Une fois à la tête de l’Etat, elles s’usent d’autant plus vite et peuvent laisser l’Etat mondial du capital devant un gouffre : plus aucune solution de rechange ne fonctionnera. C’est dans ces moments particuliers que nous devrons être à la hauteur du défi lancé au monde de l’argent, de la propriété : contribuer à sa destruction définitive et à l’élaboration d’un autre monde sans Etat, sans capital, sans classe ni exploitation. 18 mars 2011
    Le livre peut être obtenu sur simple demande en écrivant à l’adresse suivante :
    descommunards@yahoo.fr

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