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Philosophie du vide quantique

samedi 11 mai 2024, par Robert Paris

Philosophie du vide quantique

« Le vide quantique est un état quantique particulier du champ, celui qui possède la plus basse des énergies possibles qui soit compatible avec les relations d’incertitude de Heisenberg… En termes particulaires, les fluctuations quantiques du champ peuvent se visualiser comme des « particules » dont le temps de séjour est limité par les relations d’incertitude. Tout se passe comme si elles surgissaient spontanément du vide, par paires, avec l’obligation quantique incontournable de devoir s’y réannihiler tout aussitôt. »

Edgar Gunzig dans « Du vide à l’Univers » (article au sein de l’ouvrage collectif « Le vide » dirigé par Gunzig et Diner

Le vide quantique n’est pas seulement une matière à réflexions scientifiques mais également un thème philosophique. Certains diront ironiquement que moins on en sait sur une question et plus on peut disserter autour mais ils auront tort car on n’en sait pas davantage sur la physique de la matière que sur celle du vide, tout simplement parce que les deux sont absolument inséparables, même en physique classique. La physique n’a jamais pu se passer du vide, aussi bien pour l’étude de la matière que de la lumière, tout comme ces deux études n’ont jamais pu se passer l’une de l’autre. Pour prendre un seul exemple, rappelons qu’il n’y a pas d’interaction matière-matière (les fermions) sans médiation par la lumière (les bosons). De très nombreuses constantes de la physique ne sont rien d’autres que des propriétés attribuées au vide. L’exemple le plus connu est bien sûr la vitesse de la lumière, limite supérieure de toute propagation dans le vide. Mais on peut aussi citer la permittivité ou encore la perméabilité du vide. En physique quantique, le vide devient totalement incontournable puisque le nuage de la fonction d’onde caractérise un système matériel mais aussi un état du vide. Les espaces-temps de la relativité et de la quantité ne sont que des propriétés du vide.

Même en physique classique, l’apparition et la disparition des photons est nécessairement une propriété du vide. Il en va de même pour l’apparition et la disparition des particules en physique quantique.

Le premier motif pour nier l’existence du vide est sa transparence à la matière et à la lumière. En effet, cela entraine que des expériences fondées sur la matière et la lumière ne sont pas capables de mesurer la présence et l’état du vide. Et, comme l’écrit David Finkelstein dans « L’éther adamantin », « le vide est pratiquement totalement transparent à la lumière, aux neutrinos, électrons et protons, ainsi qu’aux ondes gravitationnelles, aux molécules chimiques et cristaux stables, tout comme aux structures macroscopiques stables comme les planètes. Tout se déplace dans le vide avec une absolue mobilité… » Mais il rajoute que ce sont seulement des structures stables qui semblent inchangées dans le vide sur un temps suffisamment long, mais ce n’est pas le cas des particules instables qui, elles, changent et interagissent avec le vide quantique.

Les sceptiques du vide quantique, considéré comme une réalité physique, estiment qu’il s’agit d’effet purement mathématique qui n’a pas plus de réalité physique indépendante que les décompositions de Fourier, tout en étant aussi utiles mathématiquement. Ils ont la même crainte d’imaginer une réalité qui n’existerait pas vraiment que l’avaient Planck et Einstein en découvrant le photon, le corpuscule de lumière. Ces deux derniers ont commencé par y voir un effet purement mathématique sans oser affirmer que le photon existe comme corpuscule réel, avant de reconnaître ouvertement son existence, Einstein en étant convaincu le premier.

Le virtuel (c’est-à-dire les bosons et les fermions éphémères du vide quantique) est aussi considéré par beaucoup de scientifiques comme un effet purement mathématique, donc indispensable dans les calculs mais sans réalité. Mais il n’y a pas de preuve que ce ne soit pas une réalité.

D’ailleurs, l’expression « virtuel » (pour les particules du vide quantique) est opposée dans la terminologie à l’expression « réel » qui étudie la matière et la lumière que nous pouvons observer ou mesurer.

Bien sûr, on pourrait se dire : puisqu’on ne peut ni observer ni mesurer le vide quantique, on ne peut raisonner dessus, ni faire de science à son propos et on doit laisser ces discussions aux métaphysiciens. Là non plus, ce n’est pas légitime. La physique a absolument besoin d’un espace-temps qui est une structure d’un univers sans matière et sans lumière dans lequel matière et lumière se déplacent. Un tel univers existe-t-il ? Il faut reconnaître qu’on n’en a pas la preuve mais que c’est bien plus probable que le contraire car l’existence réelle d’un espace-temps en dehors des masses et des charges de la matière dite réelle est nécessaire à la physique et pas seulement mathématiquement.

Quelque chose de fondamental distingue-t-il les deux (réel et virtuel) ? Oui, c’est l’énergie interne qui est, dans le « virtuel », moitié de celle du « réel ». C’est tout, même si cela a d’autres effets.

Le vide quantique se définit comme un espace-temps dans lequel il y a zéro particule de masse et un champ zéro (ce qui n’empêche pas les fluctuations autour de zéro du moment que la moyenne est nulle). Cela ne signifie pas que la densité d’énergie soit elle aussi nulle puisqu’elle fait intervenir les valeurs absolues des amplitudes positives ou négatives de l’énergie fluctuant autour de zéro. Tout en étant vide de matière et de lumière, le virtuel est très structuré, a des propriétés, n’est pas n’importe quoi.

On dit que le vide ne peut être ni palpé, ni observé, ni mesuré, mais cela ne signifie pas qu’on ne peut rien prouver le concernant, ni qu’on ne peut faire aucune expérience qui vérifie qu’il existe ou pas.

Un des exemples fameux de l’intervention du vide est celle des plaques conductrices de grande taille collées l’une à l’autre et de la force qui les pousse à rester collées ou force de Casimir. La pression qu’elle révèle est celle du vide !

Une autre manifestation des particules du vide consiste à approcher de l’une d’elles avec un objet très accéléré, et on constate alors que la particule virtuelle n’est plus invisible, sans interaction, mais devient perceptible, devient même « réelle » pour la particule accélérée du moins.

Une autre remarque importante : une particule « réelle » n’est rien d’autre qu’une particule « virtuelle » qui a reçu un boson de Higgs.

Autre point important, aucune particule réelle n’existe à l’état « nu », c’est-à-dire sans son nuage de particules et antiparticules virtuelles. C’est le nuage virtuel qui confère à la particule sa charge et sa masse, ces propriétés que nous considérons comme caractéristiques de la stabilité de la particule.

En fait, il apparait finalement que l’apparente stabilité des particules provient du fait que leurs propriétés sont conservées même si le porteur change en sautant d’une particule virtuelle (donc éphémère) à une autre.

L’existence des constantes de Planck, limites inférieures de temps et d’espace donnent une indication supplémentaire sur le vide quantique car ces constantes ne mesurent rien de matériel ni de lumineux, rien de réel. Ce sont sans doute des caractéristiques du vide quantique. Cela donne aussi une limite supérieure à l’énergie, une constante d’énergie qui ne mesure ni la matière ni la lumière, des particules réelles et qui doit aussi caractériser le vide.

Un autre argument (et nous sommes loin de les citer tous) en faveur de l’existence réelle du vide quantique est le vecteur de Poynting. Ce vecteur indique comment et dans quel sens vient l’énergie. Par exemple, pour un câble coaxial, il indique que l’énergie vient du vide entourant le câble et non du câble lui-même.

Le vide est porteur d’énergie, porteur de médiation des particules, porteur des champs.

Avec les particules et antiparticules du vide quantique, l’espace-temps est physique même en l’absence de particules réelles. Lrs particules réelles sont fondées sur des particules virtuelles qui ont reçu de l’énergie (un boson de Higgs par exemple). Ces particules virtuelles fondent aussi bien les photons réels que les particules réelles de matière.

Le virtuel n’est donc nullement de l’imaginaire, du magique ou du métaphysique. Cependant, en termes philosophiques, l’existence ou la non-existence d’un être (le vide) qui n’est ni palpable ni observable ni mesurable mais dont on ne peut pas se dispenser et qui détient une telle capacité d’énergie (dix puissance cent vingt fois plus que la matière et la lumière), dans lequel les objets peuvent apparaitre et disparaitre, a eu de quoi stimuler les imaginations les plus métaphysiques, religieuses, magiques ou mystiques, les plus rétives à la science et qui ont vu dans la physique quantique des champs (celle qui étudie le vide quantique) un véritable champ… d’action et d’investigation imaginaire.

Cela ne signifie pas que les mysticismes ou autres balivernes soient les seules philosophies que favorise la découverte du vide quantique.

C’est du matérialisme et de la dialectique que nous allons surtout parler dans cet article à propos du vide quantique. Et cela non seulement parce que nous défendons clairement une philosophie matérialiste et dialectique mais parce que cela a un rapport direct avec ce que nous venons d’exposer sur le vide quantique et de son rôle en Physique.

Pourquoi la dialectique ? Parce que le fait que les contraires ne se contentent pas de s’opposer mais se composent, qui est le propre de la dialectique hégélienne, est justement ce que l’on constate dans cet univers virtuel. Le stable et l’instable sont indispensables l’un à l’autre, le durable et l’éphémère également, les particules sans masse sont la base des particules avec masse, les ondes et les particules sont indispensables les unes aux autres, un univers vide, sans particules et sans ondes est beaucoup plus plein d’énergies qu’un univers plein, etc.

Le vide quantique unifie de manière dialectique le continu et le discontinu, l’actuel et le virtuel, l’onde et le corpuscule, la matière et la lumière. Il est lui-même une unité dialectique de la matière et de l’antimatière.

Pourquoi le matérialisme ? Parce que le vide quantique donne un fondement matériel à l’Univers entier à condition d’admettre dans le concept de « matière », celle qui est éphémère, celle qui apparaît et disparait, celle qui possède une énergie interne moitié de notre matière usuelle. Cela n’est pas une croyance magique d’admettre cela !

Croire que toute la matière doit absolument être exactement comme nous sommes fabriqués, comme le sont nos instrument, c’est une croyance mystique, magique, métaphysique.

Nous ne sommes ni le centre du monde, ni faits du matériau fondamental du monde. C’est le vide qui, avec ses divers niveaux d’organisation, est le fondement matériel du monde.

Loin de nuire au matérialisme, le vide quantique, en unifiant matière et lumière, onde et corpuscule, élimine les tendances dualistes de la physique quantique. Et surtout, le vide donne une base nouvelle au matérialisme parce que le vide quantique est matériel : c’est de la matière éphémère. Ce caractère instable ne veut pas dire que la matière virtuelle se transforme en « rien » mais que la particule virtuelle se transforme en particule virtuelle de virtuel en perdant de l’énergie, comme la particule dite réelle se transforme en particule virtuelle en perdant de l’énergie ;

La base réelle de la matière est donc bel et bien la matière virtuelle (et son antimatière).

La philosophie qui permet de comprendre de tels mécanismes étonnants est le matérialisme et la dialectique.

Lire aussi :

Est-il vrai que « la nature a horreur du vide » :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3294

Hegel avait-il raison de dire que la matière est vide et que le vide est matière :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3492

Que sont les fluctuations du vide quantique :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4613

Qu’est-ce que le vide :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article597

Pourquoi le vide quantique est la base de toute formation et de toute compréhension de la matière :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4372

Le vide, … pas si vide :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article39

Quelle est la structure de la matière et du vide - ou comment la matière est virtuelle et le virtuel est matière :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1324

Qu’est-ce que le virtuel :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article1469

Lire encore sur le vide quantique :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?mot252

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